Exposición / Museo
Cinéastes en correspondance. Naomi Kawase - Isaki Lacuesta
Exposition d'installations
23 nov 2018 - 6 ene 2019
El evento ha terminado
Avec plus de 40 films, documentaires et fictions mêlés, Naomi Kawase a imposé sa singularité jusqu’à devenir la plus grande cinéaste japonaise. L’Espagnol catalan Isaki Lacuesta a fait du cinéma une aventure perpétuelle, ses multiples créations défiant tout formatage.
Naomi Kawase a commencé à filmer à la fin des années 1980 cherchant, au moyen d’un cinéma à la première personne, à reconstituer son histoire familiale béante et à restituer son rapport organique au monde. Isaki Lacuesta a débuté à l’aube des années 2000 avec des films qui font surgir la fiction et l’intime de l’archive, de témoignages historiques, d’images scientifiques et documentaires.
Elle n’a cessé de filmer les liens sensuels et spirituels qui unissent l’homme à la nature, partant de son expérience pour y envelopper l’univers, du home movie au mélodrame – dont les vibrants Escargot (1994), Suzaku (1997), Shara (2003), Naissance et maternité (2006), Still the Water (2014). Il a toujours abordé le cinéma comme un moyen d’expérimentations infinies, cherchant la symbiose, chaque fois unique, d’un projet avec une forme – dont les portraits de deux frères gitans à douze ans d’intervalle, La leyenda del tiempo (2006) et Entre dos aguas (2018).
Les installations qu’ils ont créées pour cette exposition et les rétrospectives parallèles de leurs films déploient leurs œuvres respectives, en les articulant autour de la correspondance filmée qu’ils ont échangée entre 2008 et 2009.
Correspondance Kawase-Lacuesta
In Between Days
Correspondance filmée entre Isaki Lacuesta et Naomi Kawase
En 2005, le Centre de Culture Contemporaine de Barcelone (CCCB) travaille à une exposition des cinéastes Abbas Kiarostami (Iran) et Victor Erice (Espagne), présentée au Centre Pompidou en 2007. Au cours de la préparation, Victor Erice propose d’échanger une correspondance filmée avec Abbas Kiarostami, qui s’étendra sur deux ans et dix lettres.
En 2008, invité au CCCB, Isaki Lacuesta (Espagne) propose à son tour de dialoguer avec un cinéaste à travers des films. Il pense à Naomi Kawase (Japon), qui accepte rapidement pour s’être déjà prêtée au jeu avec Hirokazu Kore-eda en 1996. S’ensuit un échange de six lettres et un post-scriptum qui durera un an, entre août 2008 et juillet 2009.
« J'ai découvert le cinéma de Naomi avec Shara, un film qui m'a fasciné parce qu'il semblait être fait d'impulsions, comme si sa réalisatrice avait été guidée par ses humeurs. Il fallait connaître cette cinéaste capable de filmer une séquence de pluie avec la lumière la plus ensoleillée du monde. »
I. Lacuesta
« J'ai été fascinée par la femme de sa première lettre, et j'ai pensé que je pouvais lui faire confiance si cette femme était la personne qu'il aimait. Et je voulais lui rendre la pareille, en lui présentant les êtres et les lieux qui me sont chers.»
N. Kawase
7 lettres, Espagne – Japon, 2008-2009, DV et 16 mm, 43’, coul., sonore
Quando
Le 23 nov. à partir de 18h30
24 nov. 2018 - 6 janv. 2019 de 11h à 21h
Dónde
Installations Naomi Kawase
Pour la première fois, Naomi Kawase crée des installations.
Inspirées par sa région natale, Nara, également à l’origine de la plupart de ses films, Spring – Summer – Fall – Winter et Screens of Memories forment deux propositions complémentaires, qui se répondent pour parvenir à l’équilibre, Elles sont introduites par une œuvre calligraphique, réalisée par la cinéaste lors de l’ouverture de l’exposition.
Calligraphie
La cinéaste pratique aussi l’art de la calligraphie japonaise, le shodô, inextricablement lié à la culture zen de l’archipel. D’abord chinoise, la calligraphie s’est développée au Japon à partir de la région d’origine de Naomi Kawase, Nara, qui a abrité la première capitale du pays au 8ᵉ siècle. On y fabrique toujours traditionnellement le papier washi (à partir de fibres de mûrier à papier), les pinceaux et l’encre utilisés ici.
Pour l’inauguration de l’exposition, Naomi Kawase peint quatre idéogrammes qui représentent les quatre saisons – printemps, été, automne, hiver - et servent d’introduction à ses installations.
Calligraphie à l’encre sur papier washi et captation de sa réalisation par Naomi Kawase au Centre Pompidou, le 23 novembre 2018, 30’, coul., sonore
Spring – Summer – Fall – Winter
[Haru Natsu Aki Fuyu]
De hauts murs enserrent un monde qu’ils invitent à traverser au fil des saisons.
Naomi Kawase a grandi et vit toujours dans la région de Nara, à côté de bois centenaires où elle aimait jouer et se promener avant de les filmer. Comme une fenêtre panoramique ouverte sur la forêt monumentale de Nara, quatre projections semblent n’en former plus qu’une, déclinant lumières, couleurs, mouvements et sons des quatre saisons pour accompagner le visiteur au cours de sa déambulation.
Mobilisés par cette contraction de l’espace et du temps, du proche et du lointain, du court et du long, les sens s’imprègnent de la forêt japonaise qui bruisse et se transforme devant nous. Cette allée des quatre saisons, dont la forme est inspirée par le croissant de lune, conduit jusqu’au plein soleil que dessine Screens of Memories, reproduisant ainsi cycles et équilibres de la nature.
Japon - France, 2018, 4 projections numériques HD synchronisées, 5’, coul., sonore
Screens of Memories
[Omoi no sukurīn]
Avec cette installation, Naomi Kawase retourne aux origines du cinéma en même temps qu’à la source de ses propres films. Empruntant aux procédés précinématographiques la disposition d’images sur support circulaire, et au cinéma analogique ses 24 photogrammes par seconde, Screens of Memories forme un carrousel d’images projetées sur 24 écrans.
Avant même l’univers qui y défile, ces écrans font déjà affleurer les racines de la cinéaste. Composés en effet de 960 feuilles de papier washi fabriquées à Yoshino, dans la préfecture de Nara, ils ont également été assemblés dans cette région aux traditions ancestrales, dont est issue Naomi Kawase.
Revenant à ses premiers films, suscités par cet environnement immédiat et tournés seule, caméra à la main, la cinéaste retrouve ici l’autre main qu’elle tendait souvent devant l’objectif, pour toucher et rejoindre le monde qu’elle filmait. Cette main effleure aujourd’hui les feuilles en papier washi des écrans, signées de femmes et d’hommes du monde entier dans leur langue avant leur assemblage, pour les traverser encore, jusqu’à nous.
Japon - France, 2018, 6 projections numériques HD synchronisées, 24 écrans composés de 960 feuilles de papier washi disposés en cercle, 5’, coul., sonore
Installations Isaki Lacuesta
Isaki Lacuesta a réalisé douze installations depuis 2007. Parmi ses créations récentes : Aftermath, présentée au pavillon catalan de la Biennale d’architecture de Venise en 2016, ou Mur/Murs et Los muros invisibiles, présentées au Centre d’arts Santa Monica à Barcelone en 2015.
Pour le Centre Pompidou, il conçoit une nouvelle installation, Les images échos, introduite par une proposition intitulée Les films doubles. Le centre d’art contemporain Bòlit, à Girona, exposera à son tour cette nouvelle installation d’Isaki Lacuesta dans l’exposition qu’il lui consacre du 25 janvier au 28 avril 2019.
Les films doubles
Pel.lícules dobles
Le dédoublement et la dualité sont au cœur de la création du cinéaste espagnol catalan Isaki Lacuesta. Dès ses premiers films, il s’intéresse à des figures, des lieux, des histoires qui se font écho. Voir et revoir, depuis différentes perspectives : le travail de recherche et d’enquête que mène Isaki Lacuesta impose de réexaminer, de faire retour autrement.
Plus qu’une méthode, une politique se dessine, et les films se dédoublent. Un court entraîne un long métrage. Un documentaire précède une fiction sur le même sujet. Un projet donne naissance à deux œuvres. Un portrait est dressé en deux films à douze ans d’intervalle. Un long métrage a deux versions avec des fins différentes. Un pays est abordé par deux versants, individuel et collectif.
Pour introduire à son installation, Les images échos, et nous mener jusqu’à elle, le cinéaste expose ici retours, symétries, oppositions et jeux de miroir, en rapprochant deux à deux des images de ses films.
Espagne, 2018, 14 vidéos HD sur 7 écrans LCD, nb et coul., muet et sonore
Les images échos
Les imatges eco
« Un livre sacré dit que Dieu émet un mot, mais que nous en entendons deux, et que ce ne sont jamais les mêmes. Au coin de ma rue, il y a un monastère roman avec un cloître dont les chapiteaux représentent des notes de musique. Mon chapiteau préféré est une sirène à deux queues symétriques, entre lesquelles se trouve un œil vertical. Peut-être cette double queue représente-t-elle deux notes que nous percevons en même temps, alors qu’on voulait nous faire entendre autre chose ?
La sirène, quoi qu’il en soit, ne figure pas dans cette installation.
Je ne crois pas en dieu, en revanche je crois en cette double parole, en tout ce qui se dissocie, se mêle et change de sens. De manière simple et naturelle, le cinéma produit toujours ce dédoublement : nous sommes à la fois dans deux lieux et deux temps différents.
Cette installation part d’images que j'ai tournées en Afrique du Sud, en Russie, à Cuba, au Qatar, en Espagne, à côté de chez moi, et tente de répondre à la question que m'a posée le Centre Pompidou, « où en êtes-vous ? », en disant « je suis ici et là en même temps ». D’où « les images échos » : des images que j'ai vues et filmées, qui me rappellent d'autres images, que je n'ai jamais vues ni filmées. » I. Lacuesta
Espagne – France, 2018, 7 projections numériques HD synchronisées, nb et coul., sonore