Francis Picabia
De la lettre à l'image
En 1920, Picabia et Duchamp, devenus dadaïstes exposent Le Double monde et L.H.O.O.Q. Ils se font ainsi les trublions de la deuxième exposition de la Section d’Or où se retrouvent des peintres post-cubistes.
Il y a, dans cette œuvre, Double monde, peinte au ripolin − une matière industrielle −, des lettres, des mots ; comme un embrouillamini de lignes qui traduit un mouvement perpétuel, une sorte de mécanisme à remuer l’air ambiant. Les lettres « L.H.O.O.Q. » renvoient à La Joconde aux moustaches de Marcel Duchamp, réalisée la même année, en 1919. Duchamp avait choisi cette œuvre, symbole de l’art sacralisé, pour s’en moquer. Cette référence au peintre de La Joconde conduit à penser que les lignes dévoyées du Double monde évoquent les figures géométriques dans lesquelles Vinci inscrit le corps idéal d’un homme (L'Homme de Vitruve, vers 1492).
Les mentions « fragile », « haut », « bas », écrites dans le désordre, rappellent les réalités matérielles du tableau, tout en s’opposant aux lois universelles. Le Double Monde confronte la réalité physique de l’œuvre à l’art spéculatif des post-cubistes, établi sur les proportions de la Section d’Or. L’embrouillamini de lignes, qui suggère un mouvement refermé sur lui-même, exprime aussi ce que Picabia pense de ces mêmes post-cubistes. « Dans ce Double monde, écrit Didier Ottinger, Picabia entraine la Section d’Or dans une danse de lassos qui relie les points et axes de la ‘divine proportion’ » (Didier Ottinger, Collection Art moderne, Paris, Éditions du Centre Pompidou, 2006).
Francis Picabia en 7 dates
1879 Naît à Paris
1913 Expose La Danse au printemps à l’Armory Show de New York
1917 Fonde la revue 391 qui propose textes et dessins
1918 Publie ses premiers recueils de poèmes
1919 Cite L.H.O.O.Q. de Duchamp dans Le Double monde
1951 Reprend la rédaction de nouveaux poèmes
1953 Meurt à Paris
Pour aller plus loin
Dans la collection du Musée national d'art moderne