Dormeuse, cheval, lion invisibles
[1930]
Dormeuse, cheval, lion invisibles
[1930]
« Récemment, au travers d'un processus nettement paranoïaque, j'ai obtenu l'image d'une femme dont la position, les ombres et la morphologie, sans altérer ou déformer en rien son aspect réel, sont en même temps un cheval.»
Salvador Dali invente la «paranoïa-critique», qu'il définit comme une méthode spontanée de connaissance irrationnelle fondée sur l'association interprétative-critique des phénomènes délirants. Une série de six dessins préparatoires est à l'origine de cette image complexe. Par adjonction successive de détails graphiques, une femme couchée s'y voit métamorphosée en lion, un lion se transforme en cheval suivant le principe dalinien de l'image double.
Domaine | Peinture |
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Technique | Huile sur toile |
Dimensions | 50,2 x 65,2 cm |
Acquisition | Don de Association Bourdon, 1993 |
N° d'inventaire | AM 1993-26 |
Informations détaillées
Artiste |
Salvador Dalí
(1904, Espagne - 1989, Espagne) |
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Titre principal | Dormeuse, cheval, lion invisibles |
Ancien titre | Dormeuse, cheval, lions invisibles ; Femme, cheval paranoaïaques |
Titre attribué | Femme-cheval paranoïaque |
Date de création | [1930] |
Domaine | Peinture |
Technique | Huile sur toile |
Dimensions | 50,2 x 65,2 cm |
Acquisition | Don de Association Bourdon, 1993 |
Secteur de collection | Arts Plastiques - Moderne |
N° d'inventaire | AM 1993-26 |
Analyse
Dans « L’Âne pourri », article qu’il publie dans le premier numéro de la revue Le Surréalisme au service de la Révolution (juillet 1930, p. 9-12), Dalí annonce l’usage esthétique qu’il entend faire de la paranoïa. Ce faisant, il accomplit un des vœux les plus chers du surréalisme, qui, depuis ses origines, cherche à appliquer au champ artistique les découvertes concernant l’inconscient de Sigmund Freud. Dans les premiers temps du surréalisme, cette ambition s’est exprimée par l’apologie d’un automatisme censé enregistrer, sans contrainte, l’activité de l’esprit. À cette conception passive, Dalí oppose sa « paranoïa-critique », expression d’un « délire d’interprétation du monde », agent d’une projection active, subjective, portée par le regard. « Récemment, au travers d’un processus nettement paranoïaque, j’ai obtenu l’image d’une femme dont la position, les ombres et la morphologie, sans altérer ou déformer en rien son aspect réel, sont en même temps un cheval. On peut penser que c’est seulement à cause d’une intensité paranoïaque plus violente que peut se faire l’obtention de l’apparition d’une troisième image et d’une quatrième et de trente images. Dans ce cas-là, il serait curieux de savoir ce que représente en réalité l’image en question, quelle est la vérité et, par la suite, on se pose le doute mental de savoir si les images mêmes de la réalité sont uniquement un produit de notre faculté paranoïaque » (conférence « Position sociale du surréalisme », donnée à l’Ateneu de Barcelone, le 22 mars 1930).
Une série de six dessins préparatoires a permis à Dalí de définir la forme définitive de Lion, cheval, dormeuse invisibles (cat. rais., I, n°354, repr. p. 160). Par adjonctions successives de détails graphiques, une femme couchée s’y voit métamorphosée en lion, un lion se transforme en cheval suivant le principe dalinien de l’image double. Exposé dans le foyer du Studio 28 pendant la projection de L’Âge d’or (28 novembre-3 décembre 1930), second film que Dalí conçoit avec Buñuel, Lion, cheval, dormeuse invisibles est saccagé par les membres de la ligue des Patriotes et de la ligue antisémite, le 3 décembre. Invité par le vicomte de Noailles à reprendre le tableau abîmé, Dalí s’exécute et en peint aussi deux autres versions (coll. part.). Les trois peintures sont exposées chez Pierre Colle en 1931.
Didier Ottinger
Source :
Extrait du catalogue Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007