
Focus sur... « Chopin's Waterloo » d'Arman

Éléments de piano fixés sur panneau de bois
186 x 302 x 48 cm
© Adagp, Paris
Centre Pompidou/Dist. RMN-GP
Avec la série des « Colères », entamée en 1961, Arman (de son vrai nom Armand Fernandez) alterne la destruction d'objets avec la pratique, développée depuis 1959, d'agréger en masse des objets identiques dans ses fameuses « Accumulations ». Issu d'un combat en présence du public, Chopin's Waterloo pérennise la « destruction-désarticulation » d'un piano droit. Les morceaux épars de l'instrument de musique ont été ensuite réassemblés sur un panneau, à la façon d'un collage cubiste.
Les « Colères »c'est presque aussi précis qu'une projection de judo. Je calcule où je vais casser ; ce n'est pas une colère vraiment ; c'est une destruction plus ou moins prévue.
Arman
Deux tendances paradoxales cohabitent au sein du travail d’Arman : d’une part, le besoin de conserver, à travers les « Accumulations » ; d’autre part, la volonté de détruire, à travers les « Colères », dont les premières ont lieu en public, en 1961, à Paris. Dans NBC Rage, Arman détruit une contrebasse devant les caméras de la télévision américaine NBC, dans un terrain vague situé en face de l’atelier parisien qu’il occupait avec Jean Tinguely, impasse Ronsin. Lors du premier festival du Nouveau Réalisme, en juillet 1961, il s’attaque à des objets cultes de la bourgeoisie : des copies de meubles Henri II. En août 1962, lors de son exposition intitulée « Musical Rage » à la galerie Saqqarah, à Gstaad, en Suisse, Arman réalise une action au cours de laquelle il démolit à coups de masse un piano, dont il fixe ensuite les morceaux épars sur une planche préparée à l’avance. Ainsi les traces de son geste sont-elles immédiatement pérennisées sous la forme d’un assemblage-collage, que l’artiste situe précisément dans la lignée des cubistes.
À travers l’agression de l’instrument de musique – fréquemment utilisé dans les « Colères » –, c’est à un symbole d’harmonie et de culture que s’attaque Arman. Au-delà de l’aspect spectaculaire, l’artiste recherche au travers de la destruction une dimension grandiose et épique, non sans un certain humour ; en témoigne la connotation ironique du titre Chopin’s Waterloo . Ces actions s’inscrivent significativement dans un contexte général qui voit le développement des happenings, notamment aux États-Unis et chez les Nouveaux Réalistes européens. ◼
* Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Sophie Duplaix, éditions Centre Pompidou, 2007
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186 x 302 x 48 cm
© Adagp, Paris
Centre Pompidou/Dist. RMN-GP