Cine / video
Black Dolls
The Scar of Shame
07 mar 2018
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En écho à l’exposition Black Dolls, la collection Deborah Neff (La Maison Rouge, du 23 février au 20 mai 2018), le service de collection des films du Centre Pompidou s’associe à la commissaire Nora Philippe et organise un cycle de trois séances de cinéma au cours desquelles seront discutés les enjeux de représentation des Africains-Américains et notamment des féminités noires américaines, à travers une sélection d’œuvres historiques et contemporaines. Cette programmation a pour point de départ l’objet et la figure de la poupée, comme support de la construction de soi, intime comme politique.
On redécouvre aujourd’hui des poupées de tissu noires aux États-Unis, vraisemblablement conçues artisanalement par des Africaines-Américaines anonymes du 19e siècle jusqu’aux premières décennies du 20e siècle. Parfois transmises de génération en génération, pour la plupart disparues, ces « black dolls » représentaient, en résistance, la diversité et la beauté des communautés africaines-américaines à une époque où les poupées manufacturées blanches dominaient et où il était presque impossible de trouver des poupées de couleur noire qui ne soient pas racistes. Leur incroyable inventivité formelle et leur pluralité jettent une lumière nouvelle sur l’histoire féminine noire et sur la charge politique comme imaginaire que portent les poupées.
Tourné à Philadelphie par Frank Peregini pour le compte de la Colored Players Film Corporation, The Scar of Shame (1926) sort sur les écrans de cinéma au moment où la communauté intellectuelle et artistique africaine-américaine, réunie autour de la Harlem Renaissance, formule les fondements du « New Negro ». Considéré comme un « race movie », joué intégralement par un casting noir, ce muet mélodramatique s’attache à évacuer du récit cinématographique américain les stéréotypes raciaux et moraux largement véhiculés par le cinéma hollywoodien. Ces mêmes représentations stéréotypées se retrouvent déconstruites à travers le montage ultra dynamique de Colored Spade (1971), un collage animé de l’artiste Betye Saar dans lequel viennent s’entrechoquer illustrations et caricatures racistes bariolées puisées dans l’iconographie populaire américaine, pour être finalement subsumées par le noir et blanc.
La rare copie 35mm de The Scar of Shame projetée, conservée à la Library of Congress, présente une version du film qui comporte une scène coupée impliquant une poupée.
Séance présentée par Daniel Soutif (philosophe, écrivain, critique d’art et commissaire d’exposition)
Betye Saar, Colored Spade, 1971, 16mm (sur fichier num.), coul., son, 1.19min.
Frank Peregini, The Scar of Shame, 1926, 35mm, nb., son, 76min.
Daniel Soutif est philosophe, écrivain et critique d’art français. Il a occupé les fonctions de rédacteur en chef des Cahiers du musée national d’art moderne (1990-1994), directeur du développement culturel au Centre Pompidou (1993-2001). Commissaire d’expositions, Daniel Soutif a conçu entre autre Le temps, vite ! (Centre Pompidou, 2000), Le siècle du Jazz (Musée du Quai Branly- Jacques Chirac, 2009) et plus récemment The Color Line (Musée du Quai Branly- Jacques Chirac, 2016). Il est également auteur du film Noire est la couleur (2016), réalisé par Jacques Goldstein.
Remerciements : Daniel Soutif, Nora Philippe, Betye Saar, Robert & Tilton Gallery (Culver City, Californie), Library of Congress (Washington), la Maison Rouge (Paris) et Myriam Bejaoui
Quando
20:00 - 22:00
Dónde
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