Théâtre / Saint-Denis Roman / Lointains Boxeurs

Claudine Bories, comédienne, travaille au Théâtre d’Aubervilliers. Pour elle, il y a la rue, théâtre personnel de son identité sociale, et la scène comme le lieu précieux de l’expression poétique et politique de cette identité. Elle aborde le cinéma comme la possibilité de créer un espace mêlé. Un espace de rencontre entre la réalité et la fiction, mais aussi où à partir d’éléments hétérogènes, un tout peut être construit.
La rue et la scène, le réel et l'imaginaire, le documentaire et la fiction. Ces couples tantôt antagonistes, tantôt complémentaires, sont au cœur des trois films.

Ce "tout" dans Théâtre, c’est le rapport du théâtre et de l’Histoire. D’abord, il y a Coriolan, la pièce de Shakespeare qui raconte l’accession au pouvoir d’un dictateur romain, il y a les paysages de la Provence, il y a les comédiens qui répètent la pièce en Avignon. Et deux voix, celle d’un homme et celle d’une femme qui se parlent. Tandis que la réalité du travail des comédiens construit le pan documentaire du film, ce dialogue porteur de fiction résonne avec les paysages qui contiennent tant de traces et d’histoires. Le film, joueur et joyeux, explore les possibles narratifs du cinéma.

Avec Lointains boxeurs, Claudine Bories poursuit (après Juliette du côté des hommes) son incursion dans le monde masculin. Elle filme de jeunes boxeurs. Elle filme aussi celle qui les regarde, la comédienne Françoise Lebrun qui interprète une jeune femme entrée là par hasard... Dans le club d’entraînement la présence incongrue et déplacée de la comédienne devient peu à peu bien réelle tandis que l'entraînement des jeunes boxeurs paraît de plus en plus abstrait. Comme si la fiction contaminait peu à peu le réel, inversant le prisme de notre appréhension du monde.

Saint-Denis Roman, à partir de la résidence de l’écrivain Bernard Noël dans la ville ouvrière de Saint Denis tente lui aussi de construire un "tout" entre fantasmagorie et réalité. Comment Bernard Noël va-t-il s'inspirer du réel pour écrire ? Comment rendre compte de cette élaboration, de cette naissance de l'écriture avec des images ? Il faut convoquer la force narrative du cinéma tout en construisant un univers à partir d’éléments concrets : la plume qui grince sur la feuille de papier, une usine désertée, les gisants de la cathédrale, des cris de mouettes. Et jouer de la frontière entre le possible et l’artifice.

Claudine Bories, Théâtre, 1977, 20'
Festival international du court métrage Lille 1977

Claudine Bories, Saint-Denis Roman, 1987, 52'

Claudine Bories, Lointains boxeurs, 1982, 20'
Festival international du court métrage Clermont-Ferrand 1982