Cinéma / Vidéo
Rêve de pierre
02 mars 2016
L'événement est terminé
À travers une sélection d’œuvres récentes et historiques, plusieurs générations d’artistes s’emparent de l’héritage du land art pour mener une réflexion sur la temporalité de l’œuvre, son autonomie, sa capacité à échapper au système marchand et envisager ainsi des terrains propices à leurs productions hors normes. Prend forme alors ce « rêve de pierre : « rêve » par la liberté qu’il exige, l’inconnu, l’audace, le risque, le fantasme, « de pierre », par sa consistance ferme, solide, minérale qui s’obtient à force de travail [1] ».
La vidéo East Coast, West Coast (1969) dans laquelle Robert Smithson, en artiste californien rêveur, fantasque, fait face à une galeriste new yorkaise sceptique - incarnée par son épouse Nancy Holt - renvoie aux conditions préalables pour penser l’impensable. La séance est un plaidoyer pour que d’autres œuvres de l’ampleur de Spirale Jetty (Robert Smithson, 1970) voient le jour. À l’instar de l’artiste Melanie Smith qui survole en hélicoptère (Spiral city, 2002) l’une des mégalopoles du monde - Mexico city - en reprenant la forme et la dynamique du film de Smithson. Ce survol bien qu’indifférent au canevas orthonormé cherche à embrasser l’expansion urbaine chaotique du quartier le plus pauvre de la ville. Rosa Barba adopte à son tour ce même point de vue aérien (Bending to Earth, 2015) dans son exploration des sites de déchets radioactifs, porteurs d’un futur terrifiant. L’artiste new yorkais Frank Heath (Asymptomatic Carrier, 2013) accoste en clandestin à bord d’un kayak l’ancien hôpital de quarantaine situé sur l’île désaffectée de North Brother Island (Bronx, New York) d’où, tel un mystérieux Robinson, il parvient à créer une connexion téléphonique avec un agent administratif. Le territoire prétendument imprenable et isolé se dote d’une dimension politique dans le film Allora & Calzadilla, Under Discussion (2005). Un pêcheur se livre sur un étrange canot en forme de table de négociations retournée à une sorte d’état des lieux de l’île de Vieques occupée par les Américains de 1941 à 2003 pour les essais de certaines armes avant d’être finalement restituée aux habitants de Porto Rico. L’artiste français Adrien Missika (Sailing stones, 2011) ausculte le paysage désertique de Sailing Stones – dans le parc national de la Death Valley aux Etats-Unis - marqué par les traces mystérieusement laissées par des rochers qui avancent de manière inéluctable et encore non expliquée.
Séance présentée par Alexandra Fau (commissaire indépendante et critique).
Robert Smithson & Nancy Holt, East Coast, West Coast, 1969, vidéo (sur fichier num), nb, son, 22min (vo)
Melanie Smith & Rafael Ortega, Spiral City, 2002, vidéo (Betacam SP), nb, sil, 5.50min
Frank Heath, Asymptomatic Carrier, 2013, vidéo HD (sur fichier num), coul, son, 14.40min (vo)
Allora & Calzadilla, Under Discussion, 2005, vidéo (sur fichier num), coul, son, 6.14 min
Adrien Missika, Sailing stones, 2011, vidéo (sur fichier num), coul, son, 11.04min
Rosa Barba, Bending to the Earth, 2015, 35mm, coul, son, 15min (vo)
Remerciements : Melanie Smith et Rafael Ortega, Frank Heath, Adrian Missika, Allora & Calzadilla, Rosa Barba, EAI (New York), Simone Subal Gallery (New York), Chantal Croussel (Paris) et Bugada & Cargnel (Paris).
[1] Jean-Philippe Toussaint, L’urgence et la patience, Editions de Minuit, 2012.
Quand
19h - 20h30