Bruce Nauman

Trente ans après ses performances enregistrées en film et en vidéo (fin des années 60) dans son studio, et après avoir construit une œuvre prolifique, déroutante, toujours politique, d'une impertinente liberté, Bruce Nauman revient dans l'atelier comme on reviendrait sur les lieux du crime, pour voir si quelque chose n'aurait pas été oublié, pour voir s'il y a encore quelque chose à faire là puisqu'il faut bien faire quelque chose, pour vérifier si ce lieu si mental qu'est l'atelier est encore activable. L'installation, faite de 7 vidéo-projections sonores prend place dans une salle de grandes dimensions ; chaque image cadre une portion de l'atelier de l'artiste filmé la nuit. Si le dispositif d'enregistrement de l'image n'a pas significativement changé - la caméra est toujours fixe et semble se borner à surveiller l'espace et les mouvements qui s'y déroulent -, en revanche le corps de l'artiste s'est retiré, ou presque, de la scène, au profit de l'activité aléatoire et furtive des animaux qui occupent les lieux la nuit. C'est donc en l'absence de l'artiste que le temps de l'atelier se déploie et finit par absorber le temps du spectateur venu passer là un moment.

Qu'attendons-nous au milieu de ces images ? Y a-t-il quelque chose à voir dans cette nouvelle cartographie de l'atelier ? Quelque chose peut-il encore avoir lieu ? Quand l'artiste est sorti, le chat et les souris dansent.

Bruce Nauman, Mapping the Studio II, with color shift, flip, flop & flip/flop (fat Chance John Cage), 2001.

Françoise Parfait: professeur en arts plastiques et nouveaux médias à l'université Jules Verne à Amiens, elle écrit des essais sur la question du vidéographique, dont une contribution récente sur L'installation vidéo dans le Catalogue de la collection Nouveaux médias du Musée national d'art moderne, à paraître sous peu.