Deux figures
1909
Suzanne Valadon
Ne m’amenez jamais une femme qui cherche l’aimable et le joli, je la décevrai tout de suite.
Le premier titre, Après le bain (ni blanc ni noir), énigmatique, est expliqué par l'artiste elle-même : « Ni blanc, ni noir » fait référence au principe du peintre Auguste Renoir, que Valadon a beaucoup fréquenté dans son atelier en tant que modèle. Le peintre impressionniste disait ne jamais employer de noir et de blanc dans un tableau afin de ne pas « tuer » la couleur. Ici, Valadon abandonne le cerne noir autour des corps pour du bleu.
1909 est l’année de sa rencontre avec l'artiste André Utter, qui lui donne de nombreux conseils artistiques dans le choix de nouvelles teintes et dans des constructions plus audacieuses. Valadon adopte pour ses nues des cadrages inédits et pose sur ces corps un regard libre. Face à elle, les modèles ne sont pas en posture d’attente mais de complicité. L’une d’elle se laisse tomber sur une banquette, s’y étale confortablement, sourit à sa voisine, qui s’amuse à laisser glisser son peignoir. Dans ces poses inédites, accentuées par des raccourcis audacieux, se dégage un nouveau regard sur les femmes montrées dans leur intimité. La nouveauté tient également au fait qu’elle montre les sexes avec leurs poils pubiens, contrairement aux peintres du 19e qui montraient des sexes glabres ou les cachaient. Cela donne aux nus un grand réalisme auquel le public n’était absolument pas habitué.