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Hans Hollein, le « conceptualizer »

Architecte, urbaniste, artiste, designer, scénographe, professeur et éditeur, l'Autrichien Hans Hollein (1934 – 2014) était tout cela — et bien plus encore. Alors que le Centre Pompidou présente « Hans Hollein transFORMS », retour avec Frédéric Migayrou, commissaire de l'exposition, sur le parcours de celui qui se définissait lui-même comme un « conceptualizer ».

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L’exposition est réalisée à partir de la collection du Centre Pompidou. Celle-ci compte 173 œuvres de Hans Hollein. Comment avez-vous sélectionné les œuvres présentes dans l’exposition ?

Frédéric Migayrou — Si un ensemble d’œuvres figurait déjà dans la collection du Centre Pompidou, une nouvelle acquisition menée en 2016 portait sur une série d’installations réalisées pour des expositions où Hans Hollein intervenait le plus souvent en tant qu’artiste, mais aussi sur de nombreux dessins expérimentaux ainsi que sur des projets architecturaux, incluant plusieurs maquettes. Hans Hollein est internationalement reconnu comme architecte, mais depuis ses débuts, il s’est investi dans une pratique artistique, d’abord proche de l’art informel puis de l’art conceptuel, participant aux manifestations marquantes de ce mouvement.

 

Hans Hollein est internationalement reconnu comme architecte, mais depuis ses débuts, il s’est investi dans une pratique artistique, d’abord proche de l’art informel puis de l’art conceptuel, participant aux manifestations marquantes de ce mouvement.

Frédéric Migayrou

 

Cette exposition présente pour la première fois depuis leurs créations plusieurs grandes installations, comme celle conçue pour la Biennale d’art contemporain de Venise en 1972 ou La leçon de gymnastique (1984). L’exposition est organisée en 13 sections, des « stations » qui marquent les étapes du développement de l’œuvre d’Hans Hollein, celle d’une approche artistique autant que celle d’un architecte, portée par une compréhension conceptuelle de la création. La démarche d’Hans Hollein a ainsi anticipé ce qui a constitué dans l’après-guerre une crise du rationalisme moderniste et de la représentation, annonçant l’avènement des courants postmodernes et déconstructivistes en architecture.

Pourquoi vous parait-il important de montrer l’œuvre d’Hans Hollein en 2025 ?

Frédéric Migayrou — Le Centre Pompidou lui avait déjà consacré une exposition en 1987, en co-production avec d’autres musées, mais principalement sous l’angle de son travail d’architecte, même si plusieurs de ses installations étaient exposées. Depuis, de nouvelles publications se sont attachées à son œuvre, et un accès plus direct aux archives a permis de retracer l’ensemble de son parcours, dans un dialogue cohérent avec les mouvements et les créateurs les plus importants du 20e siècle.

 

Hans Hollein est un créateur protéiforme : artiste, architecte, commissaire d’exposition, designer, scénographe mais aussi théoricien et coéditeur de la revue BAU.

Frédéric Migayrou

 

Hans Hollein est un créateur protéiforme : artiste, architecte, commissaire d’exposition, designer, scénographe mais aussi théoricien et coéditeur de la revue BAU, où il militera pour réévaluer les œuvres de Josef Hoffmann et d’Adolf Loos. C’est bien à travers cette position transdisciplinaire qu’il convient d’appréhender une œuvre, qui, au-delà des réalisations architecturales majeures (Musée de Mönchengladbach, Museum für Moderne Kunst de Francfort, Haas Haus, le parc Vulcania en Auvergne…) a défini un positionnement esthétique et critique unique. Ce regard dépasse la seule reconnaissance internationale que lui a apportée son intervention à la Biennale de Venise de 1980, où il se jouait de l’histoire de l’architecture. L’œuvre d’Hans Hollein, qui aura accompagné les derniers mouvements de l’avant-garde du 20e siècle mérite ainsi d’être redécouverte, pour permettre un regard critique sur cette histoire récente.

 

Hans Hollein est un architecte et pourtant, nombre de fois nous sommes tentés de le qualifier d’artiste. Quel rapport avait-il avec son travail ? Comment se définissait-il ?

Frédéric Migayrou — Lors de la présentation de son diplôme à Berkeley en 1960, Hans Hollein dévoilait un travail mêlant des sculptures et des dessins, en cohérence avec l’art informel et l’expressionisme de Franz Kline ou de Hans Hartung. Sa collaboration avec Walter Pichler, notamment à travers la réalisation de collages qui influenceront directement Claes Oldenburg, puis sa proximité avec Joseph Beuys témoignent de son engagement comme artiste. De ses œuvres ouvertement conceptuelles, comme les photographies réalisées en 1964 et comprises comme des nonarchitectures, à la conception d’installations complexes comme à Mönchengladbach en 1970, ou à la Biennale de Venise en 1972, Hollein s’est pleinement intégré dans le domaine de l’art. Son implication va jusqu’à l’organisation de l’exposition « MAN transFORMS », conçue en étroite collaboration avec Arata Isozaki et Ettore Sottsass. Cette exposition, pensée comme une vaste installation collaborative, s’apparente à une archéologie du monde industriel contemporain. C’est à travers ce projet que Hollein se définira lui-même comme « conceptualizer ». ◼