Beyond the Vulnerability

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"Avoir la flamme". Une nouvelle acquisition

« Je cherche une langue au travers de laquelle je puisse dialoguer avec la source de l’Univers et le cœur intime de l’être humain. » C’est le dessein de Chen Zhen (1955-2000), qui place l’homme au centre des enjeux de son œuvre.

Appartenant à une famille de médecins, il accorde à l’art une valeur apotropaïque, un pouvoir de soigner et d’apaiser les conflits entre les individus et la société, la nature et la technologie. Son parcours artistique se nourrit, dès son arrivée à Paris en 1986, du dialogue humaniste des cultures. La dynamique de la synergie est le moteur de sa démarche : « La synergie devient ce qu’il y a de plus important dans notre conscience de faire de l’art. Cela se situe au niveau des rencontres, de la communication, du dialogue entre les gens et l’œuvre d’art. Synergie est un terme médical. Ce sont des énergies inhérentes, connectées ensemble entre les organes. Cette notion de réseau des énergies qui ne fonctionnent qu’ensemble est ce qui devient de plus en plus intéressant aujourd’hui. » Au-delà du pont qu’il établit entre l’Orient et l’Occident, Chen Zhen développe les concepts de « Résidence, Résonance, Résistance », et de « Transexpérience », cherchant à habiter mentalement chez l’autre et à relier des projets qu’il conduit lors de séjours en Afrique du Sud et au Brésil.

C’est à Salvador de Bahia, où il réside pendant un mois en 1999 avec sa famille, lors d’un atelier avec des jeunes sans-abris, qu’il crée Beyond the Vulnerability. À travers la construction collective de cette œuvre, Chen Zhen aiguise la curiosité des enfants qui n’étaient souvent jamais sortis de leur quartier, au sein desquels ils vivaient dans la pauvreté. Il étudie avec eux l’architecture vernaculaire de Salvador, les sensibilise aux écarts sociaux manifestes dans l’architecture, mais aussi à la beauté fragile qu’il voit dans l’architecture de fortune des maisons sur pilotis. Chen Zhen propose aux enfants de photographier leurs maisons et de rêver/créer leur foyer idéal. Ils composent une cité imaginaire faite de fragiles petites maisons en bougies multicolores, à l’architecture plus ou moins élaborée.

Dans l’œuvre transparaît la précarité des habitations des favelas, mais aussi le chatoiement de l’architecture baroque brésilienne. En 2000, l’artiste prolonge sa réflexion en imaginant son Village sans frontières, constitué de quatre-vingt-dixneuf chaises d’enfant collectées dans différents pays qu’il transforme en petites maisons de bougies suspendues au mur : un village universel, symbolisant l’égalité, la convivialité, la tolérance et la compréhension mutuelle, la coexistence et le dialogue sans frontières.Chen Zhen invente ainsi des « petits mondes » en devenir, des champs d’énergie plantés de bougies qui, en Chine aussi, symbolisent la vie humaine. Ces cités célestes en suspension, comme un autel, éclairent l’obscurité d’un monde en mutation.

Notes :

Acquisition réalisée grâce aux dons collectés au dîner du mardi 20 janvier 2015 donné par la Société des Amis du Musée au profit des collections du Centre Pompidou, avec le soutien généreux de Xu Min, Chen Bo et de la Galleria Continua.

Source :
Code Couleur, n°22, mai-août 2015, p. 46