Polychromie avec tés
1980
Polychromie avec tés
1980
Domain | Oeuvre en 3 dimensions |
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Techniques | Peinture acrylique sur bois et métal peint |
Dimensions | 202 x 202 x 17 cm |
Acquisition | Dation, 2011 |
Inventory no. | AM 2012-114 |
Detailed description
Artist |
Jesús Rafael Soto
(1923, Venezuela - 2005, France) |
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Main title | Polychromie avec tés |
Creation date | 1980 |
Domain | Oeuvre en 3 dimensions |
Techniques | Peinture acrylique sur bois et métal peint |
Dimensions | 202 x 202 x 17 cm |
Acquisition | Dation, 2011 |
Collection area | Arts Plastiques - Contemporain |
Inventory no. | AM 2012-114 |
Analysis
Polychromie avec tés associe, comme de nombreuses œuvres de Soto à cette période1, deux types de structures. La partie supérieure est régulièrement couverte de tés, peints en blanc sur le fond blanc strié de noir. Ces petits éléments métalliques en forme de T, que l’artiste utilise depuis déjà une dizaine d’années, sont fixés suivant le sens des stries, ici verticalement. Cet agencement est combiné avec une composition constituée, dans la moitié inférieure de l’œuvre, de cinq rangées de neuf tacos. Ces « taquets » sont formés de plaques carrées métalliques de différentes couleurs, fixées sur le support à l’aide d’un petit parallélépipède en bois, que l’on ne voit pas lorsque l’on regarde l’œuvre de face. Ils sont alignés sur la surface noire tramée, à quelques centimètres d’intervalle.
Ce type de composition est l’une des diverses voies empruntées par Soto pour étudier la vibration optique et la dématérialisation de la forme. Lorsque le regard balaie latéralement le tableau, les tés disparaissent et réapparaissent au gré du plus infime mouvement du spectateur, et une multitude de points lumineux irradiants se mettent à vibrer simultanément. Ce qui importe ici est l’interaction entre les tés, le fond de l’œuvre et le regard du spectateur – une relation difficile, voire impossible à maîtriser : « On ne peut savoir exactement quand va disparaître une ligne superposée ; moi-même, qui les connais bien et qui les étudie de très près, je ne parviens jamais à les faire disparaître à ma guise (surtout dans le cas des tés). Elles disparaissent avant mon raisonnement2. »
Une telle combinaison, où le caractère dense de l’espace coloré tranche avec la légèreté des éléments supérieurs filiformes, est fréquente dans son travail. Déjà en 1970, notamment, T Milan (collection famille Soto, Museo de arte moderno Jesús Soto), sa première utilisation des tés associait compositions avec tés (verticaux et horizontaux) et carrés monochromes bleus. Mais la démonstration de ces années était toujours sobre, avec une présence des couleurs très limitée. Au début des années 1980, celles-ci prennent de l’importance et dynamisent l’œuvre : Soto les module en fonction des rapports de force existant entre elles, certaines semblant se rapprocher et d’autres s’éloigner du spectateur, supprimant ainsi l’impression de surface plane. Ce procédé aboutira en 1980 aux Ambivalences, auxquelles appartient Senegalés.
En regardant les Boogie Woogie de Mondrian, Soto avait constaté que l’interaction des bandes colorées produisait une sorte de vibration optique. Sortant des contraintes de la bidimensionnalité, il parvient alors, dans sa nouvelle série, à créer à partir de la couleur un effet de constant mouvement d’avancée ou de recul. Pour ce faire, il aligne ou disperse devant une surface tantôt rayée, tantôt unie, des carrés colorés de toutes tailles qui, lorsque l’on regarde l’œuvre de face, se lancent dans une « danse de rentrées ou de saillies imprévisible3. » L’harmonie n’a pas de place dans ce système, seules comptent « les combinaisons où la couleur a le plus de force vibratoire, et où l’ambiguïté spatiale qui résulte de ces superpositions est la plus évidente4 ». Pour la première fois, le mouvement n’est plus donné par le déplacement du spectateur, mais par l’illusion optique qu’engendre le jeu des éléments colorés. Dans Senegalés, l’effet de mouvement est en outre accentué par le contraste entre la partie supérieure noire tramée et la surface inférieure blanche et lisse.
Soto s’expliquera longuement sur le processus de création des œuvres de cette série : « Les Ambivalences ont été la solution que j’ai trouvée à un certain nombre de questions plus ou moins implicites dans le travail des grands artistes occidentaux depuis la fin du XIXe siècle, mais qui n’avaient pas été développées. Depuis les Fauves et les artistes comme Matisse, Léger, Delaunay ou les constructivistes russes, qui ont essayé d’utiliser la couleur indépendamment de la forme et du contenu extra-pictural, la puissance de la couleur se manifeste comme un médium ambigu, capable de générer l’illusion de l’espace – mais un espace optiquement variable, certains points semblant avancer et d’autres reculer. Plus tard, les artistes suisses et quelques Allemands, comme Josef Albers, ont posé l’indépendance de la couleur, mais sans résoudre consciemment ce problème que j’ai appelé “l’ambivalence spatiale de la couleur”. […] J’ai donc introduit la couleur, non pas dans son état vibratoire, comme je l’avais fait dans les années cinquante, mais dans un plan de couleur flottant sur la surface de l’œuvre, de sorte que [les couleurs] créent une chromodynamique entre elles. Il en résulte une ambiguïté évidente de la couleur dans l’espace, parce que si vous mettez un enfant devant ces œuvres, il verra des couleurs qui avancent tandis que d’autres semblent reculer5. »
La série des Ambivalences est une éclatante démonstration du renouvellement des potentialités dynamiques des derniers Mondrian.
Nathalie Ernoult
Notes :
1. Tres valores con violetta, 1979 (collection particulière) ; Tres blancas y color, 1980 (collection particulière).
2. Entretien avec Ariel Jiménez, 1982 (Archives Soto, Paris).
3. Ibid.
4. Ariel Jiménez, Conversaciones con Jesús Soto/Conversations with Jesús Soto, Caracas, Fundación Cisneros, 2005, p. 86. [Notre traduction].
5. Ibid., p. 120.
Source :
Extrait du catalogue Soto, Collection du Centre Pompidou - Musée national d'art moderne, Éditions du Centre Pompidou, Paris, 2013
Bibliography
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