Opalka 1965/1 à l'infini, détail 3666937-3669842
Opalka 1965/1 à l'infini, détail 3666937-3669842
Domaine | Dessin |
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Technique | Encre de Chine sur papier sous coffret de plexiglas |
Dimensions | 33,9 x 24,8 x 2,6 cm |
Acquisition | Don de l'artiste, 1985 |
N° d'inventaire | AM 1985-87 |
Informations détaillées
Artiste |
Roman Opalka
(1931, France - 2011, Italie) |
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Titre principal | Opalka 1965/1 à l'infini, détail 3666937-3669842 |
Domaine | Dessin |
Technique | Encre de Chine sur papier sous coffret de plexiglas |
Dimensions | 33,9 x 24,8 x 2,6 cm |
Inscriptions | Signé et titré au revers au crayon : OPALKA 1965/1-infini / DETAIL 3666937-3669842 |
Acquisition | Don de l'artiste, 1985 |
Secteur de collection | Cabinet d'art graphique |
N° d'inventaire | AM 1985-87 |
Analyse
L’année 1965 est fondamentale pour Opalka, qui décide alors de son « projet de vie » et, selon Shapiro, de sa « conversion à l’infini ».
Après des débuts comme lithographe-dessinateur – il ne tarde pas à choisir des formes abstraites, points et lignes, pour des projets sur tissu –, il aborde, dans les années 1950, la question cruciale « comment construire un tableau ? », à laquelle seule l’étude de Malevitch apporte quelque réponse. Il s’interroge également, à travers ses lectures de Proust et de Joyce, sur le temps, la « durée vécue » de Bergson, qu’il tente de décrire ; à cet égard, il n’est pas éloigné des préoccupations des artistes des années 1960, ceux de l’Arte povera ou de Fluxus, qui veulent intégrer la vie à l’art. Il réalise alors, en utilisant le principe de la clepsydre, qui représente le temps écoulé, mais « à la manière d’un peintre » – sous forme d’une succession de points –, une série de Chronomes (1960-1963), dont le sous-titre pourrait être « 37 ou 52 heures de travail ». Mais un doute subsiste quant à l’achèvement du tableau, qui l’amène à opter pour un concept d’une rigueur radicale. En 1965, Opalka décide de traduire les points des Chronomes en nombres, afin d’établir une structure logique du tableau, « comme chez Pythagore ». Il réalise son premier Détail, où il applique la règle qu’il s’impose : partir du nombre 1 en haut à gauche de la toile et inscrire, à l’aide d’un pinceau très fin (nº 0), à la peinture blanche sur un fond noir, la succession des nombres jusqu’au bas droit, de façon que la surface soit entièrement couverte, puis continuer le comptage sur la toile suivante (le format des peintures étant invariablement de 196 x 135 cm). Auparavant, éclaircir le fond de chaque toile par rapport au précédent en y ajoutant 1 % de blanc, et ce jusqu’à l’infini ou, plus exactement, jusqu’à la mort de l’artiste. Ainsi « chaque Détail enregistre sans faille la réalité du temps et de la vie ».
Pour parfaire son concept, Opalka pratique, depuis 1972, un rituel d’achèvement de chaque toile : il se photographie devant elle, de face, toujours dans la même tenue, et s’enregistre en lisant à haute voix la suite des chiffres inscrits, telle une litanie. L’écoulement du temps est alors doublement fixé : par la suite des nombres et par le vieillissement du sujet. Cette attitude contemplative et quasi mystique est celle d’un artiste assumant la confrontation entre sa condition de peintre et la pensée d’une crise de la peinture.
Nomade, Opalka imagine de continuer son comptage sur des « cartes de voyage » – feuilles de papier de 32,5 x 23,8 cm –, en utilisant une plume pour rapidographe nº 2 et de l’encre de Chine. Sur les trois que possède le Musée se succèdent 6 390 chiffres. Dès lors, dans la suite des nombres tracés, les feuilles s’intercalent entre les peintures : l’écoulement du temps est ainsi méthodiquement enregistré, sans rupture, dans le vécu d’une existence ouverte jusqu’à sa fin. L’ultime Détail, même s’il ne peut être « achevé », sera le seul tableau à conduire le concept à sa perfection, vers le « blanc mental » : blanc sur blanc, tableau fantôme.
Nadine Pouillon
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
Bibliographie
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