Tir
1961
Niki de Saint Phalle
En 1961, j’ai tiré sur des tableaux parce que tirer me permettait d’exprimer l’agressivité que je ressentais. Un assassinat sans victime. J’ai tiré parce que j’aimais voir le tableau saigner et mourir. J’ai tiré pour parvenir à cet instant magique, à cette extase.*
Le premier Tir a lieu impasse Ronsin à Paris en juin 1961, à l’occasion de la première exposition personnelle de l’artiste intitulée « Feu à volonté » à la Galerie J. Cette œuvre-performance est donnée en présence de diverses personnalités du monde de l’art comme ses amis artistes Daniel Spoerri et Jean Tinguely, le critique d’art Pierre Restany et le photographe Harry Shunk.
Durant ce premier Tir, l’artiste insère dans une composition de plâtre divers objets, des poches de couleurs liquides et d’autres remplies de produits alimentaires. Armées d’une carabine, l’artiste et les personnes du public tirent de manière aléatoire sur ce dispositif. À chaque coup de feu, les poches éclatent et des traînées de couleurs et de produits consommables dégoulinent. Cette performance fait suite à une réflexion autour de son œuvre Portrait of my Lover (1961), un tableau participatif composé d’une cible sur laquelle les visiteurs sont invités à lancer des fléchettes. Le Tir, et la série qu’il engendre jusqu’en 1963, sont aujourd’hui des performances iconiques de l’artiste qui lui ont permis de s’affirmer au sein de la scène artistique. Pourtant dans les années 1960, la série est très critiquée pour sa violence qui suggère une appropriation d'un comportement assigné au genre masculin.
Pour aller plus loin
*Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007.