Première recherche pour "La mariée mise à nu par les célibataires"
juillet 1912
Première recherche pour "La mariée mise à nu par les célibataires"
juillet 1912
Domaine | Dessin |
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Technique | Mine graphite et encre sur carton |
Dimensions | 24 x 32 cm |
Acquisition | Achat, 1979 |
N° d'inventaire | AM 1978-747 |
Informations détaillées
Artiste |
Marcel Duchamp
(1887, France - 1968, France) |
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Titre principal | Première recherche pour "La mariée mise à nu par les célibataires" |
Date de création | juillet 1912 |
Domaine | Dessin |
Technique | Mine graphite et encre sur carton |
Dimensions | 24 x 32 cm |
Inscriptions | Signé, daté et titré en bas à gauche : Marcel Duchamp / Jùli (sic) 1912 / Première recherche pour : la mariée mise à nu par les célibataires / mécanisme de la pudeur / Pudeur mécanique |
Acquisition | Achat, 1979 |
Secteur de collection | Cabinet d'art graphique |
N° d'inventaire | AM 1978-747 |
Analyse
1912 est pour Marcel Duchamp l’année des perturbations et des rapides avancées. En avril, « l’incident du Nu descendant un escalier aux Indépendants a déterminé en moi, sans même que je m’en rende compte, une complète révision de mes valeurs », confiera-t-il à Pierre Cabanne. Ses deux frères, le peintre Jacques Villon et le sculpteur Raymond Duchamp-Villon, lui enjoignent, à l’instigation d’Albert Gleizes et de Jean Metzinger, de retirer cette toile inspirée des chronophotographies de mouvements réalisées par Marey et Muybridge, et jugée non conforme aux données du cubisme ambiant. Au printemps, il assiste au Théâtre Antoine à la représentation d’Impressions d’Afrique de Raymond Roussel, où sont mis en scène des robots armés de tuyaux : c’est « la folie de l’insolite », commente-t-il. De mars à mai, dans l’atelier de Neuilly, il dessine coup sur coup des études mécanomorphes, Deux nus, un fort et un vite ; Le Roi et la Reine traversés par des nus vite ; Le Roi et la Reine entourés de nus vite. En juin, c’est le départ pour Bâle, où il découvre les peintures d’Arnold Böcklin, puis Munich : l’impressionnent les propositions du groupe du Blaue Reiter, créé autour de Kandinsky, dont le livre Du spirituel dans l’art vient de paraître. Duchamp y réalise quelques dessins : en juillet, La Mariée mise à nu par les célibataires, qu’il désigne comme la première étude préparatoire à son grand œuvre, La Mariée mise à nu par ses célibataires, même (Le Grand Verre), dont l’élaboration va l’occuper de 1915 à 1923 ; suivent Vierge nº 1 et Vierge nº 2, Passage de la Vierge à la mariée, Mariée et Aéroplane. En octobre, il entreprend en compagnie d’Apollinaire un autre voyage, dans le Jura, avec le bolide de Picabia. Au retour, il fait une visite marquante au Salon de l’aviation en compagnie de Léger et de Brancusi, et tombe en admiration devant le profil d’une hélice. La lecture de quelques livres le bouleverse : ceux de Jean-Pierre Brisset (qui démontre par des calembours que l’homme descend de la grenouille), Voyage au pays de la quatrième dimension de Gaston de Pawlowski, Les Anaglyphes géométriques d’Henry Vuibert. Tout cela n’est pas sans conséquence : Duchamp se détache et choisit de prendre un emploi à la bibliothèque Sainte-Geneviève, qui répond sans doute à son attrait pour les « régions plus verbales » que manifestent déjà les titres de ses œuvres et le dispositif des notes. Ainsi, dans cette Première recherche de juillet 1912, les annotations manuscrites – « mécanisme de la pudeur » et « pudeur mécanique » – en disent long sur les jeux et les enjeux sémantiques qui seront à l’œuvre dans Le Grand Verre. Au-delà de la robotisation – qui marque toutes les études de l’année – des trois figures animées de mouvements mécaniques circulaires, comme ceux des escrimeurs de Marey, le dessin, exécuté au crayon le plus fin, et suivant les lois de la perspective – tel un croquis d’anatomie de Léonard –, révèle l’obsession de Duchamp pour la transparence : le déploiement de membranes légères – ou défloraison de la Vierge – annonce le domaine de l’infra-mince, région de l’impalpable désir qui commandera l’univers de La Mariée et de ses Célibataires.
Marc Décimo
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008