Exposition / Musée
Charlotte Salomon
Vie ou Théâtre ?
23 sept. 1992 - 3 janv. 1993
L'événement est terminé
Cette exposition est consacrée à l’œuvre de Charlotte Salomon. 784 gouaches de figures et de mots peints, composées dans l’urgence entre l’été 1940 et 1942.
En 1939, Charlotte Salomon a vingt-deux ans. Elle vit dans le Midi de la France, où, venant de Berlin, elle s’est réfugiée. Le 7 octobre 1943, elle est dans le convoi n°60 se dirigeant vers Auschwitz…
Un an auparavant, elle avait confié au docteur Moridis une œuvre dont elle était l’auteur et qu’elle avait intitulée Vie ? ou Théâtre ?, pour qu’il la mette en lieu sûr… Une œuvre en vérité unique, que l’on peut voir actuellement dans la Salle d’art graphique du Musée national.
[…] Se sentant captive de la mort ou de la peur de mourir, face à la contagion du néant ou de l’abdication, aux prises avec le vertige d’une fatalité impossible à contourner, elle entreprend d’écrire et de peindre à la fois comme pour démultiplier ses maigres chances de survie. […] La réalité s’estompe, se cache sous la forme d’une pièce de théâtre, accompagnée d’une série de peintures, d’une autobiographie – fiction illustrée. […] Les deux formes d’expression simultanées, l’une se réfléchissant dans l’autre, seront formulées sur la dernière page du « livre », dans la dernière image : Charlotte se peint en train de peindre et d’écrire, vue de dos dans le paysage méditerranéen.
[…] Ce millier de feuilles est riche en références réinterprétées et renouvelées tout au long de la narration. L’écriture picturale dans son extrême diversité décline des ouvertures sur l’histoire de la peinture, clins d’œil successifs à Chagall, Munch, Soutine…, et suggère les prémices de la nouvelle peinture expressionniste allemande des années 1980, Polke ou Penck, dans la manière notamment de détourner le texte pour l’assimiler à la composition picturale.
Cette double tentation d’exister par la peinture et l’écriture se réalise de manière parallèle. La complémentarité quasi parfaite des deux processus de création impose à la gouache une soumission aux événements dans son processus et sa matière mêmes. La linéarité du récit implique la fidélité de l’écriture picturale. […]
A la fin du récit, Charlotte va vers l’impossibilité de peindre, selon l’expression de Beckett, et son œuvre s’inscrit parfaitement dans le contexte des années 1940, qui privilégie les matériaux pauvres pour dénoncer l’ennui du savoir traditionnel revendiqué par la peinture à l’huile.
Le choix de la gouache et la richesse de son traitement placent l’œuvre de Charlotte Salomon aux côtés de celles des plus originaux comme Bram van Velde.
D’après Claire Stoulig, extrait du catalogue d’exposition in Le Magazine, n°71, 15 septembre-15 novembre 1992
En marge de l’exposition est également organisée une soirée spéciale : projection du film Charlotte, vie ou théâtre ? réalisé par Richard Dindo, suivie d’un débat.
Quand
tous les jours sauf mardis