Carrefour Sèvres-Montparnasse
juillet 1961
Carrefour Sèvres-Montparnasse
juillet 1961
Domain | Peinture |
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Techniques | Affiches lacérées marouflées sur toiles montées sur châssis |
Dimensions | 320 x 810 cm |
Acquisition | Achat, 2002 |
Inventory no. | AM 2002-88 |
Detailed description
Artist |
Jacques Villeglé (Jacques Mahé de La Villeglé, dit)
(1926, France - 2022, France) |
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Main title | Carrefour Sèvres-Montparnasse |
Creation date | juillet 1961 |
Circumstances of production | Pièce réalisée pour la Biennale de Paris de 1961 |
Domain | Peinture |
Description | Tableau en trois panneaux |
Techniques | Affiches lacérées marouflées sur toiles montées sur châssis |
Dimensions | 320 x 810 cm |
Acquisition | Achat, 2002 |
Collection area | Arts Plastiques - Contemporain |
Inventory no. | AM 2002-88 |
Analysis
Réalisée pour la Biennale de Paris de 1961, Carrefour Sèvres-Montparnasse constitue la plus monumentale et la plus ambitieuse de toutes les affiches lacérées de Villeglé. Morceau prélevé sur la réalité, ce tableau se distingue par la fraîcheur et la spontanéité de sa composition, pourtant aléatoire. Orchestré par les jeux chromatiques des aplats colorés qui se superposent et par le foisonnement de formes qui se heurtent, Carrefour Sèvres-Montparnasse fonctionne sur l’apparition-disparition d’images et de mots en suspens, la déchirure amputant un mot, l’arrachage découvrant une syllabe. Lacérations et écorchures rendent visibles les différentes couches sédimentées sur le panneau d’affichage. Au contraire des publicités, dont elle est pourtant un avatar, cette œuvre ne propose pas une image mais plusieurs fragments d’images non hiérarchisées se détachant sur un fond de bandes monochromes (qui, à l’époque, séparaient les affiches publicitaires les unes des autres). Sur cette surface all over , le regard glisse ici, là accroche un détail, s’échappe et traverse l’étendue de l’œuvre sans jamais s’enfoncer dans une profondeur. Tandis que les pop artistes américains et les Nouveaux Réalistes, à la même période, nomment et énumèrent le monde, Villeglé et, avec lui, les Affichistes ne retiennent que des lambeaux où les images, comme ici, se décomposent, où les bribes de mots s’entrechoquent et où le sens se dérobe.
Alice Fleury
Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007
Analysis
L’« affiche lacérée », morceau d’affiches urbaines détruites, décollées, compte parmi les « nouvelles approches perceptives du réel » par lesquelles se définit, en 1960, le groupe des Nouveaux Réalistes , fondé à Paris autour de Pierre Restany. Son invention est cependant déjà ancienne : le premier geste de décollage d’affiche remonte à 1949, lorsque, aux abords de La Coupole, Jacques Villeglé et Raymond Hains procédèrent à quatre mains à leur premier prélèvement de panneau d’affichage – le titre de l’œuvre, Ach Alma Manetro (MNAM), est dû au hasard de la lacération des mots. Dans ce geste inaugural s’exprimaient autant l’intérêt privilégié de Villeglé pour la perturbation du texte et l’accumulation de signes typographiques, que le regard « éclaté » de Hains sur le monde, à travers la déformation photographique de l’alphabet au moyen des verres cannelés (les « ultra lettres »). La connivence des deux artistes, leurs recherches parallèles sur la lettre et le signe typographique, qui sont un héritage (détourné) du cubisme et des premières expérimentations du mouvement lettriste, se manifestent par la suite dans la publication commune d’un poème phonétique de Camille Bryen, métamorphosé en éclats graphiques illisibles (Hépérile éclaté, 1953).
Au printemps 1957, Villeglé commence à explorer les panneaux d’affichage des cinémas du quartier des Ternes et de la porte Maillot, matériau spécifique dans lequel la lettre joue le rôle principal. En juin 1959, au cours de plusieurs soirées dans l’atelier de François Dufrêne, à Paris, rue Vercingétorix, il en présente un certain nombre, parmi un ensemble d’affiches lacérées, sous l’intitulé « Lacéré anonyme ». L’exposition, qui réunit pour la première fois Jacques Villeglé, François Dufrêne et Raymond Hains, marque la constitution du groupe des Affichistes. Le visiteur foule, en entrant dans les lieux, un grand tapis d’affiches posées au sol par Villeglé, d’où l’appellation de Tapis Maillot, ainsi qu’une autre bande d’affiches de même format, ensuite fractionnée (Triplé Maillot). Nettoyée, retrouvant son statut mural initial, elle garde son titre de « tapis », constituant, comme le saluera Restany, le nouveau « Gobelins des Faubourgs, tissé sur la basse lisse des trottoirs en période électorale », œuvre populaire et anonyme. L’œuvre met en évidence la fascination de Villeglé pour les données graphiques fournies par l’éclatement des lettres : se laissent encore lire, ou deviner, des bribes de mots – « Demours », « Cineac », « Maillot », « Windsor » –, qui sont autant de fragments d’un discours dénaturé par les lacérations successives. Y surgit l’évidence illisible d’une autre réalité, celle-là plastique et poétique.
Réalisée pour la Biennale de Paris de 1961, Carrefour Sèvres-Montparnasse constitue la plus monumentale et la plus ambitieuse de toutes les affiches lacérées de Villeglé. Morceau prélevé de la réalité urbaine, cet agglomérat de papiers divers s’affiche pleinement « tableau » par la fraîcheur et la spontanéité de sa composition, pourtant aléatoire. Orchestré par les jeux chromatiques des aplats colorés qui se superposent et par le foisonnement de formes et de motifs qui se heurtent, il fonctionne sur l’apparition-disparition d’images et de mots en suspens, la déchirure amputant un mot, l’arrachage découvrant une syllabe. Lacérations et écorchures rendent visibles les différentes couches sédimentées sur le panneau d’affichage, les différentes strates de mémoire. Au contraire des publicités, dont elle est pourtant un avatar, cette œuvre ne propose pas une image, mais plusieurs fragments d’images non hiérarchisés se détachant sur un fond de bandes monochromes (qui, à l’époque, séparaient les affiches publicitaires les unes des autres). Sur cette surface all over, le regard glisse ici, là accroche un détail, s’échappe, et traverse l’étendue de l’œuvre sans jamais s’enfoncer dans une profondeur. Tandis que les artistes américains du pop art et les Nouveaux Réalistes nomment et énumèrent le monde, Villeglé et les Affichistes n’en retiennent que des lambeaux, où les images, comme ici, se décom-posent, où les bribes de mots s’entrechoquent et où le sens se dérobe.
Alice Fleury
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
By the same artist
Bibliography
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Macel (Christine).- " Dada et moi : Vingt-huit artistes répondent à un questionnaire établi et présenté par Christine Macel ", in Les Cahiers du Musée national d''art moderne, automne 2003, n° 85 (reprod. p. 49) . N° issn 0181-1525-18
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Collection art contemporain : Paris, Musée national d''art moderne, sous la dir. de Sophie Duplaix. - Paris : Centre Pompidou, 2007 (cit. p. 477, repr. coul. 476) . N° isbn 978-2-84426-324-7
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Jacques Villeglé : la comédie urbaine : Paris, Centre Pompidou, Galerie 2, 2008.- Paris : éd. du Centre Pompidou, 2008 (cit. 262, 278, 280-282, 293, repr. coul. p. 120-121) . N° isbn 978-2-84426-369-8
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Collection Art graphique : [Catalogue de] La collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne - Centre de création industrielle. - Paris : éd. Centre Pompidou, 2008 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle) (cit. et reprod. coul. p. 302-303) . N° isbn 978-2-84426-371-1
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