Peinture homéopathique n° 10 (Guerre désirée)
1983 - 1996
Peinture homéopathique n° 10 (Guerre désirée)
1983 - 1996
Conçues comme des amalgames où s'accumulent des écritures, des dessins et des photographies, les Peintures homéopathiques de Hyber fonctionnent sur la dynamique de l'hybridation.
Cette série d'œuvres constitue pour l'artiste un état des lieux de ses préoccupations, comme un gigantesque schéma mental qui tente de rendre compte de la complexité des problématiques actuelles. Dans cette Peinture homéopathique n° 10, des feuilles de papier de soie, qui évoque à la fois l'occultation et la transparence, homogénéisent la profusion des références, d'où surgit la formulation « guerre désirée», écho à des notions déjà explorées liées à l'urgence, telles la pollution ou la survie.
Domaine | Peinture |
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Technique | Mine graphite, fusain, crayon de couleur, résine, gouache, encre de Chine, acrylique, pastel, aquarelle, feutre, ruban adhésif, sur papiers, photocopie, photographies et papier de soie collés sur toile |
Dimensions | 225 x 450 cm |
Acquisition | Achat, 1996 |
N° d'inventaire | AM 1996-401 |
Informations détaillées
Artiste |
Fabrice Hyber
(1961, France) |
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Titre principal | Peinture homéopathique n° 10 (Guerre désirée) |
Date de création | 1983 - 1996 |
Domaine | Peinture |
Description | Diptyque |
Technique | Mine graphite, fusain, crayon de couleur, résine, gouache, encre de Chine, acrylique, pastel, aquarelle, feutre, ruban adhésif, sur papiers, photocopie, photographies et papier de soie collés sur toile |
Dimensions | 225 x 450 cm |
Acquisition | Achat, 1996 |
Secteur de collection | Arts Plastiques - Création contemporaine et prospective |
N° d'inventaire | AM 1996-401 |
Analyse
Considérée comme la base matricielle du travail de Fabrice Hyber, la vingtaine de « Peintures homéopathiques » réalisées par l’artiste à partir de 1988 associent et condensent des informations issues d’un grand nombre de ses écrits, dessins et tableaux dans un remontage global de son œuvre (d’où leur datation particulière, qui inclut celle des éléments les plus anciens). Hyber considère ces ensembles comme le résultat d’un processus de sédimentation, la « digestion de données » retraçant les parcours aléatoires du cheminement de sa pensée. En effet, il décrit sa production comme un gigantesque rhizome qui se développe en fonction d’un système d’échanges et d’associations né des mutations constantes opérées par son esprit. Ses dessins et tableaux sont des éléments primordiaux dans ce processus créatif. Leur rapidité et leur liberté d’exécution permettent des glissements constants, des corrections et des analogies – autant de potentiels de transformation pour d’autres œuvres. La réflexion est ici perçue comme intrinsèquement liée au fonctionnement physiologique du corps, l’idée d’homéopathie renvoyant à la distillation d’immenses masses d’informations. Dans Peinture homéopathique n° 10 (Guerre désirée) , une apparence hybride, fragmentée, non définie, est proposée comme alternative aux discours fondamentalistes de certains groupes ethniques ou religieux du monde actuel. Des slogans tels que « guerre désirée » ou « plus de transparence possible » sont répartis sur la surface de la toile, provoquant un sentiment d’urgence et d’insécurité. Sans prétendre offrir de solution, ce tableau propose une « géographie montée pour la contemplation » qui bouscule les philosophies existantes pour générer de nouveaux modes de pensée.
Anna Hiddleston
Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007
Analyse
L’œuvre de Fabrice Hyber, l’une des plus singulières apparues en France au milieu des années 1980, est constituée d’un ensemble de dessins, peintures, vidéos, installations, dont le montage met chaque fois à nu la prolifération de la pensée, l’éventail des possibilités d’intervention sur la forme et les comportements. Cette diversité révèle la multiplicité des références et des savoirs auxquels fait appel l’artiste pour mieux coller à la réalité plurielle des faits. Sous l’habit du Contorsionniste [1989], Hyber défait les idées reçues, croise les techniques et les disciplines (artisanat, physique, parapsychologie, astronomie, chirurgie…) afin de répondre aux nouveaux modes de résolution des conflits, à la mobilité croissante des réponses géopolitiques et économiques.
C’est dans la vingtaine de Peintures homéopathiques , à partir de 1986, qu’il met en place sa recherche sur l’origine des formes et des échanges. Conçues comme des amalgames où s’accumulent des écritures, des dessins et des photographies de différentes dates et origines, ces « peintures » fonctionnent sur l’hybridation et les jeux d’association. Dans la rencontre des images et des mots se forme un récit susceptible, à terme, de générer un projet d’entreprise, opération de « digestion » qui adopte le tracé aléatoire du cheminement de la pensée. Le corps y prend une part décisive (surtout les parties du corps qui communiquent avec le monde, les orifices en particulier), augmentée par des effets de grossissement : la résine fait ici office de loupe, pour mieux faire apparaître le désordre des dessins, dont l’assemblage permet toutes les dérives (enflures, greffes, prothèses…). La forme n’est pour Hyber qu’une suite d’arrangements, de modifications physiques élémentaires ; elle est ouverte à des évolutions impromptues, accidentelles, qui s’illustrent dans les diverses sédimentations de couches à la surface de la toile (résine soufflée, saillie de papiers, entailles…).
Dans Peinture homéopathique n° 10 (Guerre désirée) , assemblage de feuilles dessinées, photocopies et photographies collées sur toile, l’artiste pose la question de la gestion des conflits géopolitiques. Les groupes ethniques et religieux ont élaboré des récits fondateurs trop fermés (générateurs de guerres fratricides et génocides à grande échelle) auxquels l’artiste oppose ici des « larves » de solutions plus partielles, évolutives, non définitives. Pour cela, le dessin, aléatoire, hybride, est lui-même le lieu du renversement et de la transgression. La rapidité d’exécution favorise l’apparition, le glissement, la fuite d’idées non contrôlées. C’est ainsi qu’à partir de 1987 apparaissent dans des dessins de petits formats de curieux personnages mis en situation de veille – un Pêcheur , un Chasseur , un Maçon , voire même un Éplucheur de pommes de terre – ayant pour point commun une activité ne nécessitant pas une attention exclusive. Derrière la relative nonchalance de leur activité, ils constituent pour l’artiste le modèle d’un suspens créatif entre l’action et l’intention, donnant libre cours au désir de transformation du monde.
Autre métaphore de ces nouveaux modes de circulation de la pensée, celle des cerveaux-intestins. Dans Digestion [1991], Hyber décline l’analogie formelle entre les méandres du cortex cérébral et ceux des viscères, cherchant à mettre en évidence les liens physiologiques entre le corps et la pensée : le cerveau est un circuit de « digestion des données » où se décline ce que l’artiste appelle lui-même le « matérialisme érotique », à mi-chemin entre poétique somnambule de la pensée et diététique corporelle.
Pascal Rousseau
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
Bibliographie
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Peintures / Malerei : Berlin : Martin-Gropius-Bau, 2006 (cit. et repr. coul.)
Collection art contemporain : Paris, Musée national d''art moderne, sous la dir. de Sophie Duplaix. - Paris : Centre Pompidou, 2007 (cit. et repr. coul. p. 223) . N° isbn 978-2-84426-324-7
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Collection Art graphique : [Catalogue de] La collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne - Centre de création industrielle. - Paris : éd. Centre Pompidou, 2008 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle) (cit. et reprod. coul. p. 462-463) . N° isbn 978-2-84426-371-1
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Fabrice Hyber : Essentiel Peintures homéopathiques : Saint-Paul de Vence, Fondation Maeght, 6 octobre 2012-6 janvier 2013 (repr. coul. p. 64-65) . N° isbn 978-2-900923-56-6
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Une histoire. Art, architecture, design, des années 1980 à nos jours / sous la dir. de Christine Macel. - Paris : Ed. du Centre Pompidou; Flammarion, 2014 (Cit. et reprod. coul. p. 146) . N° isbn 978-2-84426-691-0
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The Shape of Time : Shanghaï, West Bund Museum, novembre 2019-mai 2021. -Shanghaï / Paris : West Bund Museum / Centre Pompidou, 2019 (cit. et reprod. coul. p. 248, cit. p. 249) . N° isbn 978-7-5586-1460-6
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