Cine / video
Rétrospective Johan van der Keuken
La Cinémathèque du documentaire
19 ene - 19 mar 2018
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La Bibliothèque publique d’information devient la vitrine parisienne de la Cinémathèque du documentaire : une invitation à s’immerger tous les jours dans une programmation de films venus du monde entier, des classiques aux toutes dernières créations, avec plus de quatre-cents séances annuelles. Première étape de ce grand voyage, une rétrospective de l’œuvre du cinéaste néerlandais Johan Van der Keuken.
Sa création, à l’initiative de la Scam (Société civile des auteurs multimédia) et avec le soutien du ministère de la Culture, promeut la diffusion des films documentaires partout en France à travers un réseau de partenaires et une programmation régulière.
Quoi qu’il filme – une petite fille de banlieue pauvre (Beppie), un jeune garçon aveugle fou de musique et de sons (Herman Slobbe, l’enfant aveugle), la grande ville dans laquelle il vit (Amsterdam Global Village), ses vacances rêveuses en famille dans un petit village de l’Aude (Les Vacances du cinéaste), une descente de l’Europe en plusieurs étapes, depuis Amsterdam jusqu’au Caire (Nord-Sud), ou encore un dernier tour du monde pour se préparer en douceur et nostalgie à la mort qui l’attend (Vacances prolongées) – l’idée que Johan Van der Keuken se faisait du documentaire a été une des plus hautes et des plus exigeantes de l’histoire de ce cinéma.
La grande question, qu’il n’a cessé de se poser, est celle de la tension de tout son cinéma entre les idées, le film comme projet politique et philosophique, et la rencontre avec le réel. Le monde, dans ce qu’il a de révoltant, exige que le cinéma se mêle de ses affaires, produise du sens, soit un outil de réflexion, mais le réel, lui, exige le respect le plus absolu de la singularité inaliénable de toute chose, sur laquelle bute toute intention et tout vouloir-dire. Le montage, dont il était un maître absolu et un travailleur infatigable, lui permettait de dépasser dialectiquement cette vive contradiction.
La rencontre avec le réel ne pouvait être pour lui que physique, instantanée, impulsive. Sa façon de tenir la caméra à la main, d’attaquer vigoureusement le motif filmé, de rendre visible dans chaque plan le cadre en train de s’inventer, c’est ce qui fait le style, unique et reconnaissable entre tous, de Van der Keuken.
Paris a été pour van der Keuken un espace privilégié de dialogues et d’amitiés tout au long de sa vie, la ville où son travail a été repéré, reconnu, soutenu et diffusé à partir de 1975, et finalement consacré en 1998, trois ans avant sa mort. Dès 1978, les Cahiers du cinéma, le cinéma Action République, le Centre Pompidou et la Bibliothèque publique d’information ont partagé la même conviction qu’un grand cinéaste venait de faire son entrée dans l’histoire du cinéma. Johan serait sans doute heureux de savoir que cette intégrale de son œuvre a lieu au Centre Pompidou, seize ans après sa mort, à l’occasion de l’ouverture de la Cinémathèque du documentaire, preuve que ses films sont bel et bien vivants, comme à leur premier jour.
« Filmer est un travail d’amour. Un amour infini, un grand courant indéfinissable, reçu et donné par les hommes, une force vitale et du désir. Un éternel trimballage de caméra et de valise, d’accessoires, de rouleaux de films et Nosh avec le Nagra et les micros, les bandes et l’éclairage, parfois à la limite des forces physiques. » Johan Van der Keuken
Alain Bergala, essayiste de cinéma.
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