Germaine Dulac

C'est un film d'images pures. La Coquille et le clergyman ne raconte pas une histoire mais développe une série d'états mentaux, qui se déduisent les uns des autres comme la pensée se déduit de la pensée.

Germaine Dulac*

Composition visuelle de Germaine Dulac, d’après un scénario d’Antonin Artaud, La Coquille et le Clergyman, raconte l’histoire d’un clergyman tombé follement amoureux d'une très belle femme, mais qui doit vaincre un rival, tout aussi empressé. Considéré comme le premier film surréaliste (antérieur au Chien Andalou de Buñuel sorti en 1928) ce film est surréaliste de par ses cadrages proches de la peinture abstraite, des épées semblables à des phallus et un officier qui se transforme en prêtre assassiné 2 fois sans jamais mourir. Sa composition sonore et ses rimes visuelles forment un récit par associations d’idées inspirées des enseignements de la théorie freudienne qui rendent le film obscur et déstabilisant. 

« Tout mon effort a été de rechercher dans l’action du scénario d’Antonin Artaud les points harmoniques, et de les relier entre eux par des rythmes étudiés et composés. Tel par exemple le début du film où chaque expression, chaque mouvement du clergyman sont mesurés selon le rythme des verres qui se brisent ; tel aussi la série des portes qui s’ouvrent et se referment, et aussi le nombre des images ordonnant le sens de ces portes qui se confondent en battements contrariés dans une mesure de 1 à 8. Il existe deux sortes de rythmes ; le rythme de l’image, et le rythme des images, c’est-à-dire qu’un geste doit avoir une longueur correspondant à la valeur harmonique de l’expression et dépendant du rythme qui précède ou qui suit : rythme dans l’image. Puis rythme des images : accord de plusieurs harmonies. Je puis dire que pas une image du Clergyman n’a été livrée au hasard. »*

Le film, renié par Artaud qui se sent dépossédé de son scénario original, provoque une émeute du groupe surréaliste à la tête duquel se trouve André Breton, venu soutenir leur confrère lors de sa première au Studio des Ursulines, à Paris, le 9 février 1928.

*Germaine Dulac, Rythme et technique, Film Liga, 1928