Peinture

En 1929, l’artiste catalan Pierre Daura fonde avec Michel Seuphor et Torres-García le groupe Cercle et Carré, qui rassemble toute l’internationale des artistes abstraits. Le groupe oppose au surréalisme la rigueur de la construction géométrique, prônant un retour aux formes essentielles, comme l’explique Michel Seuphor : « Après avoir pris un temps de réflexion, je proposai le cercle et le carré, comme signes du groupe. C’était pour moi l’emblème le plus simple de la totalité des choses, le monde rationnel et le monde sensoriel, la terre et le ciel de l’ancien symbolisme chinois, la géométrie rectiligne et la géométrie curviligne, l’homme et la femme, Mondrian et Arp… » (Le Style et le cri, Quatorze essais sur l’art de ce siècle , Paris, Seuil, 1965, p. 112-113). Pierre Daura participe à l’importante exposition de Cercle et Carré à la galerie Dalmau à Barcelone, en 1929, et dessine le logo et l’affiche du groupe.

Cette Peinture [F1], réalisée entre 1928 et 1930, comme l’ensemble exceptionnel des cinq autres peintures données par Martha Daura en 1996, est emblématique des recherches du groupe, et est aussi manifeste d’un intérêt pour la rigueur de la composition chez Daura, quelles que soient les formes que prend son œuvre (paysage, portrait, nature morte). Témoignant d’une grande sensibilité à la matière, cette toile trouve son rythme et sa dynamique spatiale et visuelle dans les contrastes de formes, qu’accentue une légère asymétrie. Peinture [F1] tempère le rationalisme froid de Cercle et Carré, et par ses éléments rythmiques colorés s’imbriquant entre balance et harmonie, préfigure les principes d’Abstraction-Création. Ignoré par la presse lors de sa première exposition à la Galerie 23 à Paris, en 1930, Cercle et Carré conclut le principe de l’abstraction géométrique.

Dorothée Deyriès-Henry

Source :
Extrait du catalogue Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007