Autoportrait
[1942]
Autoportrait
[1942]
Domaine | Dessin |
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Technique | Encre sur papier quadrillé |
Dimensions | 28 x 21,5 cm |
Acquisition | Achat, 1993 |
N° d'inventaire | AM 1993-95 |
Informations détaillées
Artiste |
Louise Bourgeois
(1911, France - 2010, États-Unis) |
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Titre principal | Autoportrait |
Date de création | [1942] |
Domaine | Dessin |
Technique | Encre sur papier quadrillé |
Dimensions | 28 x 21,5 cm |
Inscriptions | MO.M.B.DR. : LB |
Acquisition | Achat, 1993 |
Secteur de collection | Cabinet d'art graphique |
N° d'inventaire | AM 1993-95 |
Analyse
L’apparition du dessin dans la vie et l’œuvre de Louise Bourgeois ne tenait qu’à un fil, celui, fragile et ténu, des tapisseries lacunaires et usagées que restauraient ses parents dans l’atelier de Choisy-le-Roi. Dès l’âge de onze ans, elle dessine les motifs manquants des personnages ou des chevaux : c’est ainsi qu’elle découvre l’utilité de l’artiste. Le dessin prend ensuite pour elle une autre orientation, celle de la géométrie qu’elle étudie à la Sorbonne, dans le cadre d’un enseignement de mathématiques. Cette double origine, figurative et abstraite, imaginative et rationnelle, est à la source de la dualité de toutes ses formes à venir. Enfin, elle étudie le dessin traditionnel dans diverses académies et écoles qu’elle fréquente dans les années 1933-1938 : la trace de cette formation académique et Art déco est visible dans un premier autoportrait de 1938, encore influencé par le style de Paul Colin, son professeur.
Depuis lors, Louise Bourgeois n’a cessé de dessiner sur tous les supports qui lui sont tombés sous la main. Dessins autonomes, abstraits ou figuratifs, ils sont, dit-elle, comme « des pensées-plumes », c’est-à-dire des idées qu’il faut saisir au vol pour les fixer, comme des papillons. Le dessin constitue donc sa première approche plastique, la source de tout son travail, le fonds d’où surgiront les sculptures. Elle le pratique de façon quasi obsessionnelle, répétitive, et avec beaucoup de plaisir : il est pour elle un exercice de révélation plus que d’exorcisme, qui lui permet de dérouler l’écheveau complexe de ses souvenirs et les multiples images suggérées par de fortes émotions.
Alors qu’en général son visage l’intéresse peu, quelques autoportraits apparaissent pendant les années de guerre, comme si l’éloignement provoqué par son installation en Amérique incitait Louise Bourgeois à rechercher son identité. L’image qu’elle donne d’ellemême en 1942, livrée de face, est d’une grande justesse. C’est un portrait si caractéristique que l’on peut y reconnaître une Louise éternelle, sans âge : finesse et précision des traits, air à la fois enfantin et grave, aspect ambigu donné au visage par l’ombre, regard perçant et scrutateur. Le caractère unique de cet autoportrait, plus proche de la caricature que de la ressemblance, tient à la simplicité des moyens graphiques utilisés autant qu’à l’intensité de l’expression qui n’est pas sans dégager une certaine étrangeté : le visage est comme un masque à demi recouvert d’une sorte de barbe ; le chignon stylisé évoque celui d’un personnage-fétiche (l’artiste en réalisera toute une série en bois dans les années 1950) ; enfin, la tête est disproportionnée par rapport au buste, qui est celui d’une jeune fille. Contrairement à la plupart des personnages décapités réalisés par Louise Bourgeois, le visage prend ici une importance particulière, qui annonce les têtes en tapisserie des années 2000, autres formes d’autoportraits.
Marie-Laure Bernadac
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008