Solistes de l'Ensemble Intercontemporain

Chaque œuvre de Jean-Pierre Drouet, musicien inclassable aussi passionné par le jazz que par les musiques extra-européennes, transforme le concert en spectacle. Claquements de mains, mouvements du percussionniste en direction de la harpe, allitérations envoûtantes (« bave grasse, basse grave, grabas, garsse agasse... ») accompagnent le discours musical de Jardin d'en face (1985). Entre musique et danse, la Musique de tables (1987) de Thierry de Mey, clin d'oeil à l'expression « Tafelmusik » (musique de table, de banquet) ici prise à la lettre, offre une chorégraphie troublante. Les mains des musiciens, aux gestes gracieux, doux ou violents, se mettent à danser, les tables deviennent à la fois décor et instruments, tandis que les suites baroques ici détournées sont encore évoquées par le choix des différents mouvements de l'œuvre (ouverture, fugue, gigue, rondo, galop). Avec le Monologue (1978) pour tuba de Tom Johnson, ou avec Fidélité (1983) de Georges Aperghis, « pour harpiste seule regardée par un homme », l'idée d'un interprète ne devant faire qu'un avec son instrument est mise à mal. Dans le premier cas, le tubiste parle et joue avec son étrange associé, guetté par une étrange schizophrénie; dans le second, le geste est indissociable du son, interpelle les yeux comme les oreilles pour traduire un extrait de la vie d'une femme à la fois interprète et épouse. Pour clore le concert, une création signée par deux solistes de l'Ensemble intercontemporain (l'un ayant composé l'œuvre, l'autre l'ayant mise en espace) : Arnaud Boukhitine est tubiste et compositeur. Frédéric Stochl, contrebassiste, anime un atelier de théâtre instrumental au Conservatoire de Paris et collabore à des spectacles musicaux et chorégraphiques avec des artistes aussi différents que Jean-Claude Pennetier, Georges Aperghis ou Garth Knox.