Debate / Meeting
According to Chris Dercon
Têtes modernes
16 Nov - 1 Dec 2012
The event is over
Après Gilles Clément ou Georges Didi-Huberman, c'est au tour de Chris Dercon d'orchestrer un « Selon… ». Il convoque à cette occasion différents acteurs de l'art contemporain (artistes, théoriciens, collectionneurs, musées) pour questionner l'émergence de nouveaux langages et de nouvelles stratégies artistiques à travers certains de ses thèmes de prédilection comme la photographie, le cinéma, la mode, le rôle du collectionneur et celui des musées, la mondialisation de l'art, un nouveau regard de la critique.
Après Gilles Clément ou Georges Didi-Huberman, c’est au tour de Chris Dercon d’orchestrer un « Selon… ». Il convoque à cette occasion différents acteurs de l’art contemporain (artistes, théoriciens, collectionneurs, musées) pour questionner l’émergence de nouveaux langages et de nouvelles stratégies artistiques à travers certains de ses thèmes de prédilection comme la photographie, le cinéma, la mode, le rôle du collectionneur et celui des musées, la mondialisation de l’art, un nouveau regard de la critique.
Propos recueillis par Jean-Pierre Criqui, Responsable du Service de la Parole et de Rédacteur en chef des Cahiers du musée national d'art moderne, Centre Pompidou
JEAN-PIERRE CRIQUI – Vous dirigez Tate Modern, à Londres : en quoi la série de rencontres que vous avez conçues pour le Centre Pompidou reflète-t-elle vos préoccupations d’homme de musée ?
CHRIS DERCON – Il y a là indéniablement un écho des conversations que nous avons continûment entre tous les départements de Tate Modern. En Grande-Bretagne, les institutions culturelles, de même que bien d’autres corps de la société, sont très préoccupées par les tensions entre le public et le privé, par la culture grandissante de la célébrité, par les problèmes de la condition postcoloniale, par l’éducation artistique et par le statut du numérique en général. Mais notre public nous renvoie aussi mille questions qui ne sont pas nécessairement artistiques, comme l’inégalité croissante entre riches et pauvres. Nous vivons en un temps de forte précarité, et cela se ressent particulièrement dans une ville telle que Londres. D’où notre attachement à une facilitation toujours plus grande de l’accès à l’art. Cela dit, afin de traiter ces questions, il importe de ne pas dépendre seulement de l’intérêt des générations actuelles. Notre travail est implicitement commandé par sa relation à l’avenir. Je crois qu’il faut ouvrir le monde anglo-saxon à des idées en provenance d’autres cultures et d’autres langages, et en même temps ouvrir le musée à des disciplines nouvelles, à d’autres champs du savoir. Le dissensus, le débat en son sens le plus fort, doit être l’une de nos priorités, à l’inverse de ce qui se passe au sein des prétendues « industries créatives » inventées par les hommes politiques et les spécialistes du marketing.
JPC – Qu’est-ce qui distinguera selon vous le monde de l’art de demain – dans dix, voire vingt ans – de celui d’aujourd’hui ?
CD – J’espère qu’il se posera de façon radicalement différente la question de la « célébration » : de ce qui vaut la peine d’être célébré et des manières dont il faut le faire.
JPC – Roland Barthes a écrit qu’être moderne consistait à « savoir ce qui n’est plus possible ». Que pensez-vous de cette définition ? Et quelle serait la vôtre ?
CD – Je me considère comme un moderniste – si être moderne suppose que l’on fasse confiance à l’avenir et qu’en même temps l’on croie au passé. Peut- être le suis-je aussi dans la mesure où j’ai un intérêt particulier pour tout ce que je ne connais pas encore. D’où mon insistance sur les modernismes « différés » des autres cultures, qui ont beaucoup à nous apprendre sur nous-mêmes. Je crois enfin à l’art de la conversation, que je pratique sous toutes ses formes depuis trente ans. Les séances de ce « Selon… » vont faire se rencontrer des personnes qui, même lorsqu’elles se connaissent, n’ont jamais débattu ensemble en public. L’esprit du cinéaste et auteur allemand Alexander Kluge, pour moi une immense source d’inspiration, plane sur l’ensemble : comment passer d’une idée à l’autre tout en proposant un nouveau type d’espace public, qui ne doive rien aux formes convenues de l’université ou de la télévision ? Comment rendre compte de ce que nous voyons, et conserver un sens toujours plus aigu à cette question.
Renseignement :
Marion Gintzburger, 01 44 78 40 05, marion.gintzburger@centrepompidou.fr
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Claire Couffy, paroleaucentre@centrepompidou.fr
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