Musée
Hildegard Weber
Hommage à Beuys ‘86
10 nov. 2021 - 29 mai 2022
L'événement est terminé
Hildegard Weber, « Hommage à Beuys 86´ » (détail) Epreuve gélatino-argentique, 30 x 40 cm © Hildegard Weber
L’installation Hommage à Beuys ‘86 substitue aux formes canoniques de la commémoration muséale l’idée de l’archive vivante. Conçu immédiatement après la mort de l’artiste le 23 janvier 1986 et entièrement reconfiguré par l’autrice en 2021 pour cette présentation, ce monument photographique dédié à Joseph Beuys est composé de près de deux cents photographies réalisées au fil des ans par Hildegard Weber, depuis sa première rencontre avec Beuys en 1960 jusqu’en 1984.
Hildegard Weber, « Hommage à Beuys 86´ » (détail) Epreuve gélatino-argentique, 30 x 40 cm © Hildegard Weber
Le premier lieu d’accueil de cet exceptionnel hommage fut l’institut Goethe à Paris, avec une exposition inaugurée le 12 mai 1986, date de l’anniversaire de Joseph Beuys. Les photographies étaient alors appuyées contre les murs, comme déposées, alors qu’au centre de l’espace, documents et livres sur Beuys étaient exposés sur une table. Des extraits vidéo et du son étaient également diffusés, l’ensemble invitant à la réflexion et à la discussion. L’Hommage à Beuys ‘86 de Hildegard Weber a circulé par la suite dans divers lieux en Europe : à la Galerie Dreiseitel à Cologne (1986), au Museum Boijmans van Beuningen à Rotterdam (1987), au Steirischer Herbst à Graz, dans l’ancien atelier de Beuys à Clèves (1991), au Museum Kunstpalast à Düsseldorf (1991), puis à la galerie Papillon à Paris, parallèlement à la rétrospective de Joseph Beuys au Centre Pompidou (1994). À chacune de ces étapes, Hildegard Weber réinvente son installation pour lui donner des formes variées, s’adaptant au fil du temps et des espaces.
Contrairement aux formes précédentes de cet Hommage, récemment acquis par le Centre Pompidou, et face à une œuvre de Beuys désormais bien plus commentée qu’en 1986, Hildegard Weber renonce ici à la partie documentaire initiale et propose son ultime lecture des ensembles photographiques qui composent l’installation. En se concentrant sur la représentation de l’artiste en dialogue avec ses œuvres, le nouvel accrochage de l’Hommage à Beuys ’86 offre un regard sur le travail de Beuys, depuis ses origines, qui s’impose au spectateur avec une grande intensité. Weber ne sacralise ni l’artiste, ni son travail, mais elle leur confère néanmoins une aura par la qualité de son regard et de ses tirages. Et ce n’est pas sans ironie qu’un chant de cigales remplace la voix de Beuys, qui s’était enregistré en 1968 répétant en boucle les mots « Ja, Nee », célèbre bande sonore devenue omniprésente dans les expositions commémoratives aujourd’hui. L’accrochage riche et abondant de cet espace résonne profondément avec la plénitude de la salle voisine où sont installés les rouleaux de feutre de Plight, la toute dernière pièce de Beuys réalisée avant sa mort.
Les photographies présentées sont pour la plupart des tirages uniques rendant compte d’actions ou d’expositions majeures de Joseph Beuys. Certaines ont été peu documentées comme la Stallausstellung (« Exposition d’étable ») à Kranenbourg de 1963 – première exposition Fluxus de Joseph Beuys réalisée dans la ferme des frères Van der Grinten à partir d’œuvres de leurs collections. On y trouve également les témoignages de participations à de grandes manifestations internationales : la documenta 4 de Kassel en 1968, la documenta 6 en 1977 – où Beuys avait notamment présenté la Honigpumpe am Arbeitsplatz (« Pompe à miel sur le lieu de travail »), la documenta 7 en 1982, où il réalisait l’action 7000 Eichen (« 7000 chênes »), ou encore la 37e Biennale de Venise de 1976 avec l’œuvre Straßenbahnhaltestelle I (« Arrêt de tram I »). La fameuse exposition Zeitgeist de Berlin en 1982 est aussi évoquée à travers des représentations de l’installation des Hirschdenkmäler qui occupait l’atrium du Martin Gropius Bau.
Cet ensemble photographique est par ailleurs particulièrement intéressant en ce qu’il rend compte de moments importants du travail de Beuys en France. Une série d’images témoigne ainsi de son intervention au Musée national d’art moderne fin 1976 – début 1977 où l’on voit Beuys installant l’œuvre Elastischer Fuß, Plastischer Fuß pour l’ouverture imminente du Centre Pompidou. Une autre série d’images reproduit l’installation Dernier espace avec introspecteur, lors de sa présentation en janvier 1982 dans les nouveaux locaux de la galerie Liliane et Michel Durand-Dessert, rue des Haudriettes dans le quartier du Marais.
Enfin, de nombreux ensembles photographiques montrent Joseph Beuys dans son atelier – notamment à Düsseldorf dès 1961 – et donnent à voir de rares portraits de l’artiste au travail. L’objectif de Weber parvient à saisir Beuys sans en perturber la concentration et nous fait entrer dans l’intimité du processus de travail, pour composer un portrait à la fois puissant et subtil de l’homme et de l’œuvre. Le dialogue que la photographe établit entre les différentes séries d’épreuves sur un thème, les regroupements qu’elle opère, les jeux d’échelle, viennent renforcer la dynamique qui traverse cette installation singulière, à même de se déployer dans une pièce entière.
Quand
11h - 21h, tous les jours sauf mardis
Réservation fortement recommandée