Standing, Side View, Three Panels : n°1

Après avoir réalisé en 1979 ses premières photographies – des images en plan rapproché de ses mains et de ses pieds –, John Coplans entame en 1988 (à 68 ans) une série de nus, des autoportraits, qu’il continuera jusque dans ses derniers travaux. Toutes les photographies ont en commun d’être tirées en noir et blanc et de ne jamais montrer le visage, ni même la tête de celui qui est photographié. Toutes frappent immédiatement par la matérialité et la frontalité de leur sujet : le corps d’un monsieur âgé, ne cachant aucunement son vieillissement, mais n’en faisant pas non plus état pour choquer ou par exhibitionnisme. Il s’agit d’atteindre à travers les formes et les figures de ce corps singulier l’image la plus générique du corps humain. Par-delà le fait qu’il s’agisse d’un homme, blanc, âgé, c’est bien le caractère du genre humain même qui est visé, tant dans ses références à la peinture, à la sculpture ou, bien entendu, à la photographie, que dans la matérialité de la chair. Les poses et attitudes que prend Coplans devant l’objectif réactualisent ainsi en partie une longue tradition d’images tirées de l’histoire de l’art, mais sans les imiter, et sollicitent nos réactions et nos visions actuelles vis-à-vis de corps que nous n’acceptons généralement pas lorsqu’ils sont perçus de la sorte. Sans doute pouvons-nous y voir la déchéance, la décrépitude, la lente progression vers la mort, mais il faut aussi y discerner un travail plastique sur les formes, sur leur mise en scène ; autant de scénographies de soi et de l’autre que Coplans a développées dans ses œuvres.

Jacinto Lageira

Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007