Nature morte à la carafe et au journal
[1917]
Nature morte à la carafe et au journal
[1917]
Domain | Dessin |
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Techniques | Mine graphite sur papier |
Dimensions | 39 x 27,6 cm |
Acquisition | Achat, 1971 |
Inventory no. | AM 1971-1 |
Detailed description
Artist |
Juan Gris (Jose Victoriano Gonzales Perez, dit)
(1887, Espagne - 1927, France) |
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Main title | Nature morte à la carafe et au journal |
Creation date | [1917] |
Domain | Dessin |
Techniques | Mine graphite sur papier |
Dimensions | 39 x 27,6 cm |
Inscriptions | Non signé, non daté |
Acquisition | Achat, 1971 |
Collection area | Cabinet d'art graphique |
Inventory no. | AM 1971-1 |
Analysis
Gris pratiqua toujours le dessin avec assiduité – il en fit d’abord un métier pour vivre, donnant très régulièrement des illustrations ou des dessins satiriques à des revues espagnoles ou catalanes (Papitu), puis françaises (L’Assiette au beurre, Le Charivari) après son arrivée à Paris, en septembre 1906. Jusqu’à ce que, vers 1911-1912, et soutenu en particulier par Daniel-Henry Kahnweiler, qui le prend sous contrat en 1913, il puisse se consacrer entièrement à la peinture, dans l’orbite d’avant-garde de ses amis cubistes. De ses centaines d’exercices d’illustrateur, Gris gardera une maîtrise technique, une façon de s’emparer de la feuille de papier, d’occuper son espace, d’en faire jouer la lumière, et de « finir » ses compositions, qui donnent à ses très beaux dessins un caractère particulier.
Les deux feuilles présentées appartiennent à un moment clé de l’évolution de Gris, ce moment de dichotomie où, à la fin de la Première Guerre mondiale, et bien avant que sonne vraiment le « rappel à l’ordre » (titre du recueil de Cocteau paru en 1926), il hésite et se partage entre une esthétique cubiste radicale et le retour à la figure, entre la tentation de l’abstraction et la réappropriation d’une forme de classicisme. La Nature morte à la carafe et au journal(1917) relève de la première catégorie : c’est une variation de plus sur le trio verre, bouteille, journal, un thème archi-cubiste, presque un poncif. Gris le renouvelle en l’abstractisant, en le réduisant à un pur jeu virtuose de courbes et contrecourbes, d’ombres noires et grises arbitrairement découpées, dessinant seulement les veines du bois et quatre lettres du titre du journal en guise de rappel minimal au principe de réalité. La composition, superbement équilibrée et rythmée, distribue avec justesse les noirs, les blancs, les gris, sur toute la surface du papier. À noter que notre dessin a un pendant – une feuille de même dimension, de même date, et au sujet comparable, Bouteille, verre et pipe, conservée au Musée de Grenoble : les deux dessins sont passés ensemble de la collection de l’Association de L’Œil clair, jusqu’en 1937, à la galerie Percier, chez Georges Hugnet, puis à Mme Germaine Hugnet, jusqu’en 1971.
Le Portrait de Berthe Lipchitz, si différent, n’a pourtant été réalisé que quelques mois plus tard – en mai 1918, lors d’un séjour du couple Lipchitz à Beaulieu, près de Loches, village où Gris et sa femme Josette, originaire du lieu, ont fait plusieurs longs séjours et ont passé presque toute l’année 1918. Il est remarquable par sa discrète délicatesse : les volumes du visage, les grands yeux clairs, les plis de la robe sont doucement modelés au crayon, à peine effleurés parfois au crayon de couleur. Plusieurs photographies prises au cours de ce séjour montrent à quel point Gris s’est attaché à la ressemblance, jusque dans les détails – Berthe y porte le même genre de robe à grand col, et toujours un collier en sautoir. Comme dans toute cette série de portraits dessinés, entamée dès 1917 (ceux de Josette Gris et de Vincent Huidobro cette même année, celui de Pierre Reverdy en 1918, parmi bien d’autres), Gris s’inspire d’une tradition française qu’il admire, de Fouquet et Clouet à Corot. Références qui l’autorisent aussi à déployer les qualités qui lui sont propres et qui lui valent l’admiration et le soutien indéfectibles de son marchand et ami Daniel-Henry Kahnweiler : probité, austérité nuancée d’élégance, retenue qui n’exclue pas la douceur.
Isabelle Monod-Fontaine
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
Bibliography
Derouet (Christian).- Le Musée national d''art moderne : Cabinet d''art graphique.- Paris : Musées et monuments de France; éd. du Centre Pompidou, 1990 (reprod. coul. p. 17) . N° isbn 2-85850-557-8
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Juan Gris : Correspondance. Dessins 1915-1921 : Valence, IVAM Centre Julio Gonzalez, 23 octobre 1990-13 janvier 1991 // Paris, Centre Georges Pompidou, 29 janvier 1991-1er avril 1991. - Valence: Institut Valencia d''Art Modern, Paris : Musée National d''art Moderne Centre Georges Pompidou, 1990 (cat. n° 9 reprod. coul. 1ère de couv, p. 119) . N° isbn 2-85850-595-0
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Juan Gris : peintures et dessins 1887-1927 : Marseille, Musée Cantini, 1998 (cat. n° 41, repr. p. 92) . N° isbn 2-7118-2969-3
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L''action restreinte. L''art moderne selon Mallarmé : Nantes, Musée des Beaux-arts, 8 avril-3 juillet 2005.- Nantes, Musée des Beaux-Arts/ éd. Hazan, 2005 (cit. p. 166, reprod. p. 167)
Juan Gris : Pinturas y dibujos 1910-1927 : Madrid, Museo National de Arte Reina Sofia.- Madrid, 2005 (Derouet (Christian).-"Experimentación de una vuelta a lo figurativo en los dibujos de Gris" ; reprod. coul. p. 121) . N° isbn 84-8026-264-8
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Collection Art graphique : [Catalogue de] La collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne - Centre de création industrielle. - Paris : éd. Centre Pompidou, 2008 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle) (cit. et reprod. coul. p. 101) . N° isbn 978-2-84426-371-1
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