Pliage (Grand triangle bleu et rouge)

Le format de ce grand pliage résulte d’un corps à corps de l’artiste avec la toile. Selon ses propos, Arnal, ayant « interrogé le support papier sur ses deux faces », étudié la peinture de Paul Klee, se joint au groupe Supports/Surfaces, déplorant toutefois « le minimalisme de l’émotion [qui] ne peut durer qu’un temps ». L’artiste décrit volontiers l’exécution de ces œuvres, comme ce pliage caractéristique de ses recherches des années 1970 : « Le corps est perpendiculaire à la toile, il en investit, par le pliage, toute la surface jusqu’à son centre qui reste une sorte de point d’attache avec le sol, un lieu de contradiction, de limite. Chaque pliage réduit la surface dans un rapport simple, en général de moitié. » Le format utilisé est « celui du module industriel du drap », dont le côté « correspond à peu de choses près à l’envergure de [s]on corps, bras étendus verticalement et horizontalement ». La peinture est vaporisée sur la toile qui est pliée, dépliée, selon une opération mécanique et manuelle, divisant le drap « en une série de surfaces qui se déduisent les unes des autres dans des rapports simples, s’ordonnant autour de la surface “restante” ». La couleur, « surface anonyme », dessine des figures géométriques qui se composent au fur et à mesure des passages colorés, équivalant au nombre de pliages. De ce processus, Arnal capture le mouvement opéré et dépensé à la création, et extrait une réflexion sur le temps, déliant un labyrinthe d’instants dans les plis et replis de la toile.

Camille Morando

Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007