Prix international de littérature Bernard Heidsieck–Centre Pompidou
Créé en 2017 en hommage au poète Bernard Heidsieck, le prix international de littérature Bernard Heidsieck–Centre Pompidou met à l’honneur d'autres modalités de création et de diffusion de la littérature que le livre : poésie sonore, performance, conférence performée, lecture, film-poème, création radiophonique, littérature exposée, création numérique, etc. Singulier dans le monde des prix littéraires, il entend récompenser les meilleurs auteurs et auteures et les meilleures œuvres dans ce domaine élargi de la littérature.
- Le prix d’honneur récompense un auteur pour l’aspect remarquable de l’ensemble de son œuvre.
- Le prix de l'année distingue un auteur pour sa création littéraire hors du livre.
2023
Les lauréats
- Prix d’honneur : Jiří Valoch
- Prix de l'année 2023 : Charles Pennequin
Le jury
Président :
Frederic Acquaviva, artiste sonore et compositeur, spécialiste des avant-gardes littéraires du 20e siècle
Membres permanents :
Nathalie Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck
Michaël Batalla, directeur du Centre international de poésie Marseille (CipM)
Hubertus von Amelunxen, directeur de Archivio Conz
Membres permanents Centre Pompidou :
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival « Extra! »
Mica Gherghescu, responsable du Pôle recherche et programmation scientifique, Bibliothèque Kandinsky
Membres du jury 2023 :
Thomas Millroth, écrivain et critique d'art
Cia Rinne, poétesse
Jiří Valoch
1946, Tchécoslovaquie
Jiří Valoch est un artiste, conservateur, collectionneur et l’un des plus importants donateurs de l’histoire de l’art contemporain tchèque. Depuis 1964, il crée de la poésie visuelle et conceptuelle, des concepts photographiques, des installations textuelles et des dessins conceptuels.
En lui remettant le prix d’honneur, le jury affirme l’importance de cette œuvre de poésie visuelle et conceptuelle qui s’est construite dès le milieu des années 1960 dans une Tchécoslovaquie alors sous l’emprise du régime communiste, en marge des réseaux européens et new yorkais de l’art conceptuel dont il fait pourtant pleinement partie – et souhaite contribuer à élargir sa reconnaissance internationale.
Charles Pennequin
1965, France
Charles Pennequin est né au 20e siècle dans les Haut-de-France et publie, depuis les années 1990, essentiellement de la poésie. Il a effectué de nombreuses performances en France et à l’étranger (pays européens, Afrique, Russie, Asie) et participé à de nombreuses revues de poésie (Nioques, Poezi proleter, Facial, Java, Ouste, TXT…). Il a principalement publié ses livres aux éditions P.O.L. Son dernier ouvrage Petite bande (P.O.L, mai 2023) regroupe des poèmes et des dessins.
Le prix littéraire 2023 entend récompenser l’œuvre d’une figure et d’une voix singulière, éructive, vociférante du paysage littéraire français et international, auteur d’une œuvre ouverte à de multiples formes (textes, lectures, performances publiques, dessins, etc.) Une création littéraire qui ne doit rien aux effets de mode, mais tout à l’entêtement compulsif de la création.
2022
Les lauréats
- Prix d’honneur : Esther Ferrer
- Prix de l'année 2022 : Anne-James Chaton
Le jury
Président :
Joël Hubaut, artiste, performeur et poète
Membres permanents :
Emmanuelle Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck, écrivaine
Michaël Batalla, directeur du Centre international de poésie Marseille (CipM)
Membres permanents Centre Pompidou :
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival « Extra! »
Mica Gherghescu, responsable du Pôle recherche et programmation scientifique, Bibliothèque Kandinsky
Membres du jury 2022 :
Jean-Michel Espitallier, écrivain
Paul Bernard, conservateur au Musée d'art moderne et contemporain de Genève (Mamco), en charge notamment du cabinet de poésie concrète
Éric Loret, journaliste à Libération
Anne-Christine Royère, universitaire
Sylvie Zavatta, directrice du Frac Franche-Comté – jury invité du président
Laure Limongi, écrivaine
Cia Rinne, écrivaine – jury invité par l’Archivio Conz, Berlin
Esther Ferrer
1937, Espagne
Née en 1937 à San Sebastián (Espagne) et vivant à Paris depuis le début des années 1970, Esther Ferrer est une figure majeure de l’art des cinquante dernières années, pionnière de l’art action et de la performance.
Ce prix d’honneur vient récompenser l’attachement profond d’Esther Ferrer au langage, à la parole autant qu’à une poésie du geste et de l’action qui l’a rendue toujours présente dans le monde de la poésie sonore ou performée. En 1967, elle rejoint le groupe Zaj composé de Walter Marchetti et Juan Hidalgo. À l’origine de nombreux concerts, actions, publications et installations, leur art, influencé par John Cage et Marcel Duchamp, est fondé sur des gestes minimalistes et des objets ordinaires. Dès 1967, Esther Ferrer est invitée aux plus prestigieux festivals pour ses performances en temps réel mais non improvisées. Elle écrit des textes, telles des partitions avec notes et dessins ; ses gestes mesurés s’organisent de façon musicale et poétique. À partir des années 1970, elle développe également une pratique photographique et du dessin. Elle réalise des toiles assurant ainsi une continuité entre ses performances et son travail plastique. Pour Esther Ferrer l’art est politique en tant que lieu de l’affirmation, de la construction du sujet, l’endroit de la liberté face aux diktats de toutes sortes.
Esther Ferrer a représenté l’Espagne à la Biennale de Venise en 1999.
Anne-James Chaton
1970, France
Né en 1970 à Besançon, l’écrivain, performeur et artiste Anne-James Chaton a développé une œuvre multipolaire, fondée sur une étude continue des matériaux textuels qui rythment le quotidien des sociétés contemporaines. Cette littérature « pauvre », fabriquée au jour le jour par une multitude de machines – tickets de caisse, billets d’entrée de musée, prospectus, cartes de visite, de crédit, d’abonnement, etc. – constitue la matière de son travail textuel, sonore et visuel.
La dimension plurielle et polyglotte de son œuvre l’a conduit à développer des projets avec des artistes d’autres scènes et d’autres langues. Il a créé des pièces avec Phia Ménard, Sylvain Prunenec, Valeria Giuga, et a écrit de nombreux albums avec le guitariste Andy Moor (The Ex), le musicien allemand Carsten Nicolaï aka Alva Noto et le membre de Sonic Youth, Thurston Moore. Ses livres sont publiés en France par les éditions P.O.L. et ses compositions sonores paraissent sur le label allemand Noton. Anne-James Chaton a été pensionnaire de la Villa Médicis, Académie de France à Rome en 2020.
Le jury a voulu récompenser la très grande cohérence de l’œuvre littéraire d’Anne-James Chaton, par-delà les formes multiples et souvent originales qui se trouvent investies, et a souligné la force conceptuelle de ses travaux d’écriture, reconnus en France comme à l’étranger. A également été relevé la grande continuité, voire la filiation avec la figure et l’œuvre du poète et performeur Bernard Heidsieck.
2021
Les lauréats
- Prix d’honneur : Katalin Ladik
- Prix de l'année 2021 : Nora Turato
- Mention spéciale Fondazione Bonotto : Fernando Aguiar
Le jury
Président :
Maurizio Nannucci, artiste
Membres permanents :
Nathalie Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck
Patrizio Peterlini, Fondazione Bonotto, mécène du Prix Bernard Heidsieck–Centre Pompidou
Membres permanents Centre Pompidou :
Bernard Blistène, directeur du Musée national d’art moderne
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival « Extra! »
Mathieu Potte-Bonneville, directeur du Département culture et création
Mica Gherghescu, responsable du Pôle recherche et programmation scientifique, Bibliothèque Kandinsky
Membres du jury 2021 :
Valérie Mréjen, artiste
Magali Nachtergael, universitaire
Philippe Broutin, écrivain
Martina Corgnati, critique d'art
Michaël Batalla, directeur du Centre international de poésie Marseille (CipM)
Andrea Bellini, directeur du Centre d’art contemporain de Genève
Katalin Ladik
1942, Serbie
Poète, actrice et artiste de performance, Katalin Ladik est l'une des plus éminentes représentantes de l'art expérimental en ex-Yougoslavie et en Hongrie et l'une des artistes féminines les plus influentes de ces dernières décennies.
Diplômée de l'école supérieure d'économie de Novi Sad en 1961 Katalin Ladik a poursuivi ses études à l'école supérieure d'économie en 1960-1962. Elle a étudié le théâtre au Drama Studio de Novi Sad de 1964 à 1966. Elle a commencé sa carrière littéraire en 1962 alors qu'elle travaillait comme assistante de banque. De 1963 à 1977, elle travaille à Radio Novi Sad et rejoint le Théâtre de Novi Sad en 1972. Elle a étendu son activité d'actrice au cinéma et à la télévision. Elle a été rédactrice de poésie pour les magazines littéraires Élet és Irodalom (1993-94) et Cigányfúró (1994-99), et a été professeur au centre d'éducation musicale et théâtrale Hangár (1993-98). Elle s'est installée à Budapest en 1992 et, au cours des 20 dernières années, elle a vécu et travaillé alternativement à Novi Sad, à Budapest et sur l'île de Hvar.
Parallèlement à ses poèmes écrits, elle s'engage dans la poésie sonore et la poésie visuelle, la musique expérimentale et les pièces audio, les actions, les performances, l'art postal et le collage. Elle se produit et expose son travail dans des lieux et des événements artistiques internationaux de premier plan, dont la « documenta 14 » en 2017.
Katalin Ladik a reçu de nombreux prix, tels que le prix Kassák Lajos (1991), le prix Mediawave Parallel Culture (2003), le prix national de la culture de la République de Serbie (2009), le prix Laurel Wreath de Hongrie (2012) et la prestigieuse bourse Lennon Ono pour la paix en 2016, aux côtés d'Olafur Eliasson, d'Anish Kapoor et d'Ai Weiwei.
Nora Turato
1991, Croatie
Le langage est au cœur même de la pratique de Nora Turato. Dans son travail, elle traduit les informations absorbées par sa consommation quotidienne d'articles, de conversations, de sous-titres et de slogans publicitaires en scripts linguistiques et visuels pour des vidéos, des installations, des livres d'artiste, des peintures murales et des performances orales. Tout ce qui l'entoure se retrouve dans son travail. De cette manière, elle est démocratique ; les déclarations politiques fusionnent avec les citations des Kardashian dans la même mesure, révélant des synchronismes subtils dans les relations sociales, les stratégies de marketing, le comportement des consommateurs et leur propre subjectivité.
En plus de la typographie audacieuse qui caractérise son style, l'écriture personnelle de Turato apparaît souvent en script tentaculaire sur ses œuvres, faisant allusion à un attachement sentimental au carnet de l'artiste ou aux moments privés de répétition avant une performance.
Avec l'omniprésence de la correspondance numérique, elle immortalise un moyen de communication qui menace de se dissiper. Turato canalise l'hystérie textuelle émise par nos smartphones pour accentuer la volatilité du langage lorsqu'il est sorti de son contexte. Son œuvre est le reflet d'une époque où le langage est dissocié de sa fonction informative et où les mots sont vidés de leur sens.
Fernando Aguiar
1956, Portugal
Poète et performeur, Fernando Aguiar est le poète expérimental portugais le plus apprécié.
Ses actions tiennent à la fois de la poésie visuelle – puisqu’elles se basent sur un ordonnancement spatial des lettres et des mots – et de la performance, par le jeu du corps et par l’importance qu’il prend dans le dévoilement graduel du sens. Ses performances poétiques sont caractérisées par une construction méthodique et sémantique à travers le mouvement, les objets, le son, les éclairages, les lettres et les mots, où tous les signes visuels et linguistiques sont esthétiquement rendus possibles pour créer un nouveau langage poétique.
Depuis 1983 il a participé à environ 80 festivals internationaux de poésie à travers le monde. Il a également organisé diverses expositions de poésie visuelle, au Portugal, mais aussi en France, en Italie et au Brésil.
En 1987, il a organisé le premier festival de poésie en direct au Portugal, auquel Bernard Heidsieck a participé.
2020
Les lauréats
- Prix d’honneur : Gerhard Rühm
- Prix de l'année 2020 : Kinga Toth
- Mention spéciale Fondazione Bonotto : Richard Kostelanetz
Le jury
Président :
Jacques Donguy, critique d’art, poète et traducteur
Membres permanents :
Emmanuelle Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck
Patrizio Peterlini, Fondazione Bonotto, mécène du Prix Bernard Heidsieck–Centre Pompidou
Membres permanents Centre Pompidou :
Bernard Blistène, directeur du Musée national d’art moderne
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival « Extra! »
Mathieu Potte-Bonneville, directeur du Département culture et création
Membres du jury 2020 :
Thu-Van Tran, artiste
Sally Bonn, universitaire, co-responsable de la revue N/Z
Martina Corgnati, universitaire
Paul Bernard, conservateur au Musée d'art moderne et contemporain de Genève (Mamco), en charge notamment du cabinet de poésie concrète
Michaël Batalla, directeur du Centre international de poésie Marseille (CipM)
Fabrice Thumerel, critique littéraire, co-directeur de libr-critique
Mica Gherghescu, responsable du Pôle recherche et programmation scientifique, Bibliothèque Kandinsky
Gerhard Rühm
1930, Autriche
Gerhard Rühm est écrivain, poète sonore, plasticien, compositeur, auteur de théâtre, éditeur, et une figure majeure de la poésie expérimentale.
Après des études musicales à la National Academy of Music de Vienne, Rühm est l’un des fondateurs du « Wiener Gruppe » considéré comme le premier mouvement d’avant-garde autrichien, précurseur de l’actionnisme viennois.
Rühm appartient aux classiques de la littérature allemande moderne, dont il élargit les frontières en direction des arts visuels et de la musique, introduisant des notions telles que « musique visuelle », « poésie sonore », « dessin gestuel ». Son œuvre visuelle, vaste et variée, influencée par l’expressionisme et Dada, intègre souvent des matériaux issus de la vie quotidienne, recadrés et restructurés dans des compositions complexes. Sa production artistique est inspirée par Kurt Schwitters ou Gertrude Stein. Ses travaux sont souvent situés à la frontière entre la musique, la langue, les gestes et le visuel. Ses œuvres sonores sont des exemples remarquables de pièces radiophoniques innovantes.
Son travail a été reconnu par de nombreux prix et distinctions. Depuis 1978, il est membre de la Freie Akademie der Künste à Hambourg. Il reçoit en 2009 le Prix de poésie Alice Salomon (Berlin), et en 2010 un doctorat honorifique de l‘Université de Cologne.
Kinga Toth
1983, Hongrie
Poète, performeuse et artiste, Kinga Toth écrit et publie des nouvelles, des poèmes et des pièces de théâtre en hongrois, en allemand et en anglais. Musicienne, chanteuse, poète visuelle et sonore, elle présente son travail dans des performances, des expositions et des installations internationales. L’œuvre de Kinga Toth résonne profondément avec le monde contemporain et ses problématiques, notamment technologiques.
Parmi ses publications internationales, citons PARTY (Prae, 2013 ; Birds Lcc, USA, 2018), All Machine (2014) et Allmaschine (Akademie Schloss Solitude, 2014), Village 0-24 (Melting Books, 2016), Wir bauen eine Stadt (Parasitenpresse, 2016), et un catalogue d’art visuel : Textbilder (Gedok, 2016-2017).
Son roman The Moonlight Faces (The Lost Words Verlag, 2017 ; Magvető, 2017) a remporté le prix Hazai Attila en Hongrie.
Richard Kostelanetz
1940, États-Unis
Poète, écrivain, artiste américain d’avant-garde, critique et conservateur, Richard Kostelanetz est né à New York en 1940.
Avec sa production littéraire et sa poésie visuelle, il introduit de nouveaux codes grammaticaux et expressifs qui ont été définis dans les années 60 comme « radicaux et intolérants ».
Célèbre pour sa prose, ses nouvelles et sa contribution historique à la poésie visuelle, Richard Kostelanetz utilise des dispositifs tels que les connexions linguistiques, les séquences de chiffres, les jeux de mots, l’allitération, le parallélisme, le constructivisme et le minimalisme pour interpeller le lecteur.
2019
Les lauréats
- Prix d’honneur : Clemente Padin
- Prix de l'année 2019 : Cia Rinne
- Mention spéciale Fondazione Bonotto : Franz Mon
Le jury
Présidente :
Esther Ferrer, artiste
Membres permanents :
Nathalie Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck
Patrizio Peterlini, Fondazione Bonotto, mécène du Prix Bernard Heidsieck–Centre Pompidou
Membres permanents Centre Pompidou :
Bernard Blistène, directeur du Musée national d’art moderne
Christine Carrier, directrice de la Bpi (Bibliothèque Publique d’information)
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival Extra!
Mathieu Potte-Bonneville, directeur du Département culture et création
Membres du jury 2019 :
Anne-James Chaton, écrivain
Demosthenes Agrafiotis, artiste et poète
Cristina de Simone, universitaire
Martina Corgnati, universitaire
Mr Hung Hung, director of the Taipei Poetry Festival
Clemente Padin
1939, Uruguay
Clemente Padìn est un poète, performer, designer et artiste multimédia uruguayen. Il est également un important théoricien des pratiques poétiques issues des avant-gardes historiques.
Dans les années 1960, il est l'un des initiateurs du Mail art en Amérique latine. En 1966, il crée la revue Los Huevos del Plata, qui donne le ton d'une poésie résolument moderne se réinventant hors des formalismes de l'époque, et qui s'affiche politique. Il y publie ses premiers poèmes qui, réunis sous le titre Los Horizontes Abiertos, sont publiés en recueil en 1967 (traduits dans la collection Al Dante sous le titre Horizons ouverts). Dès les premiers numéros, on trouve parmi les figures tutélaires Antonin Artaud, Ezra Pound, Vicente Huidobro et Sade. Après quatorze numéros et trois livres, la revue s'arrête en novembre 1969 avec, en citation de couverture : « pour créer un monde, il faut détruire un monde ».
Le mois suivant, en décembre, il lance une nouvelle revue, Ovum 10, qui s'affiche internationaliste, expérimentale, révolutionnaire et solidaire des mouvements sociaux. Quant à la poésie de Padìn, elle s'oriente vers des pratiques de poésies visuelles, sémiotiques, conceptuelles, performatives, multimedia, contextuelles et environnementales. Dès lors il ne cesse de mener une vie d'activiste sur tous les fronts, tant esthétiques que politiques. Il publie, expose, organise, performe, théorise… sans cesse. L’engagement politique de l’artiste et de son œuvre, qui met souvent en scène la parole interdite ou empêchée par le pouvoir, lui vaut d’être mis en prison de 1977 à 1979 par la dictature militaire, puis d'être placé en liberté surveillée jusqu'en 1984.
Cia Rinne
1973, Suède
Cia Rinne est une poète installée à Berlin. Née à Göteborg (Suède), elle grandit en Allemagne et étudie la philosophie à Francfort, Athènes et Helsinki.
Ses textes minimalistes s’écrivent dans plusieurs langues et réduisent des questions philosophiques et linguistiques à des séquences sonores en provoquant des changements de sens. Ses performances, expositions et installations sonores sont présentées en Europe et dans le monde, comme récemment l’œuvre sonore Leçon du mot [le son du mot] (avec Sebastian Eskildsen, 2018) à la Glyptothèque de Copenhague. Ses livres ont été publiés en Suède, au Danemark, en Allemagne, en Suisse et au Canada, et en un seul volume en France (Zaroum ; notes pour solistes, Le Clou dans le fer, 2011).
En novembre 2019 est mis en scène à Copenhague un opéra pour lequel Cia Rinne a écrit le livret, Trial & Eros.
Franz Mon
1926, Allemagne
Franz Mon (né en 1926 à Francfort, où il vit toujours) est l'un des pionniers de la poésie concrète et sonore en Allemagne.
Enfant, il est utilisé pendant la guerre pour aider à la défense anti-aérienne, et il découvre la modernité artistique interdite par les Nazis en lisant une revue littéraire dans un camp de prisonniers des Alliés. Plus tard, il change son patronyme allemand Löffelholz en MON, palindrome qui lui évoque « MON NOM » en français. En réaction contre l'emploi abusif de la langue sous le nazisme, ses poèmes, proses et pièces radiophoniques combinent une concentration minimaliste sur un langage considéré avec méfiance, où se manifeste une expression tout à la fois grave et absurde de l’humain. Proche du mouvement de poésie concrète des années 1950, il reste un solitaire radical croyant à une fonction critique de l’expérimentation.
Il publie lui-même d’autres poètes expérimentaux avec sa petite maison d’édition et participe au « Colloque de Nouvelle Poésie » de Bielefeld (annuel de 1978 à 2003). À côté de ses textes poétiques, il publie régulièrement des réflexions sur la poésie et des études théoriques. Parallèlement, il relie le visuel au verbal par des collages à déchirures de photos et mots, ainsi que par des modulations et superpositions de lettres isolées agrandies.
2018
Les lauréats
- Prix d’honneur : Michèle Métail
- Prix de l'année 2018 : Fia Backström
- Mention spéciale Fondazione Bonotto : Alain Arias-Misson
Le jury
Président :
Julien Blaine, écrivain, poète, performeur
Membres permanents :
Emmanuelle Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck
Patrizio Peterlini, Fondazione Bonotto, mécène du Prix Bernard Heidsieck–Centre Pompidou
Membres permanents Centre Pompidou :
Kathryn Weir, directrice du Département du développement culturel
Bernard Blistène, directeur du Musée national d’art moderne
Christine Carrier, directrice de la Bpi (Bibliothèque Publique d’information)
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival Extra!
Aurélie Olivier, programmatrice du Festival Extra!
Membres du jury 2018 :
Laure Limongi, écrivaine et éditrice
Arnaud Labelle-Rojoux, artiste
Martina Corgnati, historienne et critique d’art
Gaëlle Théval, universitaire
Mathieu Copeland, commissaire d’exposition
Gloria Bordons, universitaire
Michèle Métail
1950, France
Née en 1950 à Paris, Michèle Métail est une figure essentielle de la poésie expérimentale et sonore. Depuis 1973 et les premiers vers du Poème infini, de façon très radicale, Michèle Métail a refusé pendant plus de vingt ans l’édition de ses textes, pour ne les diffuser qu’au travers de « publications orales ». La projection du mot dans l’espace représente pour l’auteur le « stade ultime de l’écriture ». Diapositives et bande-son accompagnent parfois ses lectures, où elle travaille l’allitération et l’assonance comme un parasitage, un brouillage du sens.
En 1975, elle entre à l’Oulipo, introduite par François Le Lionnais, mais prend ses distances avec ce groupe littéraire en 1998.
Très proche dans l’esprit et le travail du poète sonore Bernard Heidsieck, elle fonde avec lui l’association « Dixit » en 1979.
Elle fonde également avec le compositeur Louis Roquin l’association « Les arts contigus », qui s’intéresse aux rencontres entre divers modes d’expression : arts plastiques, poésie, musique, gestes, performances, installations…
Fia Backström
1970, Suède
Née en 1970 à Stockholm, Fia Backström est une artiste plasticienne suédoise qui vit aujourd’hui entre Stockholm et New York.
Fia Backström investit une grande quantité de médiums : écriture, installation, performance, édition, photographie, exposition. Elle invite régulièrement d’autres artistes à collaborer avec elle, et sollicite volontiers la participation du public. La reconnaissance internationale de son travail l’a amenée à intervenir notamment au Moma de New York, à la Serpentine Gallery de Londres, ou encore à représenter la Suède lors de la Biennale de Venise en 2015.
Pleinement plasticienne, Fia Backström pose le langage et les mots au cœur de son travail. La poésie se dissémine chez elle dans d’autres formes et d’autres moyens d’expression que le livre : la performance orale, l’enseignement, l’édition, l’installation, la sculpture…
Alain Arias-Misson
1936, Belgique
Né en Belgique en 1936, Alain Arias-Misson grandit aux États-Unis. Après son diplôme de Harvard en philosophie et littérature grecque, il fuit la guerre du Vietnam et se réfugie en Espagne en 1963. Là, il se consacre à la poésie expérimentale et entre vite en contact avec d’autres poètes concrets et visuels à travers le monde, notamment Paul De Vree avec lequel il collabore à la revue De Tafelronde.
C’est entre 1967 et 1970 à Bruxelles qu’il crée ses premiers Public Poems, une forme de poésie différente des happenings et des performaces. Élaborée à partir d’éléments extraits de la rue (circulation, monuments, institutions commerciales et financières, mouvements populaires…), celle-ci trouve sa place idéale dans les espaces publics, en particulier les espaces urbains.
Il publie également une dizaine de romans et habite Paris depuis 2002.
Ses toutes dernières productions manifestent une vraie recherche dans l’utilisation des nouvelles technologies, tout en restant fortement enracinées dans la tradition de la poésie concrète et visuelle.
2017
Les lauréats
- Prix d’honneur : John Giorno
- Prix de l'année 2017 : Caroline Bergval
- Mention spéciale Fondazione Bonotto : Lamberto Pignotti
Le jury
Président :
Jean-Jacques Lebel, artiste
Membres permanents :
Nathalie Heidsieck, fille de Bernard Heidsieck
Patrizio Peterlini, Fondazione Bonotto, mécène du Prix Bernard Heidsieck–Centre Pompidou
Membres permanents Centre Pompidou :
Kathryn Weir, directrice du Département du développement culturel
Bernard Blistène, directeur du Musée national d’art moderne
Christine Carrier, directrice de la Bpi (Bibliothèque Publique d’information)
Jean-Max Colard, chef du service de la Parole, concepteur du Festival « Extra! »
William Chamay, programmateur du Festival « Extra! »
Aurélie Olivier, programmatrice du Festival « Extra! »
Aurélie Djian, programmatrice du Festival « Extra! »
Magali Nachtergael, programmatrice du Festival « Extra! »
Membres du jury 2017 :
Anne Portugal, écrivain
Olivier Chaudenson, directeur de la Maison de la Poésie, Paris
Martina Corgnati, historienne et critique d’art
Nathalie Léger, directrice de l’Institut Mémoires de l'édition contemporaine (Imec)
Eric Mangion, directeur du centre d’art de la Villa Arson, Nice
Jérôme Mauche, programmateur des rencontres « Poésie Plate-forme », Fondation Ricard pour l’art contemporain
Elide Pittarello, professeur, Universita Ca’Foscari, Venise
Caroline Bergvall
1962, Allemagne
Caroline Bergvall est une écrivaine et artiste franco-norvégienne dont les projets sont alternativement des performances, des installations audio et/ou plastiques, des livres, des travaux visuels, et des collaborations avec des artistes d’autres champs de la création.
Elle a enseigné dans plusieurs universités anglo-saxonnes, avant d'entrer à l'université de Southampton.
Son œuvre, hybride, mêle numérique, vidéo, musique, déclamations, danse… Ses thématiques sont diverses : l'appartenance culturelle, le genre et la politique sexuelle, le rôle de l'artiste et de l'art, la poétique multilingue et l'impact des nouveaux médias dans l'écriture.
Elle a exposé notamment au Museum of Modern Art (MoMA) et à la Dia Art Foundation à New York, à la Tate Modern de Londres, au Musée d'art contemporain d'Anvers.
En 2017, Caroline Bergvall a reçu le Cholmondeley Award 2017 pour l’ensemble de son œuvre poétique.
John Giorno
1936-2019, États-Unis
John Giorno naît le 4 décembre 1936 à New York. Il obtient une licence à l'Université de Columbia en 1958.
Poète, plasticien et artiste performeur intéressé par le Pop Art, Giorno rencontre Andy Warhol en 1962. Il devient son collaborateur et son amant, et apparaît dans son film Sleep réalisé en 1963.
En 1964, Giorno produit une anthologie de poèmes trouvés intitulée The American Book of the Dead, et commence à expérimenter la poésie et les environnements sonores en se produisant au « Poetry Project » de l'église St-Mark à Manhattan. En 1967, il lance Dial-a-Poem, invitant les gens à appeler un numéro de téléphone spécifique pour entendre des poètes tels que John Ashbery, Joe Brainard, John Cage, Allen Ginsberg, Frank O'Hara et Anne Waldman lire leurs poèmes. Dial-a-Poem, présenté notamment au Museum of modern art de New York (MoMA), fait partie du « Giorno Poetry Systems » (GPS), une organisation à but non lucratif destinée à soutenir l'expérimentation de méthodes visant à amener la poésie dans la sphère publique.
Dans les années 1980, Giorno s'engage dans la lutte contre le sida, et GPS contribue à la collecte de fonds pour venir en aide aux personnes atteintes de la maladie en publiant des affiches désormais emblématiques, telles que : « Traite un parfait inconnu / comme un amoureux, fais-lui un câlin ».
Plus tard, Giorno se concentre sur son art visuel basé sur le texte.
En 2015, une rétrospective de son œuvre a été exposée au Palais de Tokyo à Paris et à New York, organisée par son mari, l'artiste suisse Ugo Rondinone.
John Giorno disparaît le 11 octobre 2019.
Lamberto Pignotti
1926, Italie
Lamberto Pignotti débute son activité poétique au début des années 1940, en expérimentant l'art verbal-visuel. Au début des années 1960, il conçoit et théorise les premières formes de « poésie technologique » et de « poésie visuelle », dont il édite en 1965 la première anthologie, en identifiant 15 auteurs. En 1963, avec Eugenio Miccini, Giuseppe Chiari et d'autres artistes et critiques, il crée le mouvement d'avant-garde littéraire italien « Gruppo 70 » (1963-1968) et quelques mois plus tard, il participe à la formation du « Gruppo 70 » (1936-69). Depuis 1971, il enseigne dans les facultés de Florence puis de Bologne, autour des rapports entre l'avant-garde, les médias de masse et les nouveaux médias.
Son travail artistique se développe dans la comparaison entre des signes et des codes d'origines différentes : linguistique, visuelle, auditive, gustative, odorante, tactile, comportementale et performante. Cette activité multimédia et synesthésique donne lieu, entre happenings et performances, à des « poèmes et non », des « ciné-poèmes », des cassettes logo-musicales, des livres-objets en plastique, des poèmes à toucher, à boire, à manger, des « poèmes à mâcher », ainsi que des « poèmes visuels » sous forme de collages ou d'interventions sur des photographies d'actualité, de mode, de publicité, etc.
Bernard Heidsieck (1928-2014)
Figure majeure de la poésie française de la deuxième moitié du 20e siècle, Bernard Heidsieck (1928-2014) est l'auteur d'une œuvre littéraire reconnue partout dans le monde, et qui s'est affranchie très tôt de la page pour prendre des formes sonores et plastiques : poèmes-partitions, audio-poèmes. Il a reçu en 1991 le Grand Prix national de la Poésie.
Au 20e siècle, du mouvement Dada au poète Bernard Heidsieck, les avant-gardes littéraires ont voulu échapper aux contraintes du livre et ont promu de nouvelles formes de poésie : sonore, visuelle, bruitiste… Dès 1977, le Centre Pompidou a été un lieu d’accueil et de soutien à la « poésie debout » et au « hors-livre » comme disait Bernard Heidsieck.
Avec la création du Prix international de littérature Bernard Heidsieck – Centre Pompidou, le Centre Pompidou souhaite mettre en lumière les formes variées que prend aujourd’hui la littérature affranchie du livre.
Hommage à Bernard Heidsieck
16 septembre 2015, au Centre Pompidou
En présence de Julien Blaine, Bernard Blistène, Esther Ferrer, John Giorno, Joël Hubaut, Arnaud Labelle-Rojoux, Michèle Métail.
Sur une proposition de Jean-Jacques Lebel et de l'Association « Polyphonix ».
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