Exposition / Musée
Hors Pistes 2018
La Nation et ses fictions
19 janv. - 4 févr. 2018
L'événement est terminé
Hors Pistes poursuit son investigation autour de sujets d’actualité et de leurs échos dans le champ de l’art contemporain et de la pensée. Durant cette manifestation pluridisciplinaire, des artistes et des penseurs sont invités à réfléchir, à imaginer, à produire. Cette année, Hors Pistes a choisi d’interroger la nation et ses fictions.
Depuis quelques années, la progression des thèses identitaires et le renouveau de certains patriotismes semblent à la fois remettre sur le devant de la scène la notion de « nation » et la transformer, pour les uns, en nouveau fétiche, pour les autres en repoussoir. Hors Pistes s’ interroge : qu’est-ce que l’on se raconte d’autre avec « la nation » et qu’est-ce qu’on pourrait, avec elle ou à côté d’elle, se raconter autrement ?
Un dispositif accueille publics, historiens, philosophes, anthropologues, écrivains, cartographes, artistes… autour d’autres lectures de la nation, de rencontres qui écrivent d’autres manières de dire la nation, des manières de dire d’autres nations, des manières d’inventer des para ou extra nations. Il s’agit ici d’entendre parler autrement la nation, depuis des paroles qui semblent rejetées du discours national identitaire et qui pourtant savent dire les sentiments d’appartenance, de construction collective, d’histoire partagée et partageable. Il s’agit aussi d’interroger d’autres conceptions de la nation, des First Nations aux archipels pour y trouver des formes communes d’appartenance autant que d’exclusion. Ces paroles collectées font un autre récit, ouvert et collectif, intégrant peu à peu le dispositif d’Hors Pistes : une ambassade de la meta-nation, une « Univers-cité », un café-place et un jardin participatif.
Conversations, lectures, séminaires alternatifs, ateliers, performances, groupes de travail, disputes, chœur, ciné-club… : autant de formes pour expérimenter, construire et décomposer les fictions collectives qui nous font nous rencontrer. Un début d’une autre histoire à écrire pour un peuple trans-national. Entre images, imageries et imaginaires, entre gestes artistiques et récits collectés de citoyens qui sont tout autant acteurs que spectateurs, cette édition ne cherche pas à écrire la contrehistoire d’une nouvelle nation mais à ouvrir la possibilité d’inscrire les multiples narrations ; « le réel doit être fictionné pour être pensé. » Jacques Rancière
Avec, entre autres : l’Archipel des devenirs, Laurie Bellanca, Patrick Boucheron, Emmanuele Coccia, Catherine Coquiot, Adrien Genoudet, kom. post, Lebalto, Camille Louis, MU, Le Perou, Céline Pévrier, Clio Simon, Frank Smith, SPEAP, Sophie Wahnich, Wos/agence des hypothèses… les adhérents du Centre Pompidou, le public, tout un chacun.
Quand
11h - 21h, tous les jours sauf mardis
18h - 4h
Où
Chemins de traverses Une proposition du Collectif MU (avec Lucie Bortot, Rodolphe Alexis, SoundWays, le Centre social et culturel Rosa-Parks, l’Atelier CRAFT, le SonicLab de la Station Gare des Mines et la webradio StationStation), en collaboration avec le collectif kom.post Dispositifs sonores et application mobile, 2018
MU est un bureau de production dans le domaine de la création sonore et des nouveaux médias, qui conçoit des interventions ancrées dans le réel et en interaction avec les territoires qu’elles activent. Il collabore ici avec le collectif kom.post pour faire résonner une nouvelle choralité.
Dans le Forum-1, l'escalier vibre des voix de voisins plus ou moins lointains et n'ayant souvent pas part au « roman national », certains murs deviennent des conducteurs de récits qui se contaminent les uns les autres tandis qu'un Dynamophone mobile peut porter la voix de ceux qui s’en emparent. Accroché aux smartphones, le son déborde dans l'espace public : du parvis du Centre Pompidou jusqu'à République en passant par les Archives Nationales. Une polyphonie se déploie à l'intérieur et à l'extérieur comme des chemins de traverses de la
Nation.
Tout autour. Une oeuvre commune Une proposition du PEROU (Pôle d’exploration des ressources urbaines), en collaboration avec les étudiants de l’Ecole nationale supérieure d’architecture (ENSA) Paris-Malaquais du cours Learning from hospitality
Depuis cinq ans, le PEROU œuvre à partir d’actes d’hospitalité risqués contre l’hostilité qui gouverne, au moyen d’actions architecturales et artistiques. Prolongeant des actions menées à Calais, et partant des témoignages recueillis en France entière, le dernier volet de ce travail est un texte infini intitulé Tout autour. Une œuvre commune. Inauguré en octobre 2017 dans le cadre de la Biennale d’architecture d’Orléans, il s’agit d'un inventaire-fleuve des gestes d'hospitalité qui s'inventent aujourd'hui en France, d'un « poème-plaidoirie » conçu en réponse à l’article 622-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Dans le cadre du festival, le PEROU poursuit l'écriture de cette déposition, l'installe dans l'espace du Forum-1 en collaboration avec les étudiants de l’ENSA Paris-Malaquais, et en donne une lecture le dimanche 4 février. Ainsi s’agit-il de cartographier un territoire commun qui s’étend à bas bruit, une « 36001ème commune de France ».
In-situ-tion Une proposition de Marie-Nour Hechaime, William Massey, Julia Nowodworski, Janaina Wagner (SPEAP 2018)
SPEAP (Sciences Po - Programme d’expérimentation en arts politiques) utilise l'espace et le temps du festival pour une enquête interrogeant les possibilités d'expérimentations et d'utopies au sein de l'institution du Centre Pompidou, emblème national de l'art moderne et contemporain.
L'enquête est organisée comme un calendrier de l’Avent, un compte-à-rebours où le temps de l'attente devient un terreau fertile dévoilant progressivement ce que pourraient être les nouvelles utopies institutionnelles. Pour ce faire, chaque jour elle aborde un thème différent calqué sur les rubriques des journaux quotidiens et demande au public d'être des agents actifs de la collecte, permettant de dessiner autant de facettes de l’institution.
Les lectures électriques Une proposition de Laurie Bellanca, artiste Montage des textes et lecture : Laurie Bellanca ; lecture arabe : Amira Chebli ; lecture grecque : Kostadis Mizara ; sons : Benjamin Chaval ; coordination : Céline Pévrier
À la manière d’une création radiophonique en direct, les lectures électriques sont une traversée de la littérature par la lecture à haute voix, dérivant de livres en livres au sein d’un corpus spécifique. Pour le festival Hors Pistes, cette édition active des textes faisant écho à la question qui traverse le festival : la nation et ses fictions.
Comment nous définissons-nous en fonction des lieux d’où nous venons, où nous vivons et allons ? Quelle est l’importance de la langue et des mythes au travers desquels nous nous racontons ? Comment le nomadisme et la porosité peuvent-ils être la condition même de notre existence sur terre ? Et jusqu'où la nature peut-elle nous éclairer sur notre lien au sol, à l’identité, à la cohabitation et la complémentarité des êtres ?
Le corpus rassemblé ici traversera les textes d’auteurs comme Néhémy Pierre-Dahomey, Emanuele Coccia, Rawi El Hadj, Leonora Miano, Tristan Garcia, Cornelius Castoriadis ou encore Francis Hallé.
Corpus
Alors qu’une mémoire du présent continue de s’écrire tout au long du festival, un certain nombre d’histoires et de livres d’Histoire ont été, sont et seront mobilisés par les différents intervenants. Afin de partager au mieux ce vaste corpus qui circule entre les temps et les lieux, le festival propose :
- Trois lieux de consultation d’ouvrages : Notre Place, dans le Forum-1, ainsi que deux espaces au sein de la BPI (niveau 2).
- Un déplacement, du Forum à la BPI, de deux sessions des Lectures électriques le 19 janvier de 12h à 15h et le 26 janvier de 14h à 17h, afin d’inviter les visiteurs du festival à rencontrer davantage les œuvres.
- Une série de parcours initiés par des artistes ou penseurs du festival au sein des collections de la BPI.
Fictions, transports et monnaies : une archéologie de la nation française Une proposition de Fanny Taillandier, auteure Installation accompagnée de rencontres, 2018
Dans Moyens sans fins, le philosophe Giorgio Agamben définit la nation comme le rapport triangulaire entre territoire, Etat et « inscription de la vie ». Un triangle entre ce que l’on peut parcourir, la puissance qui frappe la monnaie, l’écriture des êtres. Ainsi nous postulons que la nation - française - est un kit de récits qui véhicule des valeurs, et qu’elle tisse ces trois éléments au fil des siècles. Récits, moyens de transports et systèmes monétaires se répondent et se révèlent et nous font discerner une construction nationale passée par des phases de splendeur et de décadence. L’auteure propose ici de forger ensemble un nouveau Kit Nation.
Notre place Des propositions de Ruedi et Vera Baur, designers, et Tiphaine Calmettes, artiste
Cette zone met en cohabitation ce que toute une conception moderne de l’espace politique a tenu à séparer : l’urbain et le végétal, la « place » et la forêt.
D’un côté, Ruedi et Vera Baur, de l’institut et réseau Civic City (en partenariat avec le Théâtre de Saint-Gervais à Genève et Initiative solidaire), sont accompagnés de douze écoles et collectifs de conception afin d’activer le projet Places en relation. Si l’on considère la place publique comme l’espace d’une possible démocratie de proximité comment penser ces lieux, non pas dans les logiques dominantes de la concurrence, mais bien comme l’embryon de la culture de la relation planétaire. Durant l’automne 2017, ce groupe international et intergénérationnel a tenté de développer des méthodologies pour analyser et concevoir la place en fonction de ces liens extérieurs. Première présentation collective de ce projet en cours et travail in situ.
De l’autre, Ne faut-il récolter que ce que l'on sème ?, proposition de l’artiste Tiphaine Calmettes, s’incarne sous la forme d’une herboristerie transformable, qui fait tout autant office de salon de thé que d’espace de jeu pour redécouvrir les vertus multiples des dites « mauvaises herbes ». À partir des plantes et de leurs usages, l’artiste initiera les visiteurs aux pratiques ancestrales des guérisseurs, chamanes, ou sorcières qui, s’ils ont été souvent traînés ou brûlés sur « la place publique », ont peut-être aujourd’hui quantité d’histoires et de « savoirs sauvages » à nous transmettre pour refaire de nos espaces « publics » des lieux du commun.
Gardez les yeux ouverts Une proposition d’Adrien Genoudet, cinéaste et écrivain, en collaboration avec Patrick Boucheron, historien Installation vidéo accompagnée de rencontres, 2018
À la fin du XIXe siècle, le banquier et philanthrope français Albert Kahn décide de créer les bourses « Autour du Monde » afin de financer des voyages d’étude dans le monde entier. La seule consigne donnée aux boursiers est de « garder les yeux ouverts ». Quelques années plus tard, en 1912, Kahn créé les Archives de la planète, un fonds de films et de photographies autochromes réalisés sur l’ensemble du globe (72 000 images photographiques, 120 heures de film). Son idée est simple : en donnant à voir les diversités culturelles du monde par le biais des voyages ou des images, les Hommes se rapprocheront et éviteront les conflits. Aujourd'hui, l'instrumentalisation des images techniques par les pouvoirs politiques semble mettre à mal l'utopie kahnienne. Il ne suffit plus de « voir », il faut réapprendre à voir, réapprendre les images et discuter, en commun, de nos possibilités de « réarmer les yeux ». C'est à cela que Gardez les yeux ouverts entend œuvrer en associant à l'installation réalisée comme un triptyque vidéo (projection d’images et du texte Des Droits et des devoirs des gouvernements écrit par Kahn en 1919) des « écarts » réflexifs, littéraires, historiques pris en charge par différents intervenants et se concluant par une lecture performée de l'ouvrage d'Adrien Genoudet, L'Etreinte. Garder les yeux ouverts, entre hier et aujourd’hui, ensemble et différemment, pour faire commune : tel est l’enjeu de cette installation et de ces différents mouvements.
En partenariat avec le Musée Albert-Kahn et le Conseil Départemental des Hauts-de-Seine.
Le Jardin de l’Ambassade Une proposition de l’atelier le balto, jardiniers-paysagistes Installation participative, 2018
Les riverains et visiteurs de Beaubourg sont invités à collaborer à la composition du Jardin de l’Ambassade. Chacune et chacun peut apporter une plante et la confier pendant la durée du festival. Les jardiniers-paysagistes en prennent soin pendant 15 jours et vous demandent de conter l’histoire qui vous relie à cette plante.
Le Jardin de l'Ambassade est une terre d'accueil et de recueil des plantes et de leurs histoires. Il inscrit, au croisement du réel et de la fabulation, ces petites histoires qui ne font pas Histoire mais qui racontent pourtant nos rapports à la terre, aux terres et à ce qui maintient le sol fertile : la diversité des peuplements. Une carte évolutive illustre les provenances des plantes et fait écho aux paroles collectées, diffusées en sons ponctuels et parfois proposées par des ethnobotanistes et autres passionnés du rapport entre hommes et plantes qui, passant par-là, sauront mettre en lumière des liens imperceptibles et soulever des questions inattendues. Une École buissonnière sera aussi activée chaque mercredi et jeudi matin pour partager connaissances et plaisirs, jardinage et langages.
Prêtez une plante et offrez une histoire pour la nation et ses fictions.
Rejoignez l’École buissonnière pour apprendre à dessiner, rempoter, prendre soin, connaitre, reconnaitre, écrire,… ensemble et côte à côte.
Chœurs politiques Une proposition de Frank Smith, auteur du livre éponyme publié aux éditions de L’Attente et Michael Martin-Badier, metteur en scène Performance filmique contributive, 2018
Chœurs politiques est un poème dramatique. A la question « Comment construire un théâtre délivré de la représentation, en prise sur le monde présent, ses conflits et ses crises ? », une foule de voix impersonnelles et singulières creusent une voie dans l’ordre des discours pour tenter de traduire la puissance du collectif.
Les visiteurs sont invités à écouter ou lire un extrait du texte face à une caméra. Un film des figures est ainsi progressivement assemblé, que l’on découvrira de jour en jour au cours du festival. Une opération à chœur ouvert pour constituer une nation d’anonymes.
Mesures compensatoires Un film d’Hélène Delean, Kendra McLaughlin, Dimitri Robert-Rimsky et Florie Vialens Auclerc (SPEAP 2017), 14’, 2017
En janvier 2017, quelques mois après le démantèlement de la Jungle, alors installée sur le site naturel de la Lande, la Mairie de Calais promulgue un arrêté municipal portant interdiction d’accès et d’occupation à cette zone par tout acte et acteur non « compatible avec le maintien des richesses naturelles ».
Ce texte énonce et active les considérations d’un territoire maltraité dont le soin redevient une priorité politique. La protection environnementale se trouve alors mêlée aux problématiques migratoires. La vidéo Mesures compensatoires résulte d’une enquête sur le terrain du Calaisis.
L’Univers-Cité Une proposition de Camille Louis, philosophe et dramaturge, en collaboration avec le collectif kom.post
Histoire des origines : Dans l'organisation universitaire médiévale, une « nation » désigne l'ensemble des étudiants d'une même université qui sont natifs d'une même région et parlent une même langue.
Inscription au présent : Depuis février 2016, on aménage le site du nouveau campus de l'Université de la Sorbonne Nouvelle - Paris 3, qui se trouvera place de la Nation.
Fiction des devenirs : Le 19 janvier 2018, s'ouvrira l'Univers-Cité, fiction inversée d'une logique première qui identifie et regroupe le même ; fiction renversant le rapport entre lieu de savoir et place du pouvoir. Ici, la nation n'est plus ce qui identifie, codifie et localise les groupes et leurs échanges mais elle est la matière encore informe à laquelle ces échanges inédits donneront peu à peu ses reliefs. Les autorités s'y déjouent et les auteurs des multiples questions recueillies, travaillées, exposées, sont tout autant l'étudiant que l'historien, l'exilé que le philosophe, la théoricienne des First Nations qu'une spectatrice curieuse. Ces questions peupleront peu à peu les murs de l'Univers-Cité, transformés en pages 3D d'un journal incarné et évolutif. Certaines matinées accueilleront des « classes ouvertes » prises en charge non par des experts mais par des partageurs et partageuses d'expériences et chaque jour proposera une entrée singulière dans ce vaste thème de la nation, non pour en chercher la définition mais pour en dévoiler les diverses dimensions, réelles, imaginaires et à imaginer, ensemble.
Sur l’un des murs de l’Univers-Cité, se trouve une fenêtre imagée. Elle ouvre sur des modalités de transmission originales que nous présentent deux films qui interrogent, à seize années d’intervalle et à travers deux regards, le pouvoir de dire et de se dire, le récit de l’exil et de l’accueil.
Lieu de naissance, un film de Florence Pezon, 13’, 2000
Un dimanche matin, en colonne par quatre, deux milliards de réfugiés du futur débarquent sans prévenir, comptant bien sur l’hospitalité de leurs ancêtres. Mais loger deux milliards d’arrières-petits-enfants n’est pas une mince affaire. Une seule solution : construire de nouveaux couloirs temporels. Ce film s’inspire de la première page du récit de science-fiction signé Clifford Simak en 1973, Our Children’s Children.
Des trous apparaissent dans le paysage d’où déferlent des femmes, des enfants, des hommes, qui, s’échappant du futur, atterrissent dans le monde présent. Anne est alors soupçonnée par l’Etat-Nation d’être l’une de ces réfugiés. Elle doit prouver son identité au cours d’une enquête.
Schibboleth, un film de Yoann Lelong, 16’, 2016
Dans la Bible, le mot schibboleth signifie « épi », « branche », « flot » ou « torrent ». A travers les époques, ce fut aussi un marqueur, un signal d’appartenance, qui suffisait à différencier des populations par la prononciation d'un mot ou d'une phrase. Celui qui ne les prononçait pas correctement était exclu.
Aujourd’hui, les réfugiés qui arrivent en France ne possèdent pas ce fameux schibboleth et la plupart d’entre eux reste en périphérie de la société. Durant plusieurs semaines, Yoann Lelong a suivi les cours de français que l'association Singa leur dispense : l'occasion de transmettre une langue, des codes, et de créer un lien de confiance. Il en a tiré un film qui renouvelle l’univers visuel associé aux réfugiés et d’où émergent les mots « habiter », « posséder », « courage » ou « liberté ».
L’Ambassade de la Méta-Nation Une proposition de WOS/agence des hypothèses et du Quebracho Théâtre
Poursuivant son rayonnement institutionnel, la Méta-Nation implante son Ambassade à Paris. La mission de l’Ambassade vise à constituer une communauté d’ambassadeurs-rices, si possible solidaires. Toute candidature au recrutement est chaleureusement acceptée.
Le passage des tests et protocoles intégratifs donne le droit d’être fier-ère-s de détenir la carte officielle de l’Ambassade de la Méta-Nation. Tout-e Ambassadeur-rice est chargé-e de promouvoir les valeurs humaines, animales, végétales et élémentaires de la Méta-Nation.
Installée au centre d’une des zones, l’Ambassade de la Méta-Nation ouvre non seulement sur des imaginaires méta-nationaux mais aussi sur des images extra-nationales qui véhiculent, elles aussi, d’autres fictions de nation. En habitant certains des murs de cette Ambassade, trois films d’artistes semblent, en même temps, en réaliser l’utopie : défier toutes frontières physiques et étendre les limites de la nation jusqu’au point où elle se dissout en Monde.
Le film du dehors, un film de Frank Smith, 30’, 2018
Isle de Jean Charles est une langue de terre aux confins de la Louisiane, victime d’une érosion côtière et des ouragans. Avec elle, une nation d’Indiens Biloxi-Chitamacha-Choctaw coule doucement. Aujourd’hui, la communauté se voit dans l’obligation de quitter son territoire : une aide fédérale a été votée afin de procéder à leur « déplacement » au printemps 2018. Un dilemme est posé à ses habitants : rester au risque de leur disparition ou partir, au risque de leur démantèlement.
Ce film tente de retenir « l’invisible-en-passe-de-disparaître » en restituant le paysage de l’île à travers un écran éclaté en 9 types d’images. Il se constitue sur cette fragmentation : car le peuple des Indiens d’Isle de Jean Charles n'existe plus, ou bien il n’existe pas encore.
La Ñaña, un film de Clio Simon, 5’, 2012
Près du feu, dans sa maison perchée au sommet d'une colline de Valparaiso, la Ñaña Juanita Huenchumil nous conte le Chili et ses valeurs mapuches.
Le bruissement de la parole, un film de Clio Simon, 18’, 2013
Prenant pour partition le récit des Paroles gelées de Rabelais, ce filme questionne ce qu’est la catastrophe en traversant différentes strates temporelles du Chili.
Paroles emprisonnées et préservées par les frimas, seul le réchauffement du climat les rendra soudainement à la vie, les restituant à l’ouïe. Il ne s’agit pas d’un travail « sur » la mémoire mais d’un projet « travaillé par » la mémoire avec tout ce que le souvenir induit de fiction. L’acte de mémoire est ici reconstitution, source de bégaiement et d’interprétation.
Au verso du timbre Une proposition de Philippes Artières, historien
Les timbres pendant un siècle, le XXe siècle, ont constitué un lieu d’inscription et de monstration d’une série d’images incarnant la nation. Les empires coloniaux ont été particulièrement productifs en la matière : ils ont tout au long des années 1930 multiplié les représentations des territoires et des populations de leur empire.
Plus de cinquante ans après les indépendances, les timbres ne rendent nullement compte de ce que l’on nomme désormais le postcolonial. La Poste française a en outre abandonné en partie son privilège d’être la seule à décider ce qui peut figurer sur un timbre. Chacun peut faire son « vrai » timbre.
Interroger les fictions de la nation à partir de ces minuscules rectangles de papier, c’est tenter à partir d’un objet apparemment ordinaire, de problématiser l’inscription dans le quotidien de ces récits. Des philatélistes, des historiens du timbre, des postiers mais aussi des artistes ayant dessiné ces étiquettes viendront dialoguer sur ce petit morceau de papier.
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