Enchevêtrement
[1941]
Enchevêtrement
[1941]
Domaine | Dessin |
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Technique | Détrempe et gouache sur carton |
Dimensions | 40,7 x 32,7 cm |
Acquisition | Donation de Mme Rose Masson, 1983 |
N° d'inventaire | AM 1982-194 |
Informations détaillées
Artiste |
André Masson
(1896, France - 1987, France) |
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Titre principal | Enchevêtrement |
Date de création | [1941] |
Domaine | Dessin |
Technique | Détrempe et gouache sur carton |
Dimensions | 40,7 x 32,7 cm |
Inscriptions | Signé en bas à gauche : andré Masson. Non daté |
Acquisition | Donation de Mme Rose Masson, 1983 |
Secteur de collection | Cabinet d'art graphique |
N° d'inventaire | AM 1982-194 |
Analyse
Masson quitte la France le 31 mars 1941 et, après un passage en Martinique, s’installe aux États-Unis, dans le Connecticut, jusqu’à la fin de la guerre. Selon ses dires, Enchevêtrement est la troisième œuvre exécutée sur cette terre d’exil, peu après son débarquement à New York ; elle fut réalisée sur l’un des panneaux de carton entre lesquels il avait placé ses dessins pendant le voyage. Relevant davantage de la peinture que du dessin, elle semble rompre avec la figuration métaphysique de ses travaux précédents ; une écriture graphique de rythmes colorés apparemment abstraits s’y déploie, dont la source principale doit être recherchée dans la calligraphie extrême-orientale : « rythme d’écriture », « tempête de signes », comme le dira plus tard l’artiste, qui mêle des nuées d’accents de peinture au pinceau, dans une tonalité dominante vert-rouge, à quelques effets de giclures et d’aplats achevant de conférer à l’ensemble sa complexité virtuose, comme haletante.
La rupture est pourtant moins nette qu’il n’y paraît avec les œuvres dites « surréalistes » des années antérieures. Enchevêtrement procède des dessins et peintures automatiques du milieu des années 1920 et conduit aux dessins calligraphiques à l’encre et au roseau de la période américaine ; comme eux, la petite gouache incarne une esthétique héraclitéenne qui fait du peintre – ce seront ses mots – « l’affirmateur du mouvant, de l’éphémère » : « je désirai », écrit-il en 1942 pour caractériser sa vocation, « n’être pas plus que l’essence du mouvement à la naissance des choses ». Par ailleurs, William Rubin a souligné que l’horizon mythologique, même peu lisible, n’était pas absent des intentions du peintre : en l’occurrence, le thème serait le corps d’Achille déchiqueté par les chiens de Penthésilée, reine des Amazones, épisode tiré du drame romantique de Heinrich von Kleist Penthésilée (1808) ; ce qu’on peut considérer comme une main, dans l’angle supérieur gauche, serait un des signes de cette rémanence de la peinture-poésie chère au Masson surréaliste.
L’alliance de la gestualité abstraite et de l’horizon mythologique conduit naturellement à poser la question de l’influence d’André Masson sur l’expressionnisme abstrait américain, et en particulier sur le jeune Jackson Pollock au début des années 1940. Clement Greenberg y a répondu dès 1953 en estimant que la présence de Masson aux États-Unis fut pour ces jeunes peintres « d’un bénéfice inestimable », et que lui, « plus que tout autre, préfigura la nouvelle peinture abstraite ». Depuis, le débat n’a plus cessé, parmi les historiens de l’art, pour mesurer le degré de cette influence et discuter des rapprochements comme des différences entre les deux peintures.
Rémi Labrusse
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008