Exposition / Musée
Big Bang
Destruction et création dans l'art du 20e siècle
15 juin 2005 - 3 avril 2006
L'événement est terminé
Pour la première fois, le Centre Pompidou présente ses collections selon un parcours thématique, interdisciplinaire et non chronologique. Réalisée à partir d'oeuvres d'art moderne et contemporain, Big Bang associe librement les arts plastiques, la photographie, le cinéma, la vidéo, l'architecture, le design, la littérature, en confrontant les oeuvres et les tendances du début du siècle à nos jours. Conçu à partir de l'idée d'une expansion continue des formes et des forces créatrices depuis un centre originel détruit, ce nouveau parcours de la collection s'articule autour de huit sections, attitudes ou champs d'investigation qui sont au cœur des expérimentations des artistes : Destruction, Construction / Déconstruction, Archaïsme, Sexe, Guerre, Subversion, Mélancolie et Réenchantement.
Interrompant pour un temps le principe des présentations de mouvements artistiques ou de monographies, tout en resserrant l'accrochage sur un seul étage du Musée, Big Bang constitue une expérience inédite.
Ce redéploiement se fonde sur une thématique cruciale pour comprendre l'art depuis le début du 20e siècle : le « Big bang » moderne.
Revendiquant une liberté radicale et pulvérisant les valeurs établies, le projet moderne a produit une destruction créative. Il a d'abord été le lieu d'une crise profonde de la représentation, fondée sur un désir de réinventer sans cesse de nouvelles formes : déconstruction des formes par le cubisme, défiguration par l'expressionnisme, subversion des images par le dadaïsme, autonomie constructive avec l'abstraction La scène de l'art a été un terrain d'expérimentation où se sont exprimées toutes les recherches et toutes les revendications. Affranchis du poids de l'Histoire et du carcan de la culture académique, les artistes ont apporté un renouvellement fécond de la perception qui a façonné de manière irréversible nos consciences contemporaines.
Conçu à partir de l'idée d'une expansion continue des formes et des forces créatrices depuis un centre originel détruit, ce nouveau parcours de la collection s'articule autour de huit sections, attitudes ou champs d'investigation qui sont au cœur des expérimentations des artistes : Destruction, Construction / Déconstruction, Archaïsme, Sexe, Guerre, Subversion, Mélancolie et Réenchantement. En donnant à voir le lien étroit qui unit destruction et création, c'est un éclairage inédit des phénomènes culturels et artistiques du 20e siècle, ainsi qu'une compréhension des pulsions et des procédures à l'œuvre qui sont aujourd'hui proposés.
Destruction
La modernité inscrit l'idée même de destruction au cœur de la redéfinition de l'art. Cette volonté de faire table rase s'exerce à chacun des niveaux de l'acte créateur : destitution des sujets traditionnels de l'art, dislocation de la figure, éclatement et brouillage du plan et de la perspective... Le statut de l'objet artistique (cohérence, limites, verticalité) est mis à mal tandis que s'affirme à travers l'art une ambition réformatrice, anthropologique et sociale.
Construction / Deconstruction
Commencée avec l'aventure cubiste, la déconstruction formelle et analytique de l'œuvre d'art va se complexifier dans une suite de procédures artistiques inédites qui va de la transparence à l'aléatoire, du mou au changement d'échelle, etc. Cette spéculation sur la forme de l'œuvre d'art est aussi à la source de l'art conceptuel, qui conçoit le langage comme une procédure artistique en soi. Déjà, entre 1914 et 1966, une partie de l'activité artistique de Marcel Duchamp a consisté en l'élaboration de notes manuscrites préparatoires à ses œuvres.
Archaïsme
Primitivismes et archaïsmes ont traversé tout le 20e siècle, depuis les évocations « exotiques » héritées du 19e siècle jusqu'aux expressions métissées les plus contemporaines. Au tournant des années 1920-30, s'affirment l'idée mythique d'un retour à une enfance de l'art - André Breton déclare avec force : « l'œil existe à l'état sauvage » - et la volonté de retrouver une force originelle qu'invoquaient déjà les peintres expressionnistes allemands. Dans les années 1940, apparaissent des procédures multiples qui produisent ou simulent des effets de régression, qui se réfèrent à des territoires enfouis de la pensée et qui explorent des langages autres, hybrides, archaïsants.
Sexe
L'art du 20e siècle n'a cessé de puiser une grande partie de son énergie créatrice dans le risque essentiel que prend celui qui regarde, c'est-à-dire celui qui désire. L'affirmation du droit à la jouissance, la libération de la femme, celle du corps en général et des pratiques sexuelles font du sexe un terrain exploratoire permanent de formes, de registres, de gestes, un point d'achoppement pour la pensée. De Sigmund Freud à Georges Bataille, de Charles Baudelaire à Pierre Guyotat, réalité et réflexion se renforcent pour installer au cœur du 20e siècle un lien indiscutable entre le sexe et la mort.
Guerre
Dévasté par deux guerres mondiales, secoué par des conflits incessants qui affectent la planète entière, marqué par l'apparition de nouvelles armes et la montée d'une forme inédite de « barbarie », le 20e siècle a intégré profondément, et avec gravité, le questionnement sur l'histoire. Un double mouvement s'affirme : d'une part l'extraordinaire prise en charge de l'histoire par les artistes - accompagnée d'un sentiment de responsabilité et de devoir de témoignage qui entraîne souvent engagement et mobilisation -, d'autre part le bouleversement radical de la forme, prise dans un processus irréversible de déconstruction et de renouvellement. À la question de la confrontation directe avec les événements historiques se superpose celle, plus générale et morale, de la mémoire et de l'oubli, de l'angoisse de la mort et de la précarité de la condition humaine contemporaine.
Subversion
Les attitudes de la subversion, telles que la parodie, le rire ou le mot d'esprit, font partie intégrante, tout au long du siècle, de l'action artistique. Ces stratégies de provocation, qui passent par la transgression et la dérision, opèrent à l'encontre des valeurs établies et du bon goût en appelant à l'irrationnel et à l'absurde, au doute généralisé ; elles s'appliquent au statut de l'œuvre d'art comme aux mécanismes sous-jacents des différents pouvoirs (politiques, institutionnels, marchands, etc.). Nourri de la lecture des grands insurgés de l'histoire : Sade, Nietzsche, Lautréamont, Rimbaud, l'esprit de subversion développe également le goût pour l'humour noir et blasphématoire, pour le grotesque ; la figure d'Ubu, créée par Alfred Jarry, devient pour beaucoup emblématique.
Mélancolie
Traversant les époques sous diverses formes, le thème de la mélancolie, qui traite de la condition existentielle de l'homme souffrant de son éloignement d'un Idéal, de l'absence d'espoir et du temps qui le dévore inexorablement, a été porté au siècle dernier par toute une généalogie d'artistes. « Enfants de Saturne » et anges déchus des avant-gardes, guidés par la nostalgie, la recherche métaphysique du sublime ou du néant, aspirent, par exemple, à l'absolu de la non-représentation, mais regrettent la mort du sujet et du style, récusent toute morale, mais fondent une conception mystique de la transgression.
Réenchantement
Les forces vives d'un possible réenchantement sont toujours là, au sein même de la destruction, de la dérision ou de la subversion, parfois même en plein affrontement avec le drame du quotidien et de l'Histoire : le merveilleux, le sacré, l'espoir, l'utopie trouvent, à l'ère planétaire, de nouvelles formes.
C'est que l'homme contemporain, qui dispose de toutes les libertés et d'une avancée technologique sans précédent, doit sans cesse se réinventer : la peur, la mélancolie, la cruauté, la médiocrité, la lucidité l'habitent, mais le tenaille aussi la soif d'un renouvellement, individuel, collectif. Décrire ce qui se dérobe au regard, faire parler ce qui se tait, libérer des tabous, réactiver un champ de mémoire, croire en de nouvelles utopies Miroirs de révélation ou échelles d'évasion, les procédés du réenchantement sont multiples pour les artistes : le sublime en fut un, les autres se succèdent : le primitif avec l'objet sauvage, le réel avec le ready-made, la couleur seule avec les œuvres monochromes, l'image en mouvement avec la vidéo Les deux propositions plastiques, que nous présentons ici pour la première fois, en cette fin de parcours, constituent des espaces d'initiation, entre vertige et rêve.
Quand
11h - 21h, tous les jours sauf mardis