Débat / Rencontre
Festival / Eric Duyckaerts
Après Wodehouse
16 févr. - 7 mars 2011
L'événement est terminé
Ils prennent la parole, Arnauld Pierre, Éric Duyckaerts et leurs complices. Qui a dit de faire silence au musée ? Le Nouveau festival (re)prend la parole et propose trois tribunes qui transforment, transcendent ou hypnotisent.
Éric Duyckaerts tord le cou aux « vérités certifiées » avec le tranchant d’une rhétorique parodique et acrobatique. Il célèbre le philosophe performeur belge Henri Van Lier et s’élance « après Wodehouse », avec cinq conférences-performances qui rejouent la parole de Pelham Grenville Wodehouse (1881-1975), maître reconnu de la prose humoristique anglaise. Se tissent ainsi des intrigues qui se dénouent en happy ending de contrebande.
Jean-Pierre Criqui : Y a-t-il une histoire de la « conférence-performance » dans laquelle vous vous considérez inscrit ?
Éric Duyckaerts : « Robert Morris, Joseph Beuys, Robert Filliou, Andrea Fraser, Fluxus, etc... Cependant, ce n'est pas exactement mon histoire, et j'ai découvert les œuvres de cette tradition un peu tard dans mon cheminement. D'ailleurs, si je les avais rencontrées plus tôt, il est vraisemblable que je ne me serais pas décidé à me lancer sur cette voie – tant est grande ma déférence, et tant il est vrai qu'il y a une énergie particulière quand on croit découvrir l'Amérique. Une des sources les plus vives de mon inspiration a été le professeur Henri Van Lier, de Bruxelles. Cet extraordinaire érudit était un « conférencier-performeur » d'une qualité inégalée à mes yeux. Il se préparait comme un sportif de haut niveau, et sortait épuisé de ses prestations. Je l'ai souvent vu live et quelquefois à la télévision. Mon admiration pour lui est restée intacte.
Je veux aussi mentionner la coutume belge du tournoi d'éloquence pour les élèves de l'enseignement secondaire et les étudiants en Droit. Le fait que j'aie toujours fini deuxième lors de ces compétitions a certainement été un aiguillon de ma pratique artistique – assez éloignée des exigences de l'éloquence académique.
J.-P. C. : Qui est Wodehouse, et pourquoi lui ?
E. D. : Pelham Grenville Wodehouse (1881 – 1975) est un écrivain anglais dont l’œuvre comprend des romans, des nouvelles et des textes de comédies musicales. Il a connu un énorme succès populaire durant une carrière de soixante dix ans, et continue d'être lu de nos jours. Le cadre de ses romans est essentiellement la haute société anglaise de l'avant-guerre. Maître reconnu de la prose anglaise et de l'humour, Wodehouse est admiré aujourd'hui pour ses romans et nouvelles qui mettent en scène le majordome Jeeves et ceux qui se déroulent au château de Blandings.
Les chefs d'œuvre de Wodehouse me nourrissent depuis des années. Dans le cadre du nouveau festival, en plaçant mes conférences-performances sous le titre Après Wodehouse, j'entends surtout indiquer une direction de ma pensée qui privilégie l'acrobatie et l'humour. Wodehouse excelle à créer des situations emberlificotées et les moyens d'en sortir qu'il donne à ses personnages sont vertigineux. Des figures de l'acrobatie wodehousienne me serviront de prétexte à développer des improvisations dans les registres qui sont les miens.
J.-P. C. : Notant que la société bourgeoise aspirait à ce que l'art fût joyeux et la vie grave, Adorno a émis l'idée que l'inverse serait préférable. Qu'en pensez-vous ?
E. D. : Nous voilà devant une bascule intellectuelle. Adorno était aussi un spécialiste de Kierkegaard qui a écrit Enten-Eller : Ou bien … ou bien (L'alternative, pour les traductions françaises). Un débat entre l'esthétique et l'éthique. Il faudrait choisir. Je ne supporte pas ces mises en demeure, et je résiste de toutes mes forces à tout ce qui pourrait nuire à l'art et à la vie, joyeux ou grave, sans distinction. »
Ce cycle de 5 conférences performances d’Eric Duyckaerts est l’occasion de deux autres soirées consacrées l’une à P.G. Woodehouse, avec François Angelier et Christian Jambet, l'autre à Henri Van Lier, avec Jan Baetens et Benoît Peeters.
Quand
tous les jours sauf mardis
Où
Foyer, Petite salle