Création Angelin Preljocaj / Mauro Lanza

Le corps des femmes - une femme ? « la » femme - s'est naturellement imposé au chorégraphe pour sa troisième création conçue pour les danseurs de l'Opéra. Médée l'a inspirée. Non l'antique, mais ces Médées qui font « les faits divers du jour » selon le chorégraphe. Le sacrilège de cette femme, comment le comprendre si l'on n'y perçoit pas le vœu terrible de se soustraire de l'humanité ? Quant à la partition, commande de l'Opéra et de l'Ircam où le compositeur est accueilli en résidence, elle est signée Mauro Lanza.

MC14 / 22 « Ceci est mon corps » est une œuvre de 2001, entièrement conçue pour des hommes et confiée au Ballet de l'Opéra. Douze interprètes. Comme les douze qui témoignèrent que l'humanité du Fils tenait à son corps autant qu'à son esprit. Ainsi pour tous les hommes. Corps tendres et violents. Vulnérables et puissants. Comment l'habiter cette plastique d'animal spirituel ?

Paroles de Mauro Lanza

« Mon premier essai d'électronique appliquée à un ensemble instrumental a été réalisé dans Mare, une œuvre qui a été créée à l'Ircam en février 2004. Dans mes œuvres antérieures, l'électronique me servait à confronter le soliste avec un univers sonore étranger. Je voulais surtout éviter que l'électronique soit comme l'ombre du soliste. Dans Mare, l'électronique est complètement intégrée au son de l'ensemble, elle ne s'entend presque pas. C'est cette idée que j'aimerais développer pour la musique du Ballet d'Angelin Preljocaj à l'Opéra Garnier. Je voudrais que l'électronique devienne un instrument de l'ensemble à part entière, qu'elle en trouble la surface et en étende les possibilités tout en demeurant cachée ou discrète. J'ai également en projet avec l'Ircam une œuvre pour chœur et électronique avec l'ensemble Accentus. Avant même de commencer à travailler, je dois surmonter deux obstacles. Le premier est notre réticence à toucher cette part intime de notre être qu'est la voix. Le second est l'idée qu'on se fait du chœur vocal qui demeure lié, pour moi également, à l'esthétique musicale du XIXe siècle. Mon travail s'oriente dans deux directions principales : le concept de masque et les chœurs de synthèse. La fonction du masque a souvent été double. Figure rituelle, il sert aussi à déformer la voix. J'envisage d'utiliser des masques réels et de leur ajouter des masques électroniques élaborés à l'Ircam qui transformeront les voix en temps réel. La synthèse vocale et les chœurs de synthèse sont un champ déjà un peu balisé à l'Ircam. J'aimerais m'en servir pour produire à partir de quelques voix naturelles les spectres les plus riches et les plus distordus. J'aimerais que la musique soit en même temps au plus près et le plus éloigné de la voix humaine. Ainsi, je ne travaillerai pas à partir d'un texte mais à partir de sons, de fragments de mots, de phonèmes, de bruits de bouche et de gorge. »

« Les assistants musicaux sont comme les bibliothèques vivantes du savoir de l'Ircam. Ils ont tous trois ou quatre formations différentes et l'on sait quand on leur pose un problème qu'ils auront tout de suite plusieurs manières de l'envisager et donc plusieurs solutions à proposer. »

Mauro Lanza, compositeur.