Le Cours des choses - Mire G 174 (Boléro)
22 décembre 1983
Le Cours des choses - Mire G 174 (Boléro)
22 décembre 1983
Domaine | Peinture |
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Technique | Acrylique sur papier marouflé sur toile |
Dimensions | 271 x 800 cm |
Acquisition | Achat, 1985 |
N° d'inventaire | AM 1985-11 |
Informations détaillées
Artiste |
Jean Dubuffet
(1901, France - 1985, France) |
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Titre principal | Le Cours des choses - Mire G 174 (Boléro) |
Titre attribué | Mire G 174 (Boléro) |
Date de création | 22 décembre 1983 |
Domaine | Peinture |
Technique | Acrylique sur papier marouflé sur toile |
Dimensions | 271 x 800 cm |
Acquisition | Achat, 1985 |
Secteur de collection | Arts Plastiques - Moderne |
N° d'inventaire | AM 1985-11 |
Analyse
Lorsque surgissent, en 1974, les très déroutants « Crayonnages », c’est à une manière de réapprentissage que nous convie l’artiste, marquant ainsi la clôture de « L’Hourloupe ». On retrouvera dans la plupart des séries futures, dont les « Mires » (1983-1984), la graphie énergique qui caractérise ces dessins aux crayons de couleur et au feutre représentant paysages et personnages, avec la naïveté et la liberté gestuelle d’une main d’enfant. Le Cours des choses (Mire G 174, Boléro) (Fasc. XXXVI, n° 175), réalisé pour le pavillon français de la Biennale de Venise de 1984, est le plus grand tableau de la série des « Mires ». Dubuffet a conçu cette série selon la déclinaison d’un module de feuilles de papier, de format 67 x 100 cm, peintes à l’acrylique et agencées sur toile, par deux, trois, quatre, etc. Ici, dans une composition comprenant trente-deux éléments, l’artiste, n’ayant plus ni la mobilité suffisante ni la place requise, a dû progresser unité par unité, puis par petits regroupements. La maîtrise et la cohérence visuelle de l’ensemble en sont d’autant plus frappants que les « Mires », avec leurs tracés bleu et rouge sur fond blanc (Boléro) ou avec un fond jaune (Kowloon) – sans renoncer à diverses subtiles variations de couleur – semblent reposer sur une gestualité qui n’autoriserait que la spontanéité du trait. Aussi le projet des « Mires », terme « pris dans le sens de focalisation du regard sur un point d’un continuum illimité » (Fasc. XXXVI, p. 7, Jean Dubuffet, « Présentation »), s’inscrit-il, de par son processus de construction très mental, au cœur des préoccupations de Dubuffet pour l’élaboration d’une vision nouvelle : « […] récusée en son entier la lecture humaniste de l’univers, ces peintures y substituent une lecture tout autre, dans laquelle n’apparaissent plus de fixités identifiables, mais basée sur les dynamismes et les pulsions, sur les continuités et les mutations. Un tel nouveau regard porté au monde conduit la pensée à prendre à son tour mobilité. C’est à une fonction initiatique qu’aspirent les peintures ici en cause » (ibid.) L’ultime grande série de Dubuffet, les « Non-lieux » (1984), poussera à l’extrême l’ambition de cette entreprise.
Sophie Duplaix
Source :
Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007
Analyse
Toujours taraudé, à près de quatre-vingts ans, par la question de la figuration, à laquelle, insatiable, il a pourtant apporté tant de solutions plastiques – et conceptuelles – à travers le développement de nouvelles séries, Dubuffet entreprend, à la suite de deux ensembles, les Sites aux figurines et les Partitions , encore ancrés dans les Théâtres de mémoire , des peintures à l’acrylique sur papier qu’il dénommera a posteriori « Psycho-sites ». L’ambition est ici de radicaliser la démarche entreprise autour de la notion de lieux habités de figures pour aborder des « idées de sites » et des « idées de personnages ». De telles expressions visent à désigner l’absence de spécificité des lieux évoqués et l’indétermination des figures (une ou plusieurs) qui y apparaissent. L’incertitude, « l’équivoque », est renforcée par des aberrations d’échelle et de points de vue sur la scène représentée, ainsi que par le recours à la délimitation de zones cellulaires où viennent généralement s’inscrire les personnages, de façon à mettre en question la vision que nous avons des choses, vision soumise à un phénomène de « traduction » nous contraignant souvent dans la reconnaissance et la formulation de ce qui est déjà nommé. Aussi, dans les Psycho-sites , Dubuffet va-t-il s’atteler, avec une nouvelle manière, à saper les fondements de nos certitudes visuelles. Les tracés cursifs, d’exécution rapide, procèdent de cette méthode de dissolution des repères dans un espace purement mental, de même que l’usage des couleurs « crues et triviales [qui] font grande place à l’arbitraire, marquées à tout moment d’outrancière impropriété ».
Si les personnages des Psycho-sites conservent encore cette double fonction d’habiter le lieu et de suggérer notre propre regard sur le lieu, avec la série Mires ils deviennent sans objet et disparaissent totalement de la surface du tableau. L’entreprise de l’artiste s’énonce ici avec plus de rigueur vis-à-vis des notions d’indéterminé et d’aléatoire : « On serait fondé à parler d’abstraction si ce terme n’était habituellement réservé à l’art qui s’interdit de figurer quoi que ce soit, au lieu que ces peintures veulent, à l’opposé, figurer les spectacles qui se présentent à nos yeux mais dans une forme très généralisée, au point que s’y voient indifférenciés le grand et le petit, les corps et les vides et toutes anecdotiques spécificités, pour finalement évoquer indifféremment tout spectacle, toute prise quelconque dans le spectacle continu que le monde nous offre. » Les Mires déclinent, dans une gamme de couleurs réduite essentiellement au bleu, au noir et au rouge, leurs tracés erratiques sur fond jaune ( Kowloon ) ou sur fond blanc ( Boléro ). Réalisées pour la plupart sur des feuilles de 67 x 100 cm, elles atteignent parfois des formats plus grands issus de ce module de base : ainsi, Le Cours des choses est composé de trente-deux de ces feuilles. Son processus d’exécution témoigne de la maîtrise de Dubuffet dans la conduite de ce qu’il tient pour l’accomplissement d’une démarche tant conceptuelle que picturale. C’est en effet feuille à feuille que l’artiste progressera dans la réalisation de cette Mire monumentale, conçue en esprit, et dont l’ensemble sera ensuite marouflé sur toile pour être présenté dans le pavillon français de la Biennale de Venise en 1984.
Sophie Duplaix
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
Événements
Bibliographie
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JEAN DUBUFFET MIRES / Michel Thévoz : Structures dissipatives : Paris, Galerie Jeanne Bucher, 15 oct. -10 déc. 1984 (cit. n.p. et reprod. couv.)
Anciens et Nouveaux : choix d''oeuvres acquises par l''Etat ou avec sa participation de 1981 à 1985 : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 5 novembre 1985-3 février 1986. - Paris : éd. Réunion des musées nationaux, 1985 (cat. n° 175 cit. et reprod. p. 252) . N° isbn 2-7118-2.025-4
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La Collection du Musée national d''art moderne. Catalogue établi par la Conservation du Musée. - Paris : éd. du Centre Pompidou, 1986 / rééd. 1987 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle et Nadine Pouillon) (cit. p. 181, 184 et reprod. coul. p. 182-183) . N° isbn 2-85850-292-7
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L''époque, la mode, la morale, la passion : aspects de l''art d''aujourd''hui, 1977-1987 : Paris, Centre Georges Pompidou, Musée national d''art moderne, 1987 (reprod. coul. p. 150) . N° isbn 2-85850-382-6
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Jean Dubuffet, les dernières années : Paris, ed. du Jeu de Paume, 1991 (cat. n° 171 reprod. coul. p. 194-195)
Jean Dubuffet rétrospective : Séoul (Corée), National museum museum of art, 2006-2008 (cit. p. 31 et reprod. coul. p. 212-213)
Collection Art Moderne :[Catalogue de] La collection du Centre Pompidou/Musée national d''art moderne. - Paris : Editions du Centre Pompidou, 2006 (sous la dir. de Brigitte Leal) (cit. et reprod. coul. p. 202-203) . N° isbn 978-2-84426-317-9
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Collection Art graphique : [Catalogue de] La collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne - Centre de création industrielle. - Paris : éd. Centre Pompidou, 2008 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle) (cit. p. 431-432 et reprod. coul. p. 432-433) . N° isbn 978-2-84426-371-1
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Jean Dubuffet. Ein Leben im Laufschritt.- Munich : Hirmer, 2009 (cat. n° 148 reprod. coul. p. 182-183) . N° isbn 978-3-7774-8015-2
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Chefs-d''oeuvre ? : Metz, Centre Pompidou-Metz, 12 mai 2010-29 août 2011. - Metz : éd. du Centre Pompidou-Metz, 2010 (sous la dir. de Laurent Le Bon) (cit. et reprod. coul. p. 239) . N° isbn 978-2-35983-004-0
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Extra large : oeuvres monumentales de la collection du Centre Pompidou à Monaco = Monumental works from the Centre Pompidou collection in Monaco : Monaco, Grimaldi Forum, 13 juillet-9 septembre 2012 (sous la dir. d''Ariane Coulondre) (cat. n° 14 cit. p. 10, 24 et reprod. coul. p. 25, 93) . N° isbn 978-2-84426-581-4
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Electric Fields : Surrealism and Beyond - La Collection du Centre Pompidou : Shanghai, Power Station of Art, 2012 (cit. et reprod. coul. p. 108-109) . N° isbn 978-7-5321-4740-3
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Jean Dubuffet, El viajero sin brújula / Traveller without a compass : Málaga, Centre Pompidou-Málaga, 11 juillet-14 octobre 2018 (sous la dir. de Sophie Duplaix) (cit. p. 66 et reprod. coul. p. 68-69) . N° isbn 978-85-949006-0-0
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Préhistoire : une énigme moderne : Paris, Musée national d''art moderne, 8 mai - 16 septembre 2019. - Paris : Centre Pompidou, 2019 (reprod. coul. p. 110-111) . N° isbn 978-2-84426-848-8
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Jean Dubuffet. Rétrospective : Martigny, Fondation Pierre Gianadda, 3 décembre 2021-6 juin 2022. - Martigny : Fondation Pierre Gianadda, 2021 (sous la dir. de Sophie Duplaix) (cat. n° 97 reprod. coul. p. 100-101) . N° isbn 978-2-88443-172-9
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