Wadi, 10 ans après / Wadi, Grand Canyon

Wadi, dix ans après

Israël, France/ 1991 / 97 min.

suivi de

Wadi grand canyon

Israël, France / 2001/ 89 min.

Réalisation : Amos Gitaï

Montage: Solveig Nordlund, Anna Ruiz

Image: Yakov Saporta, Yosi Wein, Nurith Aviv

Son: Yitzhak Coen, Eli Yarkoni, Daniel Ollivier

Production: La Sept, Agav Films

Distribution : Documentaire sur grand écran

En 1981, 1991 et 2001, Amos Gitai filme certains habitants de la vallée de

Wadi, enclave précaire et paysage changeant de l’Est de Haïfa où cohabitent

immigrés d’Europe de l’Est de longue ou moins longue date et Arabes expulsés de

chez eux. Remplacer « le jaune » environnant par « du vert » : l’enthousiasme

jardinier de Miriam, juive hongroise arrivée dès la fondation d’Israël, n’a

d’égal en 1981 que sa fougue à décrire la « charge électrique » qui l’a menée à

former un couple mixte mal vu de son entourage avec Iskandar, arabe chrétien.

Dix ans plus tard, l’environnement a eu raison de leur amour. Quant à Youssouf,

travailleur palestinien spolié de la maison de ses ancêtres (désormais en

ruines), il peste en 1991 contre la nouvelle main-d’œuvre à bas prix venue de

Russie. Et pourtant une phrase revient, de bout en bout : « On vivait bien

ensemble ici, juifs et arabes… ».

S’il fait de Wadi la synecdoque d’un possible vivre-ensemble entre Israéliens

et Palestiniens, Amos Gitai ne perd jamais de vue l’individu. Son écoute

attentive fait de la trilogie une chronique affectueuse basée sur les liens

parfois intimes qu’il a créés avec ceux qu’il revient voir. Dans le dernier

volet pourtant, Wadi Grand Canyon, les métamorphoses du paysage s’incarnent

dans le bouleversement des corps, et le montage prend en charge la complexité

géopolitique des lieux. Ainsi de l’extraordinaire séquence qui montre Youssouf

quittant son bout de terrain rocailleux pour, une fois traversée une forêt de

bulldozers, s’engager dans le tourbillon consumériste d’un centre commercial

flambant neuf.

Charlotte Garson