Jean-Yves Jouannais : L'Encyclopédie des guerres

De « Écriture » et ira jusqu'à « Étoile », en passant par « Embêter » et « Épicerie ».

« Clémentine peut se curer les dents », « Le camembert coule sans être torpillé », deux parmi les milliers de messages personnels adressés à la Résistance intérieure par l'intermédiaires de la BBC choisis par Jean-Yves Jouannais pour conclure un de ses livres L'IDIOTIE art, vie, politique - méthode.

Si, à l'instar de Jouannais, on s'interroge sur les origines de l'Encyclopédie, une question s'impose : le travail sur la guerre prolongerait-il la réflexion sur l'idiotie ? Certes, mais sur un mode singulier. Ces phrases si simples, « Gilberte a les yeux noirs », « Le gigot est cuit », ou plus loufoques, «Les girafes ne portent pas de faux col», commandaient les sabotages, les parachutages, d'autres actions de guerre ; elles annonçaient aussi les disparitions, les arrestations, les tortures. C'est dire qu'inséparables des situations auxquelles elles sont attachées, elles unissent, au plus haut degré d'incandescence et donc de pureté, l'héroïsme (cette sorte d'héroïsme que l'on peut admirer sans restriction) avec l'idiotie. Peut-être qu'elles les réconcilient. Et cela, non par inadvertance ou maladresse, mais par la volonté des acteurs de cette histoire qui avaient choisi de marquer leur épopée du coin de l'idiotie, de la façon la plus publique, à la radio. Avaient-ils ainsi le souci de rappeler ce que fut leur faiblesse et leur dénuement initial, les sarcasmes dont ils furent l'objet, comment ils opposèrent à la bêtise dominante leur idiotie héroïque ?

Sans doute, nombre d'entre eux avaient-ils contracté cette fatale maladie qui avait terrassé Bouvard et Pécuchet quand : « une faculté pitoyable se développa dans leur esprit, celle de voir la bêtise et de ne plus la tolérer », une référence essentielle dans l'univers de Jean-Yves Jouannais.