Fétiche Yombe ou Woyo
[fin XIXe siècle - 1ère décade XXe siècle]
Fétiche Yombe ou Woyo
[fin XIXe siècle - 1ère décade XXe siècle]
Les fameux « fétiches à clous » de l’aire culturelle kongo, au niveau de l’embouchure du fleuve Zaïre, ont focalisé l’attention, depuis les premiers missionnaires aux collectionneurs. Ces objets magiques à l’attitude vindicative, hérissés de clous et de lames de fer, sont porteurs d’amalgames mystérieux. Ils étaient des instruments de paix, des chasseurs de sorciers, utilisés dans un but de guérison et de résolution des problèmes. Cette statue a appartenu à Guillaume Apollinaire, grand collectionneur d’art « nègre » comme ses amis cubistes, Braque et Picasso. Le poète saluait dans les arts primitifs « un renouvellement général de l’esthétique ».
Domaine | Sculpture |
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Technique | Bois, clous, fragments métalliques, chaînette, traces de polychromie |
Dimensions | 97,5 x 47 x 28 cm |
Acquisition | Achat grâce à un don de Jean Alvarez de Toledo 1986 |
N° d'inventaire | AM 1986-78 |
En salle :
Informations détaillées
Artiste | Anonyme (Afrique, Zaïre) |
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Titre principal | Fétiche Yombe ou Woyo |
Autre titre | Statue nkisi nkonde, yombé |
Titre attribué | Figure Nkondé |
Date de création | [fin XIXe siècle - 1ère décade XXe siècle] |
Domaine | Sculpture |
Description | Fétiche à clou. La position des bras le long du corps est rare, usuellement ces statues ont au moins un bras dressé. A l'origine, il portait une barbe postiche et ses yeux étaient incrustés de fragments de miroir ou de faïence |
Technique | Bois, clous, fragments métalliques, chaînette, traces de polychromie |
Dimensions | 97,5 x 47 x 28 cm |
Notes | Autour du cou, la chaînette porte une pièce de 10 centimes de 1932 (sur ce problème des ajouts, voir Francine Ndiaye dans cat. expo. "Guillaume Apollinaire, critique d'art", Paris, Pavillon des arts, 1993, p. 235) |
Acquisition | Achat grâce à un don de Jean Alvarez de Toledo 1986 |
Secteur de collection | Arts Plastiques - Moderne |
N° d'inventaire | AM 1986-78 |
Analyse
Les fameux « fétiches à clous » de l’aire culturelle kongo, au niveau de l’embouchure du fleuve Zaïre, ont toujours focalisé l’attention : des missionnaires aux collectionneurs, ces objets magiques à l’attitude vindicative, hérissés de clous et de lames de fer, porteurs d’amalgames mystérieux, ont stimulé l’imagination. Diabolisés à cause de leur esthétique ambiguë, ils ont été détruits par autodafés dès la fin du XVe siècle, au moment de la première évangélisation du royaume kongo, à la suite de la conversion de son souverain Afonso Ier. Les grands « fétiches », ainsi que les dénommèrent les Portugais, ne furent pas reconnus comme des instruments de paix sociale mais comme des images inquiétantes, des supports de sorcellerie. C’était une véritable méprise puisque le nkisi est, au contraire, un infatigable chasseur de sorciers, manipulé dans un but de guérison et de résolution des problèmes. Son attitude de lutteur, mains aux hanches, jambes bien campées, la bouche ouverte sur un flot d’invectives et d’incantations, affirme sa fonction de justicier. Il pourchasse les malveillants et les fauteurs de troubles qui agissent au niveau naturel et surnaturel. Les lames de fer insérées par le nganga, spécialiste en rituels, attestent ses nombreuses missions : chaque insertion le met en alerte et mobilise tous ses pouvoirs de transgresseur des frontières. Sur l’abdomen, la charge magique contenant les substances qui l’activent est fermée par un miroir, dont les propriétés réfléchissantes aident le devin à voir au-delà des apparences.
La statue a appartenu à Guillaume Apollinaire, grand collectionneur d’art « nègre » comme ses amis cubistes, Braque et Picasso. Selon Rubin, il aurait commencé ses achats en 1910 chez Joseph Brummer à Paris. Fervent défenseur des « arts nègres », le poète qui, dans Zone, évoquait ses « fétiches d’Océanie et de Guinée » et saluait dans les arts primitifs « un renouvellement général de l’esthétique » (La Sculpture d’aujourd’hui, 1913), conservait son fétiche à clous en bonne place dans sa fameuse bibliothèque où René-Jacques la photographia après sa mort. Apollinaire communiqua également sa passion au célèbre marchand collectionneur de l’entre-deux guerres, Paul Guillaume, dont il préfaça l’album de photographies, Sculptures nègres, paru en 1917.
Hélène Joubert
Source :
Extrait du catalogue Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007
Bibliographie
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Guillaume Apollinaire 1880-1918, Apollinaire, ses livres, ses amis : Paris, Mairie de Paris, 1991 (cat. n° 271)
Apollinaire critique d''art : Paris, Pavillon des arts, 4 février-9 mai 1993 .- Paris : Paris-Musées/Gallimard, 1993 (Ndiaye (Francine).- "Guillaume Apollinaire, Paul Guillaume et l''art "nègre": défense et illustration", cat. n° 5 reprod. coul. p. 229)
Le Cubisme : Paris, Centre Pompidou, 17 octobre 2018-25 février 2019 (sous la dir. de Brigitte Leal, Christian Briend et Ariane Coulondre) (cit. p. 23, 306 et reprod. coul. p. 23) . N° isbn 978-2-84426-826-6
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La Révolution cubiste. Exposition de la collection du Centre Pompidou : Tokyo, Musée national d''art occidental, 3 octobre 2023-28 janvier 2024. - Tokyo / Paris : Musée national d''art occidental / Centrepompidou, 2023 (cat. n° 11 reprod. coul. p. 36, reprod. p. 37) . N° isbn 978-4-907243-26-5
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Chaosmose : Fonds de dotation Jean-Jacques Lebel / Musée national d''art moderne : Paris, Centre Pompidou, 16 octobre 2024 - 3 février 2025. - Paris : Editions du Centre Pompidou, 2024 (reprod. coul. p. 24) . N° isbn 978-38654-000-4
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