Exposition / Musée
Isaac Julien
25 mai - 15 août 2005
L'événement est terminé
Une sélection d'oeuvres récentes d'Isaac Julien, dont une nouvelle production réalisée spécialement pour cette manifestation, ainsi qu'un programme thématique de films et de vidéos en lien avec l'exposition Africa Remix.
Les recherches formelles de Isaac Julien sont traversées par le questionnement d'une identité noire au sein d'une conception occidentale du monde et d'une culture mondialisée. Il est l'un des créateurs post-coloniaux engagés dans la représentation de ce que l'on peut appeler « le fantôme créole » : un espace dénationalisé, déterritorialisé, qui n'est connecté à aucune grande civilisation, à aucune grande culture mais né de rencontres et d'échanges violents entre divers éléments.
Le Centre Pompidou présente une sélection d'oeuvres récentes d'Isaac Julien, dont une nouvelle production réalisée spécialement pour cette manifestation, ainsi qu'un programme thématique de films et de vidéos en lien avec l'exposition Africa Remix.
L'œuvre de Isaac Julien se situe au croisement du cinéma documentaire et des arts plastiques. Après des études d'arts plastiques et de cinéma à la St Martin School of Art de Londres, l'artiste a commencé son parcours par la réalisation d'un long métrage et de documentaires dont le dernier, BaadAsssss Cinema, en 2002, est un montage complexe sur les différents aspects du cinéma afro-américain engagé, dit « Blaxploitation », né dans les années 1970 aux États-Unis.
Isaac Julien développe depuis quelques années une nouvelle grammaire de l'installation audiovisuelle, qui revêt ici deux formes différentes avec Baltimore, 2003, et Fantôme Créole, 2005, produite spécialement pour le Centre Pompidou. À la différence de Baltimore, où le visiteur se trouve dans la position classique du spectateur de cinéma, face au dispositif frontal de projection, dans Fantôme Créole, il est invité à participer activement au montage des images et des sons. Cette méditation, à la fois politique et poétique, est construite à partir des voyages de l'artiste dans le nord de l'Europe et en Afrique ; elle se réfère à l'ouvrage l'Afrique fantôme (1934) de l'écrivain et ethnologue Michel Leiris, ainsi qu'au film documentaire Voyage au Congo tourné par Marc Allégret lors d'une expédition d'André Gide en 1925.
Les recherches formelles de Isaac Julien sont traversées par le questionnement d'une identité noire au sein d'une conception occidentale du monde et d'une culture mondialisée. Il est l'un des créateurs post-coloniaux engagés dans la représentation de ce que l'on peut appeler « le fantôme créole » : un espace dénationalisé, déterritorialisé, qui n'est connecté à aucune grande civilisation, à aucune grande culture, mais né de rencontres et d'échanges violents entre divers éléments.
Montage
À la différence d'artistes qui occupent actuellement la scène artistique, comme Pierre Bismut, Douglas Gordon, Pierre Huyghe, Mark Lewis, Christian Marclay, etc., dont les stratégies sont celles de l'appropriation, du détournement et de la déconstruction des structures cinématographiques, l'objectif d'Isaac Julien n'est pas tant la déconstruction que la construction d'œuvres à partir d'éléments hétéroclites issus de sources diverses, de mouvements de pensée étrangers l'un à l'autre avant leur assemblage : images filmées dans des lieux à forte valeur symbolique, images d'archives fixes ou mouvantes, entretiens, extraits de textes... La méthode est celle du collage, du montage, mais aussi de l'emprunt aux langages cinématographiques, vidéographiques ou numériques : l'ellipse, le flash-back, le morphing, la pixellisation, l'inclusion d'images étrangères au sein du plan, etc. À la projection, prolongeant cette notion d'assemblage, tantôt l'image se répand sur trois ou quatre écrans, assurant une continuité entre les images, tantôt la même image se dédouble ou se « détriple » sur l'ensemble des écrans.
Créolisation
« La façon dont je travaille n'est pas éloignée de la pratique et du processus de créolisation : en premier lieu j'absorbe références, débats, textes, puis je m'éloigne de la théorie en rassemblant l'information visuelle et, enfin, vient le montage au travers duquel émerge le sens », dit Isaac Julien. Historiquement, la créolisation a émergé dans les sociétés esclavagistes, dans le premier processus de mondialisation produit par le commerce des esclaves et la colonisation européenne. Les bouleversements et les transformations qu'induit la mondialisation actuelle jettent les bases d'un nouveau processus de transculturation dont les contours sont encore flous. De nouvelles cartographies de la créolisation émergent en tant qu'espace de conflits et de contacts.
Baltimore
L'identité noire, conjuguée à la volonté de construire une approche plurielle de l'analyse ethnique et raciale, conduit l'artiste à produire une œuvre qui suggère des interactions entre plusieurs périodes de l'histoire culturelle récente. Cette conscience politique de l'histoire se retrouve de façon très affirmée dans Baltimore, 2003, que Julien précise avoir réalisé dans la continuité de ses recherches sur le cinéma de la « Blaxploitation », basées sur la figure centrale de Melvin Van Peebles, réalisateur du film culte Sweet Sweetback's Baadaaass Song, 1971.
La forme en triptyque de l'œuvre permet de proposer un récit qui renvoie à une histoire de la culture noire aux États-Unis, passée, présente, mais aussi future. À la manière d'un film à suspense, deux personnages (Melvin Van Peebles et Vanessa Myrie, jouant une Afro-Cyborg qui rappelle à la fois Angela Davis, icône politique et Pam Grier, icône de la Blaxploitation) parcourent la ville de Baltimore, l'un à la poursuite de l'autre. Ils traversent ainsi le National Great Blacks in Wax Museum, musée populaire où sont exposées les figures en cire des personnalités noires historiques (Martin Luther King, Billie Holiday, Malcolm X), puis le Walkers Art Museum, qui conserve une importante collection d'œuvres datant de l'Antiquité à nos jours. Au fil des rencontres, Isaac Julien assigne à ses personnages un rôle de passeurs entre deux histoires parallèles, entre une culture populaire et une culture savante, et crée une confrontation inédite qui bouleverse la linéarité de l'histoire occidentale.
Fantôme Créole
Œuvre réalisée à l'occasion de cette exposition, Fantôme Créole assemble des images filmées au nord de la Scandinavie et au Burkina Faso comme des éléments complémentaires auxquels Isaac Julien ajoute des images d'archives empruntées à des films ethnographiques. Les relations que l'artiste engage avec ces récits d'explorateurs ou de voyageurs sont à chaque fois comme une relecture du voyage, comme une recherche de soi et des civilisations dans lesquelles on s'immerge. Partant de ces réflexions qui s'appuient sur l'identité de la diaspora africaine, Isaac Julien réalise de façon critique, poétique et engagée, une œuvre qui explore elle-même la mémoire de ses références et transmet sa propre expérience du déplacement.
Autour de l'exposition :
Revue parlée, le 1er juin à 19h30
Fantôme créole avec Isaac Julien, Mark Nash, Carpanin Marimoutou et Françoise Vergès.
Cinéma, le 13 juin à 18h30
Isaac Julien et Elvan Zabunyan présenteront certaines de ses réalisations dans le cadre du cycle « Vidéo et après ».
Biographie
Isaac Julien est né à Londres, en 1960, de parents antillais.
Diplômé de la Saint Martin's School of Art en 1984, où il étudie la peinture et le cinéma.
Premiers travaux : Looking for Langston (1989), Young Soul Rebels (1991) et Frantz Fanon : Black Skin, White Mask (1996). Crée le collectif Sankofa Film and Video. Nominé pour le Turner Prize en 2001, Tate Gallery, Londres, pour ses films The Long Road to Mazatlán (1999), réalisé en collaboration avec Javier de Frutos, et Vagabondia (2000).
Membre de l'équipe de recherche à la Goldsmiths University de Londres.
En 2001, il est lauréat du MIT Eugene Mc Dermott Award, dans la section Art.
En 2003, il remporte le Grand Prix du Jury à la biennale Kunstfilm de Cologne pour la version mono-écran de son installation audiovisuelle Baltimore
Quand
11h - 21h, tous les jours sauf mardis