Deux mineurs

Né à Bully-les-Mines (Pas-de-Calais), Édouard Pignon fut d’abord mineur puis ouvrier d’usine avant de se consacrer à la peinture. Manifestant des dons précoces pour le dessin, il s’installe à Paris, en 1927, et partage son temps entre l’apprentissage de la peinture en cours du soir et différents métiers industriels. En 1931, il rejoint l’Association des Écrivains et Artistes révolutionnaires (AEAR) et y côtoie Herbin, Hélion et Aragon, avant d’adhérer au parti communiste français en 1933.

 À partir de 1934, influencé par le cubisme de Fernand Léger, il expose ses premiers tableaux consacrés à des thèmes populaires et obtient le soutien d’André Lhote pour sa première exposition personnelle, galerie d’Anjou, en mars 1939. Cette reconnaissance lui vaut d’être invité à participer aux expositions organisées par la galerie Braun en 1941 (« Jeunes peintres de la tradition française », 10-31 mai) et par la galerie de France en 1943 (« Douze peintres d’aujourd’hui », 6 février-4 mars). Cofondateur du Salon de mai, en 1944, proche de Gaston Diehl et bientôt de Picasso, Pignon commence à travailler par séries sur le motif en alternant les séjours dans le Midi et le Nord de la France. La série « Ostende », entamée en 1947, le conduit à rompre avec les structures géométrisantes issues du cubisme. C’est au cours de ses séjours à Ostende que Pignon, retournant régulièrement dans sa famille à Marles-les-Mines, prend l’habitude de représenter des mineurs en multipliant dessins et études de gestes et d’expressions. Deux mineurs est présenté pour la première fois à la galerie de France dans l’exposition « Ostende et les mineurs », en 1949 (15 mars-18 avril). Les deux hommes peints dans les teintes d’Ostende (bleus, blancs, gris, noirs) portent encore la barrette de cuir bouilli caractéristique du costume du mineur. C’est pourtant davantage leur posture gauche et la rudesse de leurs physionomies qui intéressent Pignon. Magnifiés par la frontalité de la représentation, ce sont deux « fils du peuple » saisis dans leur fraîche vérité, tels que le PCF les exalte alors. Le tableau sera d’ailleurs offert par l’artiste à Maurice Thorez, également originaire du Pas-de-Calais, ancien employé d’une compagnie minière et secrétaire général du parti communiste français, de 1930 à 1964.

Jean-Paul Ameline,

Paul-Arnaud Parsy,

Paul-Hervé Parsy

Source :
Extrait du catalogue Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007