Exposition / Musée
Ateliers Aujourd'hui 4
Georges Jeanclos, Ivan Theimer
15 déc. 1977 - 16 janv. 1978
L'événement est terminé
Cette quatrième édition des Ateliers Aujourd’hui est consacrée aux artistes Georges Jeanclos et Ivan Theimer.
Le sculpteur français Georges Jeanclos est né en 1933.
Plusieurs sculptures aux visages lisses, aux crânes rasés, aux yeux clos, qui parfois émergent à peine du drap et sont comme des galets enfouis au plus profond de l’eau égale du sommeil (une ride, pourtant, remonte à la surface, et c’est le pli simple de la couverture), les voici retirés du temps de l’histoire, de ses histoires d’un instant, et retirés aussi du temps de l’existence personnelle, là où chacun s’affronte à l’autre, se déchire de n’être que soi.
Gaëtan Picon in Le Bulletin, n°5, décembre 1977-janvier 1978
L’œuvre d’Ivan Theimer, qui s’affirme également dans la peinture, la sculpture et la gravure, témoigne de l’émergence, dans les années 70, d’un courant qu’on a pu appeler néo-romantique ou néo-subjectif, en rupture absolue avec l’esthétique avant-gardiste des années 60.
A l’opposé des tables rases de l’art conceptuel ou minimaliste, comme des théories empruntant abusivement leur jargon au vocabulaire des sciences humaines et aux philosophies du jour, elle renoue avec une certaine tradition de la peinture, réinvestit un héritage qu’on croyait perdu ou qu’on voulait dénié, se livre enfin aux travaux de la mémoire du musée imaginaire et aux prestiges des formes qu’il contient.
Sa biographie peut sans doute expliquer des postulations si singulières.
Né à Olomouc, en Moravie, en 1944, il a grandi dans les horizons larges des plaines d’Hana, au cœur de l’Europe, qui ont pu lui inspirer le même sentiment qui faisait déjà dire à Bernard de Cîteaux que les beaux paysages l’enseignaient bien davantage que bien des livres. […]
En 1968, Ivan Theimer, venu s’établir en France, a retrouvé dans les paysages de la Drôme et du Périgord, comme dans les lectures, du « Promeneur solitaire », ce qu’il avait perdu, qui reste aussi notre héritage commun et sans doute, en Occident, trop aisément oublié.
De là, une œuvre qui, en plus d’une fois évoque ce que Jean-Jacques Rousseau nommait des signes mémoratifs.
D’une part, des tableaux, des paysages aux vastes horizons, qu’on dirait balayés par le vent, ou bien des natures mortes, des intérieurs tranquilles ; d’autre part, des sculptures, boîtes creuses ou reliquaires sur lesquels viennent s’agglutiner des végétaux, des éléments naturels mais aussi des éléments rappelant la main de l’homme, quoique d’un usage indéfinissable. Herbiers, moussiers, « Sorte de recueils, disait encore Rousseau, qui doivent servir seulement de mémoratifs ». […]
Comment, toutefois, ne pas rapprocher l’étrange réapparition d’un sentiment de la nature chez Ivan Theimer, de la troisième révolution industrielle, celle que nous vivons actuellement et qui entraîne cette fois la liquidation des derniers îlots naturels, la rupture des derniers équilibres entre l’homme et son milieu, la ruine de l’écosphère, l’apparition menaçante d’une nature entièrement dénaturée, marquée par la défoliation, le déboisement, l’empoisonnement des cours d’eau et des milieux marins, la disparition des espèces animales ?
L’adieu rousseauiste à un paysage aimé prend donc ici un sens nouveau et radical : ce n’est pas la nostalgie complaisante de la belle âme pour un moment singulier, c’est la critique radicale exercée par l’homme, pris en tant que genre et non plus en tant qu’individu, d’une civilisation qui menace son existence.
D’après Jean Clair, in Le Bulletin, n°5, décembre-janvier 1978
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