Salauds
vers 1974
Salauds
vers 1974
Ámbito | Dessin |
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Técnica | Peinture acrylique et huile sur papier |
Medidas | 119 x 152 cm |
Adquisición | Achat, 1992 |
Inventario | AM 1992-67 |
Información detallada
Artista |
Martial Raysse
(1936, France) |
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Título principal | Salauds |
Fecha de creación | vers 1974 |
Ámbito | Dessin |
Técnica | Peinture acrylique et huile sur papier |
Medidas | 119 x 152 cm |
Inscripciones | T.H.DR. : Salauds |
Adquisición | Achat, 1992 |
Sector de colección | Cabinet d'art graphique |
Inventario | AM 1992-67 |
Análisis
En mai 1968, Martial Raysse, dont la notoriété en tant qu’artiste est déjà immense, se rend à « l’atelier populaire de l’ex-école des Beaux-Arts » de la rue Bonaparte, à Paris. C’est là que sont produites les affiches simples et lapidaires qui donnent au mouvement social en France son imagerie spécifique. Raysse n’y fait, au dire des témoins, aucune affiche, se contentant d’effectuer les tâches les plus humbles, découpe de papier, tirage des sérigraphies, participant aux discussions quotidiennes. Les années qui suivent seront pour lui celles d’une remise en question radicale, et d’un profond changement de style et de techniques. Un monde élégiaque remplace l’univers lisse et aseptisé du Nouveau Réalisme, les teintes fluorescentes posées en aplat sur la toile disparaissent pour de complexes mélanges d’acrylique, d’huile ou de pastel, souvent employés sur du papier. La pratique du dessin, que Raysse n’avait paradoxalement pas abandonnée, même à l’époque où il affirmait n’aimer que « le monde neuf, aseptisé et pur des supermarchés et de la publicité », arrive dès lors comme un élément de provocation, apportant avec elle la résurgence d’une pratique privative. De petits morceaux de papier griffonnés prélevés au « déluge » (c’est-à-dire au rebut) – ceux de Loco Bello et de La Chambre des enfants (1976, MNAM) – vont devenir les lieux d’une vision décalée de clichés personnels, fragments d’une mémoire à temporalité variable, isolés dans un vide qui constitue cette aura circulaire désormais chère à Raysse : ainsi se construit sa propre mythologie personnelle, avec la juste distance d’une révolution douce.
Avec son inscription, « Salauds », comme en lettres de sang sur fond de ciel bleu, ce paysage en suspens, peint sur un grand papier vers 1974, est-il un souvenir des affiches de Mai 68 ? C’est possible. À qui s’adresse l’invective ? Elle visait peut-être, en son temps, des personnes précises : l’artiste ne le dit pas. Mais les destinataires potentiels ne manquent pas, et, c’est à craindre, ne manqueront jamais. L’œuvre demeure comme une lettre ouverte à tous les salauds à venir. Elle conjugue, en un oxymore d’une rare puissance, la douceur d’un petit paysage pastoral – mais un paysage prêt à exploser, hérissé de champignons – et la violence d’une protestation désespérée contre tout ce qui menace désormais les paysages bucoliques.
Didier Semin
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008