Cinéma / Vidéo
Hugo et Rosa
21 nov. 2012
L'événement est terminé
Projection du film "Hugo et Rosa" (Hugo och Rosa) 2002 / Suède / 57 min
Hugo et Rosa (Hugo och Rosa)
2002 / Suède / 57 min
Réalisation : Bengt Jägerskog
Image : Bengt Jägerskog
Son : Arne Svärd
Montage : Micke Engström
Production ; SVT Sveriges Television Documentary
Distribution :SVT Sveriges Television, Arte France
« Nous sommes nés ici, vous savez ! ». Hugo et Rosa, frère et sœur centenaires,
coupent encore le bois dans le cottage acquis par leurs parents en 1898. Ils
vivent au rythme des saisons, sans eau courante ni électricité, dans la
campagne de Stockholm. Jadis ils cultivaient les champs autour avec leurs
nombreux frères et sœurs, dont trois seulement se sont mariés. Malgré les
anniversaires dûment fêtés —les pâtisseries jouent un rôle important dans leur
vie— et le passage des saisons rendu par une série de très beaux plans du
paysage environnant, le temps semble arrêté. Leurs souvenirs d’enfance sont
encore vivaces et leur foi simple n’a pas changé depuis que Rosa, petite fille,
s’assurait une nuit de quiétude après avoir récité sa prière du soir.
Mais cette vie de menus labeurs s’engloutit dans un fondu au noir. Belle idée :
c’est juste quand l’électricité est installée dans la maison que le noir se
fait, à la faveur d’un plan où Rosa ferme son nouveau réfrigérateur. L’ellipse,
ici, a des allures de discrète catastrophe : l’hospitalisation d’Hugo mène sa
sœur à la maison de retraite. Reverront-ils leur cottage rouge ? Pourront-ils
vieillir ensemble, en inséparables ? Leur vie commencée à l’orée du vingtième
siècle s’achève avec lui. Le réalisateur, très loin d’un propos sociologique
sur la « fin de vie », fait preuve dans le montage d’une compréhension profonde
de ce que signifie habiter. Quelque part entre la terre cultivée dans leur
jeunesse et le Ciel où ils sont certains qu’une place de choix les attend.
Suivi de
Maria : élégie paysanne ()
1988 / Russie / 38 min
Scénario réalisation et image : Alexandre Sokourov
Son : Mihaïl Podtakuj
Production : Studio des films documentaires de Léningrad
Distribution : Doc and Film International
Quand, en 1978, Alexandre Sokourov filme la paysanne Maria Voïnova au travail
dans un kolkhoze des environs de Gorki, sait-il qu’il fixe sur pellicule 16
millimètres les derniers feux du collectivisme ? « Il n’y aura bientôt plus
personne pour moissonner, déjà il ne reste plus que des bonnes femmes ! »
entend-on parmi les travailleuses. S’il n’a pas la texture expérimentale
d’œuvres plus tardives comme Elégie de la traversée (2001), ce film de 1988
inaugure le lyrisme sombre, humble et poignant que Sokourov prolongera par
exemple avec Alexandra (2007). Ici, la forme de l’élégie ne tient pas seulement
à la fêlure intime de Maria (la perte d’un enfant) et à la fin prochaine d’un
certain mode de vie ; dans la deuxième partie, le retour du cinéaste neuf ans
plus tard, l’emploi du noir et blanc et le commentaire off ouvrent à une
réflexion profonde sur la mort et les puissances du cinéma. Revenu montrer au
village son court-métrage de 1978, Sokourov prévient : « Ne cherchez pas Maria
dans la salle, elle n’y est pas ». La figure centrale du portrait laisse une
place vacante, une fracture entre le mari et leur fille devenue adulte. Le
moment de la projection vient à la fois souligner ce vide et le combler. « Une
œuvre d’art est une sorte de maître, une école sans fin, une leçon qui permet à
tout un chacun, au cours de sa vie, de s’entraîner à ressentir les sentiments
associés à la mort. Si nous n’étions jamais exposés au sentiment de la mort vu
par l’art, […] notre âme serait brisée par le chagrin parce que notre être n’y
serait pas préparé. » (Alexandre Sokourov à Kirill Galetski, Images
documentaires 50/51, 1er et 2è trimestres 2004.)
Charlotte Garson
Quand
À partir de 20h