Raymond Loewy

Cette exposition est consacrée au designer français Raymond Loewy, dont la majeure partie de la carrière s’est déroulée aux Etats-Unis d’Amérique. Il fut l’un des praticiens du « rêve américain » qui, un temps, hanta ici les esprits, comme nous le remet en mémoire l’exposition présentée actuellement au Cci.

Raymond Loewy est l’auteur de centaines de projets de produits de design qui ont laissé une empreinte indélébile sur la vie quotidienne américaine et européenne. Le grand public, même s’il ignore son nom, connaît la plupart de ses réalisations : emballages pour Lucky Strike, Lu, Coop ; projets pour Coca Cola, le Concorde, les autocars Greyhound, les voitures Studebaker… et des dizaines d’autres. L’œuvre de Raymond Loewy pourrait être prise pour la métaphore d’une époque ; elle reflète indéniablement l’évolution de son pays d’adoption. […]

Associant à son pouvoir militaire et politique un expansionnisme moral et social, les Etats-Unis se sont imposés partout dans le monde comme un modèle de référence universel, notamment à partir de 1945, lorsqu’ils ont mis à profit leur image de vainqueur pour inonder l’Europe de nouveaux produits de consommation, entraînant un nouveau style de vie, « le Rêve américain ». Pour la première fois, la culture américaine devient un exemple pour l’Europe ; sa vitalité artistique transgresse même les limites de l’imagination européenne. [ …]

Loewy n’est évidemment pas le seul designer à exprimer l’évolution de ce pays pendant la période 1925-1975. […] Mais […] il est seul à ouvrir des agences en Europe. Nul autre que lui […] ne comprend que cette nouvelle vision du design ne peut s’imposer qu’en y intégrant les conceptions plus traditionnelles et idéalistes des Européens.

Sensible au mythe du héros, l’Américain de l’âge de la machine trouve son idole en la personne du designer industriel, car c’est lui qui colore l’environnement quotidien au pinceau du progrès et de la prospérité.

Sa parole, son style de vie même deviennent les éléments d’un discours publicitaire pour une vie belle dans une société sans classe…

Raymond Loewy, avec son infaillible intuition des images de séduction, est certainement un des plus incontestables représentant de ce mythe. Certains de ses projets sont les icônes de la culture industrielle du vingtième siècle [ …]

L’aménagement de Sky-Lab et les autres études pour la Nasa sont ses dernières grandes commandes. Il y associe de manière presque pathétique son obsession de la vitesse à l’hédonisme qu’il a toute sa vie cultivé. […]

D’après Reyer Kras, Le Magazine, n°57, 15 mai-15 juillet 1990