Rendez-vous avec la revue "Trafic"

Il y a un mystère Ken Jacobs propre à son oeuvre comme à sa vie marquée d'abord par cette enfance pauvre en rupture de famille dont a merveilleusement parlé Stan Brakhage, puis par la naissance euphorique mais difficile du cinéma underground et l'invention du film «trash», «camp» ou «baudelairien» selon ses préférences (pensons à Little Stabs at Happiness ou Blonde Cobra en 1963), par l'apport essentiel ensuite qui a été le sien à l'approche «structurelle» du medium (avec, par exemple, Soft rain en 1968 et surtout Tom, Tom the Piper's Son en 1969), par les spectacles d'ombres ou les performances du «Nervous System» durant les années 70 et 80, avant d'aboutir, dans un geste qui prend en écharpe l'ensemble de cette oeuvre en remontant à de nouvelles fins l'immense footage tourné à l'aube des années 60 avec Jack Smith et Jerry Sims, à ce qui est à ce jour le plus grand film politique américain de ce début de siècle, Star Spangled to Death (2003).

Autant de cinémas traversés que de vies vécues l'air de rien par cet artiste insituable qui n'a cessé de se déplacer, d'aller là où on ne l'attendait pas, vers des formes surprenantes, des dispositifs inédits, des aventures aux limites de la perception.

A l'occasion de la publication dans «Trafic» d'un ensemble de texte de et sur Ken Jacobs, les rédacteurs de la revue, Patrice Rollet, Raymond Bellour et Sylvie Pierre, s'entretiendront du fil rouge qui court entre toutes ces vies avec Christa Blüminger et Philippe-Alain Michaud. La table ronde sera suivie par la projection de trois films de Ken Jacobs :

Little Stabs at Happiness, 1963, 15'.

Opening the Nineteenth Century, 1990, 9'.

Flo rounds the Corner, 1999, 6'.