Débat / Rencontre
Paul B. Preciado
Une nouvelle histoire de la sexualité
15 - 19 oct. 2020
L'événement est terminé
Chaque année depuis 2017, le Centre Pompidou propose à un intellectuel invité de développer un projet de pensée. Pour l’année 2020, l'institution est heureuse d’accueillir Paul B. Preciado : philosophe et commissaire d’exposition, il est l’un des penseurs contemporains les plus importants dans les études du genre, des politiques sexuelles et du corps. À cette occasion, Paul B. Preciado propose un séminaire public et performatif autour d’une nouvelle histoire de la sexualité, plus de quarante ans après l’ouvrage fondamental de Michel Foucault. Commencé en mars dernier et interrompu par la pandémie du coronavirus, le séminaire revient sous une forme compacte du 15 au 19 octobre, et se transforme en un « cluster révolutionnaire ».
« Lorsque nous avons commencé le séminaire au Centre Pompidou début mars, mon objectif était de faire une nouvelle histoire de la sexualité après Foucault, avec Foucault et contre Foucault. Cette nouvelle histoire transféministe, queer et anticoloniale, en partant d'une analyse de l'infrastructure patriarcale et coloniale de la modernité et entend réfléchir aux transformations en cours des dispositifs technopolitiques de violence et de contrôle des vivants, mais aussi aux différentes modalités de subjectivation critique. La première séance était une énorme assemblée constituante des corps contre la norme. Puis, soudainement, le virus et le confinement sont arrivés. Les séances prévues pour le séminaire ont été suspendues. La gestion du virus a provoqué non seulement une crise sanitaire et économique, mais aussi une crise politique et esthétique. D'une part, les inégalités et les formes de contrôle et de violence contre les minorités sexuelles, raciales et migrantes ont été amplifiées pendant la crise. D'autre part, l'interruption inattendue des rythmes de production et de consommation du capitalisme néolibéral nous a permis de faire l'expérience d'une autre vie. La mort de George Floyd aux États-Unis aux mains de la police, et le procès d'Adama Traoré en France ont rapidement généré des vagues de manifestations, suivies d'un mouvement international de critique et de demande de restriction de la violence raciale et sexuelle institutionnelle, tant de la part de la police que des autres administrations de l'État.
Dans ce contexte, j'ai décidé de modifier le programme initial et de passer d'une nouvelle histoire de la sexualité, plus théorique, faite en solo, à une narration chorale du processus révolutionnaire en cours. Il s'agit maintenant de faire appel à une multiplicité de voix et de corps politiquement actifs, dans l’écriture, la philosophie, en cinéma, en danse, en art contemporain, en théâtre, en musique... qui participent au démantèlement de l'infrastructure patriarcale et coloniale de la société. Mon hypothèse de travail est que nous avons besoin de dépasser la logique de la politique d’identité qui ne nous interpelle qu'en tant que femmes, en tant qu'homosexuels, en tant que transsexuel(e)s, en tant que noir(e)s, en tant que prolétaires, en tant que handicapé(e)s, selon la taxonomie de la modernité coloniale... qui nous essentialise et nous atomise et commencer à construire un projet révolutionnaire de transformation anti-patriarcale, antiraciste et d'écologie politique radicale. C'est ce projet que je vous invite à imaginer pendant cinq jours d'interventions, de performances, des films, de musique et de débats publics.
La proposition est de construire un cluster révolutionnaire antifasciste, transféministe et antiraciste. Face à la notion traditionnelle d'alliances entre différents mouvements essentiellement différents, qui correspond toujours à la logique de l'identité, je propose de questionner à la fois la métaphysique de la modernité coloniale et sa taxonomie, et de penser l'identité politique comme un virus et les agencements d'oppression, d'action et de transformation comme des clusters.
Voici les voix et les corps du cluster :
Sarah Diehl vient nous parler des nouveaux mouvements d'émancipation reproductive et des réponses face aux politiques sexuelles néofascistes en Pologne, en Hongrie, ainsi que dans d’autres contextes apparemment démocratiques. María Galindo partagera avec nous le défi des luttes des travailleuses du sexe indigènes en Bolivie. François Vergès, Elsa Dorlin, Elisabeth Lebovici et Daisy Letourneur nous aideront à lire ce processus d'émancipation dans le cadre d'une plus longue histoire de décolonisation du féminisme et des luttes queer. Naelle Dariya, Nadège Beausson-Diagne, Adèle Haenel et Rokhaya Diallo nous invitent à faire proliférer les stratégies de lutte anti-patriarcale et anti-raciste au sein de la représentation cinématographique et audiovisuelle en France. Shu Lea Cheang présente une performance qui critique la discrimination sexuelle, sexuelle et raciale dans les procès pour viol. Kengné Téguía dénonce la suprématie du corps valide et appelle à un agencement critique urgent des mouvements féministes, trans et antiracistes avec les minorités handi. Virginie Despentes, Yseult et Melissa Laveaux, avec l'écriture et la musique, donnent forme à la colère et convoquent les forces de la poésie comme moteurs de transformation du désir. Et Volmir Cordeiro et Pol Pi font danser le corps blessé par la violence patriarcale et coloniale et commencent à composer une danse pour la révolution qui vient. ». Paul B. Preciado
Programme des conférences
Jeudi 15 octobre
Virus et révolution : histoires subalternes de la sexualité et changement de paradigme
Conférence de Paul B. Preciado
Grande salle, 19h
Me too, Galatée, performance de Pol Pi
Forum, 21 h
Vendredi 16 octobre
FLUIDØ, de Shu Lea Cheang, Allemagne, 2017, 80 min, vostfr
Petite salle, 16h
Agencements révolutionnaires 1 : Comment se construire un corps révolutionnaire ?
Introduction de Paul B. Preciado « Brancher la machine révolutionnaire »
Intervention de Elisabeth Lebovici
Intervention de Daisy Letourneur
Intervention de Rokhaya Diallo
Vidéo de María Galindo
Lecture de Virginie Despentes
Une danse pour commencer la révolution de Volmir Cordeiro, Embrassons-nous
Grande Salle, 19h
Samedi 17 octobre
I.K.U, de Shu Lea Cheang, Japon, 2000, 72 min, vostfr
Petite salle, 14h30
Agencements révolutionnaires 2 : Intersectionnalité radicale : Féminisme, antiracisme, nouvelles luttes ouvrières, politiques queer et trans
Performance de Shu Lea Cheang Rape by Deception : Case Studies (avec Smith et Shu Lea Cheang)
Interventions d’Elsa Dorlin, de Françoise Vergès, suivies d’une conversation à trois avec Paul B. Preciado
Grande salle, 17h
Dimanche 18 octobre
Fresh Kill, de Shu Lea Cheang, Etats-Unis, 1994, 80 min, vostfr
Cinéma 2, 14h30
Agencements révolutionnaires 3 : rébellion dans la représentation
Performance de Kengné Téguia, The Revolution will be DEAFinitely loud
Musique de Mélissa Laveaux
La nouvelle vague transféministe anti-raciste : table ronde avec Nadège Beausson-Diagne, Naelle Dariya, Adèle Haenel et Paul B. Preciado
Musique d'Yseult
Grande salle, 16h
Lundi 19 octobre
Séance de signature de Paul B. Preciado
Librairie Flammarion, 17h30
Projection de Bajo mi piel Morena de José Celestino Campusano (Argentine, 2020, 93’, vostr)
Projection suivie d’une rencontre virtuelle avec le cinéaste et d’un dialogue avec Paul B. Preciado
Cinéma 1, 17h30
Quand
15 - 19 oct. 2020
Å partir de 17h
L’événement est complet, mais vous pouvez suivre l’intégralité du séminaire en direct gratuitement sur notre site internet ou sur facebook
Où
Intervenants
Nadège Beausson-Diagne, actrice
José Celestino Campusano, réalisateur
Shu Lea Cheang, artiste
Volmir Cordeiro, chorégraphe
Naelle Dariya, actrice
Virginie Despentes, écrivaine et réalisatrice
Rokhaya Diallo, journaliste
Sarah Diehl, écrivaine, cinéaste et activiste berlinoise
Elsa Dorlin, philosophe
María Galindo, écrivaine, artiste et cofondatrice du collectif féministe Mujeres Creando en Bolivie
Adèle Haenel, actrice
Mélissa Laveaux, chanteuse et compositrice canadienne
Elisabeth Lebovici, historienne de l’art, journaliste et critique d’art
Daisy Letourneur, militante et autrice de blog
Pol Pi, chorégraphe brésilien
Smith, photographe, cinéaste et plasticien
Kengné Téguia, artiste
Françoise Vergès, politologue
Yseult, chanteuse et compositrice française
Paul B Préciado
© Catherine Opie