Le Centre Pompidou &... Reda Kateb
C'est un acteur qui a su gagner le cœur du public patiemment, sans esbroufe. Ses rôles marquants l'ont vu interpréter un caïd de prison (Un prophète, 2009), un médecin interne (Hippocrate, 2014, pour lequel il gagnera un César), un guitariste légendaire (Django, 2017), un éducateur d'enfants autistes (Hors normes, 2019) ou encore un flic meurtri par les attentats (la série En Thérapie, 2021). Avec à chaque fois, la même sensibilité et la même profondeur. Dernièrement, Reda Kateb passait à la réalisation avec Sur un fil, son premier long métrage, sur les clowns en milieu hospitalier — avec notamment la talentueuse chanteuse Aloïse Sauvage.
Ces jours-ci, l'acteur de 47 ans rejoint la troupe de Sébastien Kheroufi et Par les villages, adaptation de la fameuse pièce du dramaturge autrichien Peter Handke, recréation du spectacle déjà montré au Centre Pompidou début 2024.
Ces jours-ci, l'acteur de 47 ans rejoint la troupe de Sébastien Kheroufi et Par les villages, adaptation de la fameuse pièce du dramaturge autrichien Peter Handke, recréation du spectacle déjà montré au Centre Pompidou début 2024. Un vrai défi en forme de retour aux sources pour l'acteur qui a démarré sa carrière au théâtre avant de filer vers les étoiles du cinéma. Issu d'une grande lignée d'artistes algériens — il est le petit-neveu de l'écrivain Kateb Yacine et de l'acteur Mustapha Kateb, Reda Kateb a découvert les planches avec son père, le comédien Malek Kateb. Entre le Centre Pompidou et Reda Kateb, c'est une histoire d'amour au long cours.
« Plus qu’un saut vers l’inconnu, la scène c’est pour moi un retour aux sources : j’ai commencé à jouer au théâtre quand j’avais 8 ans, avec mon père. Je me suis tourné vers le cinéma assez tard, vers l’âge de 30 ans. Pendant ces années d’intermittence, où je jouais des spectacles parfois pas payés, je bossais à côté comme intérimaire, des petits boulots. Sans que je le cherche vraiment, Peter Handke est un auteur vers lequel je reviens régulièrement, et ce depuis très longtemps. Déjà, lorsque j’étais élève amateur au Théâtre des Quartiers d’Ivry, nous avions travaillé le texte Outrage au public, sa première pièce (1966, ndlr). Et puis dans les années 2000, j’ai joué Par les villages, sous la direction d’Olivier Werner, à Valence. Mon personnage était un ouvrier. Je connais bien ce texte. C’est en fait le dernier spectacle de théâtre que j’ai joué — même si j’ai continué à avoir des contacts avec la scène.
Pendant longtemps, Beaubourg, je l’ai vu depuis la Piazza, sans y rentrer. Ce bâtiment me faisait l’effet d’un navire, d’un vaisseau spatial. Beaubourg, c’était le futur.
Reda Kateb
Pendant longtemps, Beaubourg, je l’ai vu depuis la Piazza, sans y rentrer. Ce bâtiment me faisait l’effet d’un navire, d’un vaisseau spatial. Beaubourg, c’était le futur — surtout avec ce compte-à-rebours avant l’An 2000, qui ornait la façade en 1999. Mes premiers souvenirs, c’était le dimanche, fin des années 1980. Je venais avec ma mère depuis Ivry-sur-Seine, où j’habitais. Sur le parvis, il y avait des cracheurs de feu, des gens qui racontaient des histoires, un type qui grattait « Let it Be » sur sa guitare toute la journée… C’était assez génial. Dans les années 1990, alors lycéen, je venais seul. Devenu jeune adulte, dans mes années de galère, c’est à pied depuis Ivry en longeant les quais que je venais à Beaubourg.
J’ai passé énormément de temps à la Bibliothèque publique d’information. Parfois, je n’entrais même pas dans la bibliothèque ! Dans la file d’attente, on discutait, on draguait, on fumait une clope, c’était des palabres sans fin en bas des escalators… Je me retrouvais beaucoup plus dans un endroit comme la Bpi que dans d’autres bibliothèques, comme Sainte-Geneviève ou la BNF, où j’allais de temps en temps. À la Bpi, il y avait la culture, les livres, mais aussi la vie — c’était un lieu de refuge pour beaucoup d’exclus. Je me souviens de gens qui regardaient des documentaires d’un œil, d’autres qui dormaient dans les gros fauteuils. Parfois, je venais faire une recherche en particulier, comme cette série documentaire des années 1980 sur l’Actor’s Studio à New York ; d’autres fois, je me retrouvais à visionner de drôles de trucs, comme ce concert de Pink Floyd à Pompéi (documentaire de 1972, ndlr). À l’époque, les DVD n’existaient pas, les films étaient soit gravés sur des LaserDiscs énormes, soit conservés sur des cassettes géantes, les betacams… De temps en temps, j’allais aussi au Musée d’art moderne en haut, voir les Matisse ou les Giacometti — on m’avait d’ailleurs dit que j’avais une silhouette comme celles sculptées par l’artiste. Une fois, alors que je devais avoir 17 ou 18 ans, un poète qui m’avait vu traîner dans le Musée m’avait invité à son vernissage… J’ai malheureusement oublié son nom.
Mon enfance et mon adolescence, c’était à Ivry, de l’autre côté du périphérique. Beaubourg, c’était une manière de sentir qu’on avait aussi notre place, ici, au centre de Paris.
Reda Kateb
Mon enfance et mon adolescence, c’était à Ivry, de l’autre côté du périphérique. Beaubourg, c’était une manière de sentir qu’on avait aussi notre place, ici, au centre de Paris. C’était un lieu d’infusion, un truc assez poreux entre le dedans et le dehors. Je relie vraiment le Centre Pompidou à son quartier, à cette faune si particulière. Aujourd’hui, je reviens de temps en temps, même si je suis souvent loin de Paris. Il y a quelques années, je suis venu expérimenter l’atelier conçu par Jean-Charles de Castelbajac avec mon fils qui a 9 ans. ◼
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Portrait de l'acteur Reda Kateb
Photo © Mathieu César