François Morellet

François Morellet fait partie de la mouvance abstraction géométrique. Pour la première fois sortie des tiroirs, son œuvre graphique de 1947 à 1961, est montrée. François Morellet s’en explique ainsi :

« Ces dessins me semblaient une nécessité. Beaucoup étaient réalisés « à la sauvette » dans le bureau où j’exerçais mon « premier métier ». Les soirées ou week-ends libres étaient plutôt utilisés à réaliser des projets, choisis douloureusement. Oui, mes dessins étaient approximatifs, riches, sensibles et mes peintures précises, pauvres, froides.

[…] Ces dessins préparatoires ne jouaient pas pour moi le rôle des esquisses classiques où sont ébauchées les grandes lignes de tout ou partie du futur tableau […]. Mon esquisse, pour devenir tableau et offrir son évidence toute nue, n’avait qu’à évacuer ses imprécisions. Le tableau était donc toujours plus simple, plus pauvre que l’esquisse, elle-même riche de droites hésitantes, de noirs grisâtres, de blancs tachés… tout ce « mal foutu » que l’on appelle souvent la sensibilité.

Il m’a bien fallu trente ou quarante ans pour exposer ces dessins sans avoir trop l’impression de me renier. […]

J’adore dessiner… des projets. En quelques secondes et pour quelques centimes, tout peut arriver ! J’aime ces deux coups de crayon sur un morceau de papier où je note « à faire 4m x 4m ou plus grand ». Tous ces « chefs-d’œuvre » que je ne réaliserai sans doute jamais, que j’ai, la plupart du temps, jetés et oubliés. […]

Je suis d’ailleurs étonné d’avoir conservé tant de projets des années 50. […] Je ne m’intéresse pas vraiment à ma « propre » main, à ses hésitations, ses tremblements, sa fermeté… enfin à tout ce qu’elle serait sensée vous transmettre de mon moi profond qui ne vous et ne me regarde pas. »

D’après François Morellet, Entretien avec Claire Stoullig in Le Magazine, n°66, 15 novembre 1991-15 janvier 1992