Tampons

Il n’est pas anodin de lire en août 1968, dans Art international (n° 8), un article de Marcelin Pleynet centré sur le phénomène de la « Disparition du tableau ». Louis Cane lui-même avait décidé de rejeter volontairement ce qu’il avait appris dans les écoles d’art traditionnelles. Dès ses premières œuvres (les « Papiers collés », 1966-1967), il s’applique en effet à remettre en question, par de nouvelles techniques, une certaine forme d’académisme abstrait : il se sert des papiers qu’il a peints et qu’il découpe en bandes afin de réaliser une œuvre nouvelle à partir de ces bandes recollées sur une autre feuille. Dans la série suivante (1967-1968), il utilise la technique des tampons : ceux-ci impriment, comme les tampons encreurs ou imprègnent, comme les éponges que, dans la peinture à l’éponge, l’on tamponne sur le mur. Louis Cane utilise ici les premiers dans la fonction des secondes. La partie en réserve structure la peinture en un réseau géométrique régulier de lignes horizontales et verticales qui scandent la surface colorée. Ces lignes n’ont pas pour vocation de diviser la surface de la toile déjà peinte, mais, au contraire, d’encadrer chacune des impressions répétées quasi mécaniquement par les tampons. Une autre version de ces « Tampons » (de couleur bleue) figure dans la collection du Musée. Par ailleurs, dans une série proche, Cane utilise l’écriture dans le tampon « Louis Cane artiste peintre ». C’est alors la répétition de sa signature, en quelque sorte, qui crée le tableau.

Nadine Pouillon

Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007