Branche de néflier
1944
Branche de néflier
1944
Domain | Dessin |
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Techniques | Mine graphite sur papier |
Dimensions | 42 x 32 cm |
Acquisition | Don de Mme Marie Matisse, 1984 |
Inventory no. | AM 1984-67 |
Detailed description
Artist |
Henri Matisse
(1869, France - 1954, France) |
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Main title | Branche de néflier |
Creation date | 1944 |
Domain | Dessin |
Techniques | Mine graphite sur papier |
Dimensions | 42 x 32 cm |
Inscriptions | S.D.D.DR. : H.Matisse 44 |
Acquisition | Don de Mme Marie Matisse, 1984 |
Collection area | Cabinet d'art graphique |
Inventory no. | AM 1984-67 |
Analysis
En 1943, à la suite d'attaques aériennes sur la ville de Nice, Matisse quitte son appartement du Régina à Cimiez pour s'installer à Vence. Avec ses palmiers, sa vue dominant la vallée, son jardin fleuri, la villa Le Rêve offre à Matisse le cadre favorable pour développer ses recherches graphiques sur le motif : « Je suis d'une époque, que voulez-vous ? où on avait l'habitude d'en référer toujours à la nature, où l'on peignait toujours d'après nature. La nature m'accompagne, m'exalte. Action contemplative, contemplation active... comment dire ? »1 Il ne s'agit ici ni de paysages, ni de bouquets composés, ni même d'unité (un arbre, un buisson... comme dans les années 1941-1942), mais de fragments observés dans leur spécificité pour créer de nouvelles formes. Boutures, feuilles, ramures, pétales, pédoncules, attaches font l'objet d'exercices attentifs dont témoignent les photographies prises par Cartier-Bresson en 1944 ou Brassaï en 1946. Matisse, une fleur, une branche tenue à la main, contre son corps, dessine à l'encre ou au crayon sur de grands cahiers. La séance a lieu dans l'atelier, sur la table attendent dans leurs vases de nouveaux « modèles ». On peut noter que les croquis y représentent leur sujet sous un angle autre que celui de la vision de l'artiste, lequel répète sur la même page toutes les faces, tous les modes d'imbrication de la feuille et de la tige. Matisse écrivait à André Rouveyre à propos de ce principe de travail : « On m'a dit aussi que les Japonais faisaient dessiner une chaise, par exemple, dans toutes les positions, pour demander ensuite à leurs élèves de la dessiner de mémoire dans la position que leur demandaient les sentiments de la composition »2. Mais dépassant cet enregistrement du simple savoir-faire qui renvoie à l'éducation classique de l'œil et de la main, Matisse déclare : « Une fleur — quand je ne la trouverai pas dans ma mémoire, je l'inventerai »3. Pour ce faire, il s'exerce à continuer de noter les infimes distinctions physiques qui fondent paradoxalement le général et le spécifique : « Entre les feuilles d'un arbre — dans le figuier particulièrement, la grande différence de formes qui existe entre elles n'empêche pas leur réunion à un caractère commun. Les feuilles de figuier dans toutes les fantaisies de leurs formes restent bien des feuilles de figuier »4. Et il conclut dans Jazz : « chacune crie : Figuier »5.
La Branche de néflier du MNAM constitue une sorte d'exergue à cette recherche6. Les dimensions du dessin y sont à l'échelle exacte du bras, de la main, de la branche que Matisse tend à son regard sur la gauche, pour les dessiner de la main droite. On peut accéder ainsi à la vision fovéale de l'artiste — cette zone de haute définition au centre du champ optique — et pénétrer dans le dispositif même du dessin. L'échelle 1 confère à l'articulation subtile du corps et de la branche cassée portant son fruit une qualité de tracé évoquant le touché, le goûter. La saveur de la nèfle, son parfum d'arbre fruitier sont comme transportés sur la feuille, « grandeur nature »7.
Anne Baldessari
Notes :
1. Cité dans Henri Matisse, Écrits et propos sur l'art, édition établie par Dominique Fourcade, Paris, Hermann, 1972, p. 169, note 20 (« Matisse-en-France », 1942, Louis Aragon, Henri Matisse. Roman, Paris, Gallimard (vol. 1), 1971).
2. Ibid., p. 167 (lettre à André Rouveyre sur le dessin de l'arbre, 1942).
3. Ibid., p. 162, note 9 (« Matisse-en-France », Louis Aragon, Henri Matisse. Roman, Paris, Gallimard (vol. 1), 1971).
4. Ibid., p. 172 (L'Exactitude n'est pas la vérité)
5. Cf. Henri Matisse, Jazz, Editions Verve, 1947, p. 59.
6. Cf. Dominique Fourcade, Cahiers du MNAM, n° 13, 1984, p. 16.
7. On connaît une autre feuille représentant ce même sujet de la main tenant une branche, également datée de 1944 et possédant des dimensions identiques (cf. catalogue Matissse et l'Italie (1987) préface de Pierre Schneider ; repr. p. 148, D 93).
Source :
Extrait du catalogue Œuvres de Matisse, catalogue établi par Isabelle Monod-Fontaine, Anne Baldassari et Claude Laugier, Paris, Éditions du Centre Pompidou, 1989
Bibliography
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Matisse, la collection du Centre Georges Pompidou, Musée national d''art moderne : Lyon, Musée des Beaux-Arts, 2 avril-28 juin 1998. - Paris : éd. Centre Pompidou (sous la dir. de Claude Laugier, Isabelle Monod-Fontaine et Philippe Durey) (cit. et reprod. coul. p. 71) . N° isbn 2-85850-946-8
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Henri Matisse : Fleurs, feuillages et fruits : Pontoise, Musée Tavet-Delacour.- Pontoise, 2005 (cat. n°27, reprod. p. 38) . N° isbn 2-905199-54-7
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Henri Matisse : The Colour of Ideas. Masterpieces from the Centre Pompidou, Paris : Budapest, Museum of Fine Arts, 30 juin-16 octobre 2022. - Paris/Budapest : éd. Centre Pompidou/Museum of Fine Arts, 2022 (sous la dir. d''Aurélie Verdier et David Fehér) (cat. n° 77 reprod. coul. p. 221) . N° isbn 978-615-5987-85-4
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